Conseil de sécurité : à quand un vote pour appliquer des sanctions à Israël ?

Fascistes israéliens
Juin 2014 - Territoires palestiniens - Rassemblement de colons et fascistes israéliens, appelant au meurtre de Palestiniens - Photo : ActiveStills.org

Par Ali Abunimah

Le Conseil de sécurité de l’ONU a voté par 14 contre 0 et une abstention – les États-Unis – une résolution condamnant les colonies israéliennes en Cisjordanie occupée.

La résolution adoptée vendredi exige qu’Israël “cesse immédiatement et complètement toutes les activités de colonisation dans les territoires palestiniens occupés, y compris Jérusalem-Est, et qu’il respecte pleinement toutes ses obligations légales à cet égard”.

C’est une déclaration claire que les activités coloniales d’Israël sont illégales, mais comme je l’ai expliqué dans une analyse jeudi, les résolutions existantes – qui n’ont pas été appliquées depuis des décennies – le font déjà.

Cette résolution, comme celles qui la précèdent, ne prévoit aucune conséquence concrète pour Israël s’il ne s’y conforme pas. Il y a aussi des éléments clés de la résolution – concernant la solution dite des deux États et le droit des Palestiniens de résister – qui selon moi érodent les droits des Palestiniens.

Mais les partisans des droits des Palestiniens vont au moins saluer le renouvellement par le Conseil de sécurité de sa condamnation de longue date du vol par Israël des terres palestiniennes. Cela donnera une impulsion aux initiatives qui visent à mettre fin à toutes les échanges avec les colonies.

Drame diplomatique

Le vote est intervenu après 24 heures d’un extraordinaire drame diplomatique et de violentes dénonciations israéliennes contre son plus grand bienfaiteur, les États-Unis.

Le jeudi, quelques heures avant que la résolution parrainée par l’Égypte devait être votée, le Caire décida ce la retirer.

C’était le résultat d’une intense pression israélienne sur le dictateur égyptien Abdulfattah al-Sisi, puisque comme l’a signalé le journal Haaretz de Tel-Aviv, la résolution “n’était pas conforme aux bonnes relations et à la coopération en matière de sécurité entre les deux pays, et ferait beaucoup de mal à Israël.”

Mais le facteur décisif semble avoir été l’intervention du président américain élu Donald Trump, qui a tweeté que les États-Unis devraient opposer leur veto à la résolution et qui avait appelé Sisi personnellement pour s’opposer à l’initiative égyptienne.

Israël poussa un soupir de soulagement, et le quotidien en hébreu Yediot Ahronot portait un titre en première page disant “Merci Sisi”.

L’armée égyptienne dépend fortement d’environ des 1,5 milliard de dollars d’aide militaire américaine annuelle, un soutien qui ne perdure que tant que l’Égypte continue de jouir des faveurs du lobby israélien.

Mais cela ne signifia pas la fin de la résolution. Quatre autres membres du Conseil de sécurité – la Nouvelle-Zélande, la Malaisie, le Venezuela et le Sénégal – ont donné un ultimatum à l’Égypte disant que si elle ne soumettait pas à nouveau la résolution, ils la soumettraient eux-mêmes à un vote vendredi.

En mode panique

Cela a mis Israël en “mode panique”. Un officiel israélien dont le nom n’est pas communiqué, a lancé une attaque violente contre le président Barack Obama et son secrétaire d’État.

“Le président Obama et le secrétaire [John] Kerry sont derrière cette initiative honteuse contre Israël à l’ONU”, a déclaré le responsable aux médias. “L’administration américaine a secrètement préparé avec les Palestiniens une résolution anti-israélienne extrême derrière le dos d’Israël, qui propulsera le terrorisme et les campagnes de boycott, et fait en réalité du mur occidental un territoire palestinien occupé.”

L’officiel se référait au “mur occidental”, anciennement dans le quartier marocain de Jérusalem, qui fait partie de Jérusalem-Est occupée. Le responsable israélien a appelé la résolution “un abandon qui rompt des décennies de politique américaine de protection à l’égard d’Israël à l’ONU”.

L’attaque est d’autant plus extraordinaire que le mois de septembre dernier, Obama a approuvé le plus important programme d’aide militaire à Israël – un montant sans aucune condition de 38 milliards de dollars au cours des 10 prochaines années.

Vendredi matin, le sénateur républicain Lindsey Graham a menacé de faire tout son possible pour bloquer le financement américain des Nations Unies si la résolution était adoptée.

Le représentant de la Malaisie, Ramlan Ibrahim, a déclaré au Conseil de sécurité avant le vote que le projet était rendu plus urgent par l’adoption récente par Israël d’une nouvelle loi pour légitimer ses vols de terres en Cisjordanie.

L’ambassadrice américaine Samantha Power a déclaré au Conseil de sécurité après le vote que l’organisme avait “réaffirmé le consensus établi que les colonies n’ont aucune validité juridique.”

Elle a souligné que jusqu’à aujourd’hui, l’administration Obama avait été le seul gouvernement américain depuis 1967 qui n’a pas assisté à moins une résolution adoptée sur la question.

Power a aussi affirmé que l’ONU avait un long passif d’un traitement injuste d’Israël, et elle a condamné les États membres pour leurs critiques d’Israël et pour appliquer ce qu’elle a qualifié de “double standard”.

Indépendamment du psycho-drame lié à ce vote, la situation sur le terrain reste inchangée : Israël continue de s’emparer des terres palestiniennes et de construire des colonies, tandis que le Conseil de sécurité de l’ONU publie des résolutions qui restent des bouts de papier.

A4 * Ali Abunimah est un journaliste palestino-américain, auteur de The Battle for Justice in Palestine. Il a contribué à The Goldstone Report : The Legacy of the Landmark Investigation of the Gaza Conflict. Il est le cofondateur de la publication en ligne The Electronic Intifada et consultant politique auprès de Al-Shabaka.

23 décembre 2016 – The Electronic Intifada – Traduction : Chronique de Palestine