Le chemin de la Cour – Les dirigeants israéliens devant la Cour Pénale Internationale

Par Christophe Oberlin

8 juillet 2014. Pour la troisième fois en six ans, Israël attaque la bande de Gaza, un territoire à peine plus grand que l’Île de Ré où s’entassent un million huit cent mille habitants.

Très vite les images du massacre inondent les réseaux sociaux, tandis que les grands médias occidentaux et la plupart des responsables politiques campent sur une position « équilibrée », quand ils ne prennent pas fait et cause pour Israël. On parle encore de « possibilités de crimes de guerre » dans les instances internationales, alors que le grand public les constate pratiquement en direct, à la vue d’images terrifiantes. Plus de deux milles Palestiniens sont tués en quelques semaines, et personne ne conteste plus qu’il s’agit en grande majorité de civils.

Le 25 juillet 2014, au nom du ministre de la Justice de Palestine, Salim Al-Saqqa, et du procureur de Gaza, Ismaïl Jaber, un avocat lyonnais, maître Gilles Devers dépose une plainte contre Israël auprès de la Cour Pénale Internationale.

Débute alors une vaste polémique juridique, alors que les bombes pleuvent toujours sur Gaza.

À partir de l’entrée en fonction de la Cour Pénale Internationale en 2002, Christophe Oberlin retrace les offensives sanglantes sur la bande de Gaza dont il est, depuis 2001, un témoin privilégié. Il montre comment la Cour Pénale Internationale est demeurée, jusqu’à présent, une instance de riches pour juger les pauvres. Il dénonce ceux qui, y compris au niveau de l’Autorité Palestinienne, ont saboté les saisines de la Cour contre les dirigeants israéliens. Il démontre que ce sont bien les forces combattantes palestiniennes qui demandent l’application du droit international, comme celle du droit interne palestinien.

Après des décennies de violences et de simulacres de négociations, le conflit israélo-palestinien est-il entré dans l’ère du Droit ?

Extrait du site des Éditions Erik Bonnier

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Broché: 140 pages
Éditeur : Erick Bonnier (1 novembre 2014)
Collection : Encre d’Orient
Langue : Français
ISBN-10: 2367600406
ISBN-13: 978-2367600406
Dimensions du produit: 19 x 1,1 x 14,5 cm

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Introduction

Près d’une quarantaine de séjours en Palestine, échelonnés sur treize années, me donnent peut-être une perception particulière du conflit israélo-palestinien, différente de celle des chercheurs, des historiens ou des journalistes.

Loin de moi l’idée de caricaturer les chercheurs qui seraient par nature dénués de sentiments, les historiens qui raconteraient davantage l’histoire des grands plutôt que celle des petits, ou les journalistes qui seraient par essence incultes et voués au sensationnel. Beaucoup font un excellent travail. Mais il est une réflexion dont presque tous font état dès lors qu’ils ont vécu sur la terre de Palestine : les plus aguerris en reviennent changés. Voir les événements de l’intérieur, se frotter au quotidien des individus, sonder les âmes, constitue une approche différente. C’est ce que j’ai eu la chance de faire en un peu plus d’une décennie.

Le récit qui suit a été recueilli par une personne ordinaire que le hasard de sa profession et de ses idées a définitivement ancré dans l’histoire au quotidien des parias de Gaza. Atteint d’une méconnaissance grave des enjeux israélo palestiniens, élevé dans la négation de la Palestine, il m’a fallu du temps et des lectures avant de découvrir le forfait dont cette terre est la victime. J’ai essayé alors de combler mes lacunes par l’étude et le recueil de ces informations qui sont souvent délaissées dans les livres d’histoire classiques : celle des hommes et de leur vécu, de leur ressenti, car ce sont ces sentiments qui en dernier recours font l’histoire.

Les livres modernes pallient maintenant à ce défaut. Les meilleurs, à côté de l’histoire factuelle, incorporent des anecdotes, des extraits de journaux intimes, des lettres de personnages communs, qui souvent en disent beaucoup sur une ambiance d’époque, celle qui va créer ou précipiter l’événement.

N’étant donc ni historien ni chercheur ni journaliste, c’est à travers ces anecdotes, ces événements du terrain vécus personnellement, ces rencontres avec l’habitant, le politique ou le résistant, que j’ai essayé de faire œuvre de pédagogie à travers une série de livres. En commençant par la biographie d’un Palestinien, Mohamed Rantisi, puis en écrivant les Chroniques de Gaza, enfin en relatant un épisode oublié mais fondateur : la déportation de 400 membres du Hamas et du Jihad islamique au Liban en 1992.

Ici je raconte le cheminement des violences, des trahisons, mais aussi l’émergence du droit entre 2002, année de la création de la Cour pénale internationale et 2014, année de la plainte la plus pertinente déposée contre les dirigeants israéliens. Douze années de drames, de massacres et de mensonges, avant que le droit ne pointe son nez dans une affaire dont il avait toujours été exclu.

Que le lecteur me pardonne de mêler dans ce récit la grande Histoire, celle des Palestiniens et du droit, avec la petite (la mienne). Mais c’est justement en étant confronté personnellement à des dénis de droit que j’ai cherché à en savoir davantage, et à partager ces connaissances avec d’autres.

Mêlé par une suite de hasards au déclenchement et à l’acheminement de cette plainte à la Cour pénale internationale, le récit que j’en fais n’est évidemment pas celui d’un juriste que je ne suis pas. C’est le récit du hallebardier de la pièce de théâtre qui donne son point de vue, rien de plus.