Par Ramona Wadi
Des Palestiniens, bien sûr s’élèvent contre l’annexion, mais le cadre politique fait défaut, exactement comme l’Autorité palestinienne [AP] et la communauté internationale voulaient qu’il le soit depuis le début.
Parmi les soutiens d’Israël, ceux opposés à l’annexion s’expriment ouvertement pour sauvegarder le projet colonial sioniste. L’ancien ambassadeur états-unien en Israël Martin Indyk, par exemple, a fait remarquer que l’annexion « jette le projet sioniste par-dessus bord ».
La possibilité d’une défaite du président Donald Trump à l’élection présidentielle de novembre, selon M. Indyk, pourrait priver Benjamin Netanyahu du cadre unilatéral qui a accéléré les gains politiques d’Israël depuis décembre 2017, lorsque D. Trump a reconnu Jérusalem comme capitale de l’état sioniste.
Le Général de Brigade israélien Yossi Kuperwasser a, en revanche, contredit les premières hypothèses du gouvernement israélien selon lesquelles les Palestiniens inciteraient à la violence. M. Kuperwasser a déclaré qu’il ne prévoyait pas de « protestations de masse ni de chaos. » De plus, toute réaction politique du monde arabe serait plutôt « une formalité qu’un reflet de la réalité sur le terrain. »
Le Jerusalem Post a cité Jibril Rajoub, représentant de l’AP appelant à une « résistance populaire pacifique ». Au moment où Israël est déterminé à s’approprier ce qui reste de la Palestine, M. Rajoub déclare que l’AP ne fera pas de concessions sur le compromis à deux états, et les frontières de 1967, qui est, en fait, la concession qui a permis à Israël de consolider son projet colonial.
Toute la rhétorique de l’AP a été vite contredite.
Depuis l’annonce d’Israël, les dirigeants palestiniens ont une fois de plus essayé de sauver la face en posant comme entité engagée envers la cause palestinienne et les obligations internationales. Les dernières, toutefois, ont toujours été une priorité, étant donné que tout écart vis-à-vis des paramètres convenus au niveau international hâterait la propre dissolution de l’AP.
Comme l’Autorité joue un rôle dans le processus colonial, son premier engagement consiste à s’abstenir de compromettre sa contribution, et non de promouvoir les revendications légitimes de décolonisations des Palestiniens.
L’annexion est illégale en vertu du droit international. C’est un fait, pas une opinion. La communauté internationale ne fait rien pour empêcher cette violation et l’AP lui apporte son consentement tacite.
Israël est assuré de pouvoir étendre sa capacité d’agir en toute impunité, et par conséquent, de pouvoir manipuler toute preuve de résistance palestinienne pour l’adapter à son récit fictif sur la sécurité. Le peuple palestinien va payer le prix politique de ne pas être réellement représenté politiquement étant donné que l’AP ne fait qu’exprimer ce qui complète le processus de normalisation initié par Israël et promus par la communauté internationale.
Le colonialisme est une pratique violente qui ne peut être combattue par la seule résistance pacifique. Il ne peut y avoir de paix sans décolonisation, notamment lorsque la communauté internationale fait de la « paix » un objectif synonyme de négociations, ce contre quoi l’AP n’a pas exprimé d’opposition.
L’ambiguïté convient à la politique de l’AP ; quel meilleur moyen de s’accrocher à son pouvoir emprunté que de se conformer à ce que l’on attend d’elle en termes de capitulation devant Israël ?
A seulement une semaine du début attendu du processus d’annexion de Netanyahu, Israël n’a guère besoin d’exercer de pressions pour obtenir un soutien. Il était clair lorsque l’annonce a été faite que la communauté internationale ne s’écarterait pas de ses habituelles déclarations de pure forme.
L’AP, pendant ce temps, allumait une lueur de possibilité en termes de différente stratégie politique en laquelle très peu de Palestiniens étaient prêts à croire. Le bref laps de temps écoulé depuis que le chef de l’AP Mahmoud Abbas a annoncé en grande pompe la rupture des liens avec Israël a donné raison aux sceptiques.
L’AP doit maintenant être dénoncée pour son rôle dans la normalisation de l’annexion et l’augmentation presque inévitable du nombre de Palestiniens déplacés à l’intérieur du pays.
Auteur : Ramona Wadi
* Ramona Wadi est rédactrice au Middle East Monitor. Écrivain, chercheuse et journaliste indépendante, elle est également critique. Ses écrits couvrent une série de thèmes en relation avec la Palestine, le Chili et l'Amérique latine. Elle contribue régulièrement au PalestineChronicle.com. Consultez son site internet. Son compte Twitter.
25 juin 2020 – The Palestine Chronicle – Traduction: Chronique de Palestine – MJB