Les manifestations – nommées la Grande Marche du Retour et qui devraient se poursuivre jusqu’au 15 mai – ont attiré des dizaines de milliers de Gazaouis, et les violences de l’occupant israélien qui en ont résulté ont fait des dizaines de morts.
La Commission Nationale Supérieure pour la grande marche du retour a déclaré que jusqu’à la Journée de la Nakba, commémorée le 15 mai, tous les mardis seront consacrés aux activités des femmes qui se dérouleront dans cinq camps et seront étendues dans la partie orientale des gouvernorats de Gaza.
Ektemal Hamad, responsable du Comité des femmes de la Commission nationale pour la Grande Marche du Retour, qui comprend des femmes de toutes les factions nationales et islamiques de la bande de Gaza, a déclaré à Al-Monitor : “Parce que les femmes participent avec les hommes à la lutte palestinienne, la commission a créé cinq sous-commissions féminines de cinq à 11 membres chacune. Ces sous-comités sont chargés d’organiser des activités dédiées aux femmes lors de la Grande Marche du Retour dans le nord de la bande de Gaza, dans la ville de Gaza, dans le centre de la bande de Gaza, à Khan Yunis et dans le gouvernorat de Rafah.”
Le 10 avril, le deuxième mardi de la Marche du Retour, le Comité des Femmes de la Commission Nationale Supérieure pour la Marche a organisé près de la clôture de séparation avec Israël [Palestine de 48] la campagne “Rajin Ala Baladi” (en arabe pour “Nous retournerons dans la patrie” ), dans laquelle des femmes ont lâché des ballons portant les noms de villages palestiniens dont elles ont été chassées pendant la Nakba de 1948.
M. Hamad a indiqué que tous les mardis, le Comité des femmes unifie les activités des cinq sous-commissions, mais leur laisse la liberté de coordonner leurs activités pendant le reste de la semaine. Le Comité des femmes visite les cinq sous-comités répartis dans les gouvernorats pour coordonner leurs initiatives, qui comprennent le divertissement ainsi que l’histoire, l’art et même les activités de préparation culinaire traditionnelle.
Dans le camp de Malika, mis en place par la Commission Nationale pour la Grande marche dans l’est de Gaza, à 700 mètres de la barrière de séparation avec Israël, un groupe de femmes s’est assis en cercle et a chanté des chansons folkloriques, pour les Palestiniens qui marchaient vers la clôture de séparation, parmi les pneus qui flambaient et les sirènes des ambulances qui hurlaient.
Alors que le haut responsable du Hamas, Khalil al-Hayya, marchait avec les manifestants, il a vu le groupe de femmes assises en cercle. “Les femmes palestiniennes accompagnent les hommes dans la lutte palestinienne. Elles ont donné un bon exemple lors de la Grande Marche du Retour. Elles ont brandi le drapeau palestinien à la clôture et ont lancé des pierres sur les sionistes pendant les manifestations”, a-t-il déclaré à Al-Monitor.
Les activités des femmes dans les camps sont caractérisées par le pacifisme, et elles se concentrent sur les moyens de soutenir les hommes pendant les manifestations. Dans le même camp, un autre groupe de femmes a préparé la sumaqiya – un plat à base de viande, d’épices arabes, de bettes, de beaucoup sumac, de farine et de pois chiches – et distribué des plats aux manifestants et aux familles du camp.
Un autre groupe de femmes du camp a peint des kushuk (pneus de voiture d’occasion) en rose, alors que les jeunes hommes cultivaient de petites plantes et les décoraient à l’aide des pneus peints.
Dans le camp de Khuzaa, situé à l’est du gouvernorat de Khan Yunis, les femmes étaient également actives.
“Les femmes du camp de Khuzaa jouent un grand rôle dans les marches. Elles brandissent des drapeaux devant la clôture, apportent des kushuk pour que que les hommes mettent le feu, et préparent aussi la nourriture. Elles récitent aussi des poèmes et chantent des chansons folkloriques dans le camp”, a déclaré à Al-Monitor Manal al-Tabash, responsable du sous-comité des femmes.
Elle a déclaré que les femmes du camp de Khuzaa sont plus actives que dans d’autres régions en raison du caractère rural de la région et de sa proximité avec la barrière de séparation.
“Les femmes se sont habituées à l’agriculture, qui est la principale source de revenus dans la région. Les paysans y ont installé leurs maisons malgré le danger qui menace près de la clôture, et ils se sont habitués à la fois à la présence de l’armée israélienne et au tirs”, a-t-elle ajouté.
Le Comité des femmes a honoré la jeune Palestinienne Hind Abu Ola, 16 ans, qui est devenue un symbole de la lutte des femmes dans la région de Khuzaa après avoir secouru quatre jeunes qui étouffaient à cause des bombes lacrymogènes larguées sur les lignes de confrontation, à la clôture de séparation.
“J’ai vu les jeunes hommes s’évanouir. J’ai pris mon sac, qui contenait des oignons et un parfum que j’avais apporté de la maison, et je suis venue à leur aide. Puis les snipers israéliens ont commencé à tirer sur nous”, a raconté Abu Ola.
Dès que les quatre jeunes ont repris leurs esprits, ils ont formé un bouclier humain pour protéger Abu Ola des balles et ont commencé à courir. Leur photo s’est répandue dans toute la région et est devenue un symbole de la participation des femmes aux manifestations.
Le journaliste palestinien Ashraf Umra a documenté cette scène, et la photo est devenue virale sur les réseaux sociaux. “J’étais inquiète des réactions [à la photo] de ma famille et des gens … mais ma famille était si heureuse et fière de cela”, a poursuivi Abu Ola.
Ashraf al-Qadra, porte-parole du ministère de la Santé à Gaza, a déclaré à Al-Monitor que jusqu’au 10 avril, le nombre total de femmes blessées était d’environ 84, contre 2850 hommes et 278 enfants.
Lors de sa participation à la Grande Marche du Retour, Mariam Abu Daqqa, membre du Comité central du Front populaire pour la Libération de la Palestine [FPLP], a déclaré à Al-Monitor: “La participation active des femmes à la Grande marche du retour n’est pas une surprise compte tenu de toutes les initiatives menées par les femmes dans notre histoire. Les femmes saisissent toutes les occasions d’affirmer leur présence dans ces événements et de changer la perception négative du rôle des femmes dans la société palestinienne.”
À l’est du camp de réfugiés de Bureij dans le centre de la bande de Gaza, Ibtisam Nassar, âgée de 52 ans, était assise avec ses filles, ses fils et ses petits-enfants dans la tente que sa famille a érigée sous le nom de “La famille Nassar”.
Elle a déclaré à Al-Monitor: “Nous participons pour augmenter le nombre de manifestatnts et sensibiliser la nouvelle génération sur notre patrimoine et l’histoire des villages abandonnés par nos ancêtres en 1948. Nous leur enseignons que le droit au retour et à la vie dans la patrie est irréversible.”
* Hana Salah est journaliste spécialisée dans le domaine financier et basée à Gaza. Elle a au préalable travaillé pour l’agence de presse Anadolu.
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13 avril 2018 – Al-Monitor – Traduction : Chronique de Palestine