Le génocide à Gaza a révélé le fascisme israélien et occidental

Un Palestinien blessé est assis sur un matelas dans le quartier Al-Karama de la ville de Gaza, détruit par des frappes aériennes israéliennes, le 11 octobre 2023 - Photo : Mohammed Zaanoun / Activestills

Par Jonathan Cook

L’Occident soutient totalement le génocide du peuple palestinien, tant au plan matériel que médiatique. Il est temps de se demander pourquoi.

Le premier génocide au monde retransmis en direct a commencé il y a près d’un an à Gaza et s’étend rapidement à la Cisjordanie occupée mais pourtant les médias occidentaux de l’establishment évitent toujours d’utiliser le terme « génocide » pour décrire le déchaînement de la barbarie israélienne.

Plus le génocide empire, plus le blocus de l’enclave par Israël se prolonge, plus il est difficile d’occulter les horreurs, moins les medias parlent de Gaza.

Le media le plus répréhensible a été la BBC, étant donné qu’il s’agit du seul organisme de radiodiffusion britannique financé par des fonds publics. La BBC est censée rendre des comptes au public britannique, qui est obligé par la loi de lui payer une redevance.

Cela a rendu d’autant plus ridicule les récentes accusations enflammées des médias des milliardaires concernant le « parti pris de la BBC », non pas contre les Palestiniens, mais contre Israël. Oui, vous avez bien entendu.

Il s’agit de la même BBC « anti-israélienne » qui, en commentant un nouvel incident – un sniper israélien a tiré une balle dans la tête d’une citoyenne américaine – s’est bien gardé, une fois de plus, de préciser qui l’avait tuée. Un lecteur non averti pouvait facilement déduire du titre « Une activiste américaine abattue en Cisjordanie occupée » que le coupable était un tireur palestinien.

Après tout, ce sont les Palestiniens, et non Israël, qui sont représentés par le Hamas, un groupe « catalogué comme organisation terroriste » par le gouvernement britannique, comme nous le rappelle utilement la BBC.

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Et c’est la BBC, prétendument « anti-israélienne », qui, la semaine dernière, a cherché à contrecarrer les efforts de 15 agences d’aide humanitaire connues sous le nom de Comité des situations d’urgence (Disasters Emergency Committee, DEC) pour organiser une importante collecte de fonds par l’intermédiaire des radiodiffuseurs du pays.

Personne ne se fait d’illusions sur les raisons du refus de la BBC de s’impliquer. Le DEC a choisi Gaza comme bénéficiaire de sa dernière campagne d’aide.

Le Comité a été confronté au même problème avec la BBC en 2009, lorsque ce média du service public a refusé de participer à une collecte de fonds pour Gaza sous le prétexte extraordinaire que cela compromettrait ses règles d’« impartialité ».

Vraisemblablement, aux yeux de la BBC, sauver la vie d’enfants palestiniens est une forme de discrimination, mais sauver la vie d’enfants ukrainiens n’en est pas une.

Lors de son attaque de 2009, Israël avait tué « seulement » quelque 1300 Palestiniens à Gaza, au lieu des dizaines de milliers – ou peut-être des centaines de milliers, personne ne le sait vraiment – qu’il a tués cette fois-ci.

Le regretté Tony Benn, un homme politique travailliste indépendant d’esprit, avait refusé de se soumettre aux dictats de la BBC et avait soutenu les efforts du DEC en détaillant en direct la façon de faire un don, malgré les protestations du présentateur de l’émission. Comme il l’avait souligné à l’époque, et c’est encore plus vrai aujourd’hui : « Des gens vont mourir à cause de la décision de la BBC ».

Selon des sources au sein du Comité et de la BBC, les dirigeants de ce media public sont terrifiés – comme ils l’ont toujours été – par le « retour de bâton » d’Israël et de ses puissants lobbyistes au Royaume-Uni au cas où ils oseraient promouvoir l’appel fonds pour Gaza.

Un porte-parole de la BBC a déclaré à Middle East Eye que la collecte de fonds ne répondait pas à tous les critères établis pour un appel national, malgré l’assurance du DEC, mais a noté que la possibilité de diffuser un appel était « en cours d’examen ».

Auto-censure

Si Israël est en mesure de perpétrer un génocide et si les dirigeants occidentaux peuvent se permettre de le soutenir activement, c’est précisément parce que les médias de l’establishment se censurent constamment pour protéger Israël de leur mieux.

Les lecteurs et les téléspectateurs de ces medias ne peuvent pas se rendre compte qu’Israël commet des crimes de guerre systématiques et des crimes contre l’humanité à Gaza et en Cisjordanie occupée, sans parler d’un génocide.

Les journalistes préfèrent qualifier les événements de « crise humanitaire », car cela retire à Israël la responsabilité d’être l’auteur de cette crise. Ils s’intéressent aux effets, aux souffrances, plutôt qu’à la cause : Israël.

Pire encore, ces mêmes journalistes nous jettent constamment du sable dans les yeux avec des contre-arguments grotesques qui suggèrent qu’Israël est en fait la victime, et non l’agresseur.

Prenons, par exemple, la nouvelle « étude » sur le prétendu parti pris anti-israélien de la BBC, réalisée par un avocat britannique basé en Israël. Un Daily Mail faussement horrifié a averti ce week-end que « la BBC est QUATORZE fois plus susceptible d’accuser Israël de génocide que le Hamas … au milieu de demandes croissantes d’enquête ».

Mais si vous lisez le texte, vous découvrirez, avec stupéfaction, que sur la période de quatre mois sur laquelle porte l’étude, la BBC n’a associé Israël au terme « génocide » que 283 fois, malgré l’énorme quantité de contenus produits par la BBC et relayés sur ses nombreuses chaînes de télévision et de radio, son site web, ses podcasts et diverses plateformes de médias sociaux, qui touchent des millions de gens dans le pays et à l’étranger.

De plus, aucune de ces références n’a été faite par la BBC elle-même, ce que le Mail et les autres médias de droite se gardent bien de mentionner. Même les invités palestiniens qui tentent d’utiliser le mot dans ses émissions sont rapidement interrompus.

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Beaucoup de ces références se trouvent en fait dans des reportages de BBC News sur le procès que l’Afrique du Sud a entamé contre Israël devant la plus haute juridiction du monde, la Cour internationale de justice. La CIJ enquête sur Israël pour ce qu’elle a qualifié en janvier de risque « plausible » de génocide dans la bande de Gaza.

Malheureusement pour la BBC, il a été impossible de rapporter ces évènements sans mentionner le mot « génocide », car il est au cœur de l’affaire juridique.

Ce qui devrait, en fait, nous étonner bien davantage, c’est qu’un vrai génocide, un génocide pur et dur dont l’Occident est pleinement complice, n’a été mentionné par l’empire médiatique mondial de la BBC que 283 fois au total au cours des quatre mois qui ont suivi le 7 octobre.

Les campagnes d’intimidation

L’arrêt préliminaire de la Cour mondiale sur le génocide israélien est un une information contextuelle essentielle qui devrait figurer au premier plan de tous les reportages sur Gaza. Au lieu de cela, il n’est généralement pas mentionné, ou alors discrètement à la fin des reportages, où peu de gens le liront.

La BBC est allée très loin dans l’ignominie en ne relayant pratiquement pas les arguments des avocats de l’Afrique du Sud devant la Cour internationale en janvier pour prouver un génocide, que le panel de juges a jugé « plausible ». En revanche, elle a diffusé l’intégralité de la défense d’Israël devant le même tribunal.

Aujourd’hui, après cette dernière campagne d’intimidation organisée par les médias des milliardaires, la BBC sera probablement encore moins disposée à mentionner le génocide – ce qui est évidemment le but recherché.

Ce qui aurait dû stupéfier le Mail et le reste des médias de l’Establishment, c’est que la BBC a diffusé 19 références à un « génocide » du Hamas au cours de la même période de quatre mois.

L’idée que le Hamas est capable d’un « génocide » contre Israël ou les Juifs est aussi éloignée de la réalité que la fiction selon laquelle il aurait « décapité des bébés » le 7 octobre ou les affirmations, toujours non prouvées, selon lesquelles il aurait commis des « viols massifs » ce jour-là.

Le Hamas, un groupe armé comptant des milliers de combattants, actuellement encerclé à Gaza par l’une des armées les plus puissantes du monde, est tout à fait incapable de commettre un « génocide » d’Israéliens.

C’est, bien entendu, la raison pour laquelle la Cour Internationale n’enquête pas sur le Hamas pour génocide et que seuls les apologistes les plus fanatiques d’Israël diffusent des fausses nouvelles selon lesquelles le Hamas commet un génocide ou pourrait tenter de le faire.

Personne ne prend vraiment au sérieux les allégations de génocide du Hamas. La stupéfaction du monde entier lorsque le groupe a réussi à s’échapper du camp de concentration qu’est Gaza pour une seule journée, le 7 octobre, et à causer tant de morts et de ravages, en est la preuve.

L’idée que le Hamas pourrait faire quelque chose de pire que cela – ou même répéter l’attaque – est tout simplement délirante. Le mieux que le Hamas puisse faire est de mener une guérilla d’usure contre l’armée israélienne à partir de ses tunnels souterrains, et c’est précisément ce qu’il fait.

Voici une autre statistique de la récente « étude » qui mérite d’être soulignée : au cours de la même période de quatre mois, la BBC a utilisé l’expression « crimes contre l’humanité » 22 fois pour décrire les atrocités commises par le Hamas un jour d’octobre dernier, contre seulement 15 fois pour décrire les atrocités encore pires commises par Israël de manière continue au cours de l’année écoulée.

La police de la pensée

Le but ultime de toute cette violence médiatique est d’accroître la pression sur la BBC pour qu’elle se soumette toujours davantage à l’agenda politique de droite des médias des milliardaires et aux intérêts commerciaux de la machine de guerre qu’ils représentent.

La mission du média public est de dire aux Britanniques ce qu’ils doivent penser – pas à la droite, cela des journaux tels que le Mail et le Telegraph s’en chargent, mais à l’autre côté de l’échiquier politique, à ce que l’on appelle à tort « la gauche ».

La tâche de la BBC est de poser les limites de ce qu’il est acceptable de dire ou de faire – c’est-à-dire acceptable pour l’Establishment britannique – quand on veut remettre en question sa politique intérieure et étrangère.

De mémoire d’homme, des leaders progressistes de l’opposition de gauche ont émergé à deux reprises : Michael Foot au début des années 1980, et Jeremy Corbyn à la fin des années 2010. À chaque fois, les médias se sont tous unis pour les vilipender.

Cela ne devrait surprendre personne. Faire de la BBC une cible – l’accuser d’être « de gauche » – est la recette habituelle pour, à la fois, faire passer les médias britanniques d’extrême droite pour des centristes et pour pousser la BBC toujours plus à droite.

Au fil des décennies, les médias des milliardaires ont imprégné l’esprit du public de l’idée que la BBC se situe à l’extrémité de la pensée prétendument « de gauche ». Plus la société se droitise, plus la gauche est confrontée à un choix fâcheux : soit suivre la BBC toujours plus à droite, soit être constamment vilipendée comme la gauche irrationnelle, la gauche woke, la gauche du chaos, la gauche extrémiste.

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Si un membre du personnel de la BBC s’avisait de protester, la meute des journalistes aux ordres de Rupert Murdoch et d’autres magnats de la presse analyserait sa protestation comme une preuve supplémentaire du parti pris gauchiste ou marxiste de la BBC. Et cela ne ferait que renforcer toutes les accusations habituelles.

Le système médiatique est truqué, et la BBC est l’outil idéal pour qu’il le reste.

Le bouton du génocide

Ce que la BBC et le reste des grands médias minimisent, ce ne sont pas seulement le génocide israélien lui-même à Gaza, mais aussi l’intention génocidaire évidente des dirigeants israéliens, de la société dans son ensemble et de ses apologistes au Royaume-Uni et ailleurs.

Le fait qu’Israël commette un génocide à Gaza ne devrait pas faire l’objet de débat, puisque tout le monde, y-compris le Premier ministre lui-même, nous a dit que c’était bien là leur intention.

Le dossier de l’Afrique du Sud devant la Cour internationale est rempli d’exemples de déclarations génocidaires des dirigeants israéliens. En voilà une : Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a comparé les Palestiniens à « Amalek » – une référence à une histoire biblique bien connue de tous les écoliers israéliens, dans laquelle les Israélites reçoivent l’ordre de Dieu d’effacer de la surface de la terre tout un peuple, y compris les enfants et le bétail.

Tous ceux qui utilisent les médias sociaux ont été confrontés à de multiples déclarations génocidaires du même genre de la part de partisans d’Israël, pour la plupart anonymes.

Ces partisans du génocide ont récemment pris figure humaine – deux figures, en fait. Des clips vidéo de deux Israéliens, podcastant en anglais sous le nom de « Deux bon petits juifs » (Two Nice Jewish Boys), sont devenus viraux. On y voit les deux hommes appeller à l’extermination de tous les Palestiniens, hommes, femmes et enfants, jusqu’au dernier.

L’un des podcasteurs déclare que « personne en Israël » ne se soucie de savoir si une épidémie de polio causée par la destruction par Israël des installations d’eau, des égouts et des hôpitaux de Gaza finit par tuer des bébés, et il ajoute que l’accord d’Israël pour une campagne de vaccination n’est motivé que par la nécessité d’améliorer son image.

Dans un autre clip, les podcasteurs s’accordent à dire que les otages palestiniens dans les prisons israéliennes méritent d’être « exécutés en leur enfonçant un objet trop gros dans le derrière ».

Ils précisent également qu’ils n’hésiteraient pas à appuyer sur un bouton de génocide pour anéantir le peuple palestinien : « Si vous me donniez un bouton pour effacer Gaza – chaque être vivant à Gaza serait mort demain – J’appuierais dessus dans la seconde… Et je pense que la plupart des Israéliens le feraient. Ils n’en parleraient pas comme moi, ils ne diraient pas ‘j’ai appuyé’, mais ils appuieraient ».

Une dépravation sans limites

Il est facile de s’alarmer face à des commentaires aussi inhumains, mais la fureur générée par ce couple risque de détourner l’attention d’un point plus important : ils sont tout à fait représentatifs de la situation actuelle de la société israélienne. Ils ne font pas partie d’une frange dépravée. Ils ne sont pas des exceptions. Ils sont fermement ancrés dans le courant dominant.

La preuve n’en est pas seulement que l’armée israélienne bat et sodomise systématiquement les prisonniers palestiniens, qu’elle tire des balles dans la tête d’enfants palestiniens à Gaza, qu’elle est enchantée de faire sauter des universités et des mosquées, qu’elle profane les corps des Palestiniens et qu’elle impose un blocus de famine à Gaza.

La preuve c’est que la société israélienne dans son ensemble applaudit cette dépravation sans limites.

Après l’apparition d’une vidéo montrant un groupe de soldats sodomisant un prisonnier palestinien dans le camp de torture israélien de Sde Teiman, les Israéliens ont pris leur parti. L’étendue des blessures internes du prisonnier a nécessité son hospitalisation.

Dans la foulée, des experts israéliens – des « libéraux » éduqués – se sont assis dans des studios de télévision pour discuter de la question de savoir si les soldats devaient être autorisés à décider eux-mêmes de violer des Palestiniens en détention, ou si de tels abus devaient être organisés par l’État dans le cadre d’un programme de torture officiel.

L’un des soldats accusés dans l’affaire du viol collectif a choisi de lever son anonymat après avoir été défendu par les journalistes qui l’ont interviewé. Il est désormais traité comme une petite célébrité dans les émissions de la télévision israélienne.

Les sondages montrent que la grande majorité des Israéliens juifs approuvent la destruction de Gaza ou souhaitent qu’elle se poursuive. Quelque 70 % d’entre eux veulent bannir des plateformes de médias sociaux toute expression de sympathie à l’égard des civils de Gaza.

Rien de tout cela n’est vraiment nouveau. Tout cela est juste devenu beaucoup plus manifeste après l’attaque du Hamas le 7 octobre.

Après tout, certaines des violences les plus choquantes de cette journée ont eu lieu lorsque des combattants du Hamas sont tombés sur un festival de danse près de Gaza.

L’emprisonnement brutal de 2,3 millions de Palestiniens et le blocus de 17 ans qui les prive des éléments essentiels de la vie et de toute liberté digne de ce nom étaient devenus tellement normaux pour les Israéliens que des jeunes Israéliens branchés et épris de liberté pouvaient sans problème organiser une rave tout près de cette masse de souffrance humaine.

Ou comme l’a confié un des deux bons petits juifs : « C’est agréable de savoir que vous dansez dans un concert pendant que des centaines de milliers de Gazaouis n’ont plus de maisons et dorment dans une tente ». Son partenaire l’a interrompu : « Les gens aiment savoir qu’ils [les Palestiniens de Gaza] souffrent ».

Des « soldats héroïques »

Cette monstrueuse indifférence, voire ce plaisir sadique suscité par la torture d’autrui n’est pas l’apanage des Israéliens. Il existe toute une armée d’éminents partisans d’Israël en Occident qui se posent en apologistes des actions génocidaires d’Israël.

Ce qui les unit tous, c’est l’idéologie suprématiste juive du sionisme.

En Grande-Bretagne, le grand rabbin Ephraim Mirvis a pris la parole, non pas pour condamner le massacre des enfants palestiniens à Gaza, mais, bien au contraire, pour donner sa bénédiction aux crimes de guerre d’Israël.

À la mi-janvier, alors que l’Afrique du Sud commençait à rendre publique sa plainte contre Israël pour génocide, jugée « plausible » par la Cour internationale, Mirvis a pris la parole lors d’une réunion publique, où il a qualifié les opérations israéliennes à Gaza de « chose la plus extraordinaire qui soit ».

Il a utilisé l’expression « nos soldats héroïques » pour parler de soldats, dont il est avéré qu’ils ont commis des crimes de guerre, en assimilant bizarrement les soldats d’une armée étrangère, l’armée israélienne, aux soldats de l’armée britannique.

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Même s’il ignorait peut-être réellement les crimes de guerre commis à Gaza il y a huit mois, il ne peut plus prétendre les ignorer aujourd’hui.

Pourtant, la semaine dernière, Mirvis a repris la parole, cette fois pour reprocher au gouvernement britannique d’avoir un petit peu réduit les ventes d’armes à Israël après avoir reçu un avertissement juridique sur la possible utilisation par Israël de ces armes pour commettre des crimes de guerre.

En d’autres termes, Mirvis a ouvertement appelé son propre gouvernement à ignorer le droit international et à armer un État qui commet des crimes de guerre, selon les juristes du gouvernement britannique, et un « génocide plausible », selon la Cour internationale.

Des apologistes du génocide comme Mirvis occupent des postes influents dans tout l’Occident.

Apparaissant à la télévision à la fin du mois dernier, son homologue français, Haim Korsia, a exhorté Israël à « finir le travail » à Gaza et a soutenu Netanyahu, que le procureur général de la Cour pénale internationale poursuit pour crimes de guerre.

Korsia a refusé de condamner l’assassinat par Israël d’au moins 41 000 Palestiniens à Gaza, arguant que ces morts n’étaient « pas du même ordre » que les 1 150 Israéliens tués le 7 octobre.

Il est difficile de ne pas conclure qu’il voulait dire que les vies palestiniennes n’étaient pas aussi importantes que les vies israéliennes.

Le fasciste intérieur

Il y a près de 30 ans, le sociologue israélien Dan Rabinowitz a publié un livre, Overlooking Nazareth, dans lequel il affirmait qu’Israël était une société bien plus profondément raciste qu’on ne le pensait.

Depuis le 7 octobre, son ouvrage a pris une nouvelle importance, et pas seulement pour les Israéliens.

Dans les années 1990, comme aujourd’hui, les étrangers supposaient qu’Israël était divisé entre les religieux et les laïcs, les traditionnels et les modernes, entre les nouveaux immigrants incultes et les « vétérans » plus éclairés.

Les Israéliens considèrent souvent que leur société est aussi divisée géographiquement : entre des communautés périphériques où le racisme populaire prospère et un centre métropolitain autour de Tel Aviv où prédomine un libéralisme humain et cultivé.

Rabinowitz a déchiré cette thèse en mille morceaux. Il a pris comme étude de cas la petite ville juive de Nazareth Illit, dans le nord d’Israël, réputée pour ses politiques d’extrême droite, notamment son soutien au mouvement fasciste de feu le rabbin Meir Kahane.

Rabinowitz attribue la politique de la ville principalement au fait qu’elle a été construite par l’État hébreu par-dessus Nazareth, la plus grande communauté de Palestiniens en Israël, dans le but précis de contenir, de contrôler et d’opprimer son voisin palestinien historique.

Son argument était que les Juifs de Nazareth Illit n’étaient pas plus racistes que les Juifs de Tel Aviv. Ils étaient simplement beaucoup plus exposés à la présence « arabe ». En fait, étant donné que peu de Juifs ont choisi d’y vivre, ils étaient largement surpassés en nombre par leurs voisins « arabes ». L’État les a placés dans une situation de concurrence directe et conflictuelle avec la Nazareth palestinienne pour les terres et les ressources.

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Les Juifs de Tel-Aviv, en revanche, ne rencontraient presque jamais d’« Arabes », sauf dans un rôle subalterne : serveur ou ouvrier sur un chantier de construction.

La différence, note Rabinowitz, est que les Juifs de Nazareth Illit étaient confrontés quotidiennement à leur propre racisme. Ils l’avaient rationalisé et s’en étaient accommodés. Les Juifs de Tel-Aviv, quant à eux, pouvaient prétendre qu’ils étaient ouverts d’esprit parce que leur sectarisme n’était jamais réellement mis à l’épreuve.

Le 7 octobre a changé la donne. Les « libéraux » de Tel-Aviv ont soudain été confrontés à une présence palestinienne indésirable et vengeresse à l’intérieur de leur État. L’« Arabe » n’était plus l’opprimé, l’apprivoisé, le servile auquel ils étaient habitués.

De manière inattendue, les Juifs de Tel-Aviv ont senti qu’un espace qu’ils croyaient exclusivement le leur était envahi, tout comme les Juifs de Nazareth Illit l’avaient ressenti pendant des décennies. Et ils ont réagi exactement de la même manière. Ils ont rationalisé le fasciste qui sommeillait en eux. Du jour au lendemain, le génocide a cessé de les déranger.

Le parti du génocide

Le sentiment d’être envahi s’étend bien au-delà d’Israël.

Le 7 octobre, l’assaut surprise du Hamas n’était pas seulement une attaque contre Israël. L’évasion d’un petit groupe de combattants armés de l’une des prisons les plus grandes et les plus lourdement fortifiées jamais construites a également été vécue comme une attaque insupportable par les arrogantes élites occidentales qui croyaient que l’ordre mondial qu’elles avaient construit par la force pour s’enrichir était permanent et inviolable.

Le 7 octobre a sérieusement ébranlé leur confiance dans le fait que le monde non occidental pouvait être contenu pour toujours par l’Occident, qu’il pouvait être éternellement maintenu dans la soumission et l’esclavage.

Tout comme pour les Israéliens, l’attaque du Hamas a rapidement révélé le petit fasciste qui se cachait dans le cœur des élites politiques, médiatiques et religieuses occidentales, des élites qui ont passé leur vie à prétendre être les gardiens de la mission civilisatrice de l’Occident – une mission éclairée, humanitaire et libérale.

La comédie a fonctionné, car le monde était ordonné de telle manière qu’ils pouvaient facilement prétendre, en se mentant à eux-mêmes comme aux autres, qu’ils luttaient contre la barbarie de l’Autre.

Le colonialisme occidental était largement invisible, car il était acté par des sociétés occidentales d’envergure mondiale, exploitantes et destructrices de l’environnement, ainsi que par un réseau de quelque 800 bases militaires américaines à l’étranger, prêtes à intervenir si ce nouvel impérialisme économique « à distance » rencontrait des difficultés.

Intentionnellement ou non, le Hamas a fait tomber le masque de cette supercherie le 7 octobre. Le prétendu fossé idéologique entre les dirigeants occidentaux de droite et une prétendue « gauche » s’est comblé du jour au lendemain. Ils appartiennent tous au même parti de la guerre, ils sont tous devenus des adeptes du parti du génocide. Tous ont défendu le prétendu « droit d’Israël à se défendre » – en réalité, son droit à poursuivre des décennies d’oppression du peuple palestinien – en imposant un blocus sur la nourriture, l’eau et l’électricité aux 2,3 millions d’habitants de Gaza.

Tous approuvent activement l’armement d’Israël pour le massacre et la mutilation de dizaines de milliers de Palestiniens. Tous ont refusé d’imposer un cessez-le-feu et se sont contentés de paroles en l’air.

Tous semblent plus enclins à mettre en pièces le droit international et les institutions qui le soutiennent qu’à l’appliquer à Israël. Tous dénoncent le prétendu antisémitisme des manifestations de masse contre le génocide, au lieu de dénoncer le génocide lui-même.

Le 7 octobre a été un moment décisif. Il a mis en lumière une barbarie si monstrueuse qu’il est difficile de la comprendre. Et nous ne la comprendrons pas tant que nous n’aurons pas regardé en face la vérité, une vérité insoutenable : la source d’une telle dépravation est bien plus proche de nous que nous aurions jamais pu l’imaginer.

13 septembre 2024 – Middle-East Eye – Traduction : Chronique de Palestine – Dominique Muselet

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