Parmi ces mesures, figurent en bonne place la séparation des prisonniers appartenant à Fatah de ceux de Hamas, la dislocation des blocs factionnels et la fin de l’indépendance qui était jusque-là accordée à ceux-ci. Tout cela, comme prélude à une redistribution aléatoire des prisonniers visant à casser les liens tissés auparavant.
Ce ministre a par ailleurs décidé d’abolir la position de porte-parole des prisonniers, d’interdire la cuisson personnelle des aliments, de faire baisser considérablement le montant maximum permis pour l’achat d’aliments à la cantine et d’interdire pour une période indéfinie les dépôts d’argent liquide en faveur des prisonniers faits par l’Autorité Palestinienne.
D’après le Yediot Ahronot, Erdan a déclaré qu’un dispositif de dissuasion et de contre-terrorisme devait être mis en place aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur des prisons.
Près de 7000 prisonniers palestiniens et parmi eux, des femmes, des enfants et des personnes âgées souffrent dans les prisons israéliennes. Beaucoup d’entre eux ont été condamnés à la prison à vie alors que d’autres ont passé plus de trente ans derrière les barreaux. Le combat des prisonniers palestiniens vise essentiellement à améliorer leurs conditions de détention très dures, conditions qui ne sont que moyens de leur infliger la mort lente, mort physique ou psychologique.
Entassés dans de minuscules espaces, privés d’une alimentation convenable et de soins médicaux dignes de ce nom, ils ne peuvent pas avoir accès aux livres et sont contraints de n’écouter que les informations de la radio israélienne alors que la télévision leur est interdite. Par ailleurs, de nouveaux médicaments sont testés sur eux, une chose qui, combinée aux mauvaises conditions de vie, induit chez beaucoup de prisonniers des maladies chroniques ou des infirmités définitives.
Les visites familiales sont souvent entravées ou tout simplement annulées au hasard et sans préavis. Quand elles sont permises, les autorités pénitentiaires utilisent des barbelés pour maintenir une distance d’au moins un mètre entre les prisonniers et leurs familles.
Une des armes les plus dangereuses utilisées par Israël contre les prisonniers palestiniens est la torture psychologique infligée par le biais de la détention administrative : on est prisonnier mais on ne fait l’objet d’aucune accusation ou de procès. La détention administrative peut être renouvelée indéfiniment et peut durer des années avec privation de visites familiales pendant des mois. Des maladies mentales chroniques en ont souvent résulté.
Des statistiques récentes révèlent que plus d’un million de Palestiniens dans les territoires occupés ont été faits prisonniers par Israël à un moment ou à un autre de leur vie. Ce fait signifie qu’en moyenne, au moins un membre de chaque famille palestinienne a été arrêté et fait prisonnier.
Depuis 1967, début de l’occupation de la Cisjordanie et de Gaza par Israël, 218 prisonniers palestiniens ont été tués dans les prisons israéliennes. Soixante-quinze d’entre ont été victimes de meurtre prémédité, sept ont été tués par balles, soixante-deux sont morts de négligence médicale et soixante-treize ont succombé à la torture.
Les femmes prisonnières, quand elles sont enceintes, doivent accoucher dans des conditions très dures dans un hôpital de fortune aménagé dans un local de la prison sous la supervision d’une infirmière. Il y a eu des cas de femmes attachées au lit avec menottes alors qu’elles accouchaient. Les bébés restent en prison avec leur mère.
Ceci n’est qu’un aperçu des conditions de vie endurées par les prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes, prisons qui ressemblent sur bien des aspects à des camps de concentration. Israël impose des punitions collectives aux prisonniers et, à de nombreuses reprises, les autorités pénitentiaires ont eu recours à des éléments de la police des frontières pour les attaquer à l’aide de balles réelles, de gaz lacrymogènes et autres armes, cela simplement parce que ces prisonniers ont demandé de meilleures conditions
Ce qui est très étrange n’est pas seulement qu’Israël se promeuve comme démocratie mais le fait que le reste du monde le croie. La communauté internationale s’est très peu occupée de la question des prisonniers palestiniens aux mains d’Israël.
Cependant, en dépit de l’oppression et des politiques néo-fascistes d’Israël, les prisonniers palestiniens ont réussi à transformer leurs cellules en lieux d’études, lieux qui contribuent à élever leur conscience politique et à affermir leur loyauté envers leur peuple et leur cause nationale. Leur foi en la justesse de leur cause en est grandie, de même que leur détermination à gagner leur liberté, leur dignité, le droit au retour des réfugiés et l’établissement de l’État souverain de Palestine.
Par ailleurs, il faut noter qu’en prison, les divisions inter-palestiniennes sont totalement mises de côté pour n’admettre que le désir de réaliser l’unité nationale de toutes les organisations palestiniennes.
Il arrive que les prisonniers palestiniens aient recours à l’arme ultime dont ils disposent : la grève de la faim. S’ils étaient autre chose que des Palestiniens – des Juifs par exemple ou des Américains – leurs grèves de la faim susciteraient une forte solidarité dans le monde et leur situation serait discutée dans les forums internationaux y compris le Conseil de Sécurité de l’ONU. Mais comme ils sont Palestiniens, ils sont ignorés parce que c’est la politique des deux poids deux mesures qui s’applique.
La question des prisonniers palestiniens incarcérés par Israël doit devenir une cause pour tout Palestinien dans le monde et pour tous les États arabes et musulmans. Cette cause doit être mise en avant et défendue aux plus hauts niveaux sur l’arène internationale. Nous devons redoubler d’efforts, intensifier notre lutte pour que le sort des Palestiniens emprisonnés par Israël devienne une cause mondiale. C’est la moindre des choses que nous puissions faire pour les prisonniers.
* Le Dr Fayez Rasheed est écrivain et analyste. Il contribue régulièrement à Middle East Monitor.
9 janvier 2019 – Middle East Monitor – Traduction : Chronique de Palestine – Najib Aloui