Par Zarefah Baroud
Harris est la candidate du Parti démocrate à la vice-présidence lors de l’élection de novembre.
“Je suis bien sûr déçu par les positions de Harris-Biden sur Israël”, a répondu Falk. “J’aurais espéré quelque chose de plus proche de ce que disait Bernie Sanders, afin de rapprocher les politiques de ce que je pense être le souhait d’une majorité d’Américains. Encore une fois, cela illustre cette disparité entre la volonté du peuple et la volonté des élites dirigeantes… Je ne pense pas que nous puissions être très optimistes. Peut-être sur la question de l’annexion… mais je ne suis pas très optimiste quant aux changements qui interviendront”.
Une fois de plus, la seule option que ces élections présidentielles offre aux électeurs américains est de choisir entre le moindre de deux maux.
Il est en effet particulièrement difficile de trouver des différences entre les deux candidats, le président en exercice Donald Trump et Joe Biden, notamment en ce qui concerne leur attitude vis-à-vis de l’occupation israélienne et de la responsabilité américaine à cet égard, en tant que principal soutien et fournisseur des forces de défense israéliennes.
Notamment, le “progressiste” Biden n’a pas un discours plus élaboré que son adversaire conservateur. En juillet, il a ordonné le retrait de toute référence à l’ “occupation israélienne” de son programme de campagne, ce qui contredit la reconnaissance internationale de la présence d’Israël dans les territoires palestiniens comme une occupation totalement illégale.
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Les progressistes américains se sont organisés contre Trump pour ses fréquentes violations du droit constitutionnel et son manque de normes en matière de droits de l’homme, tant au niveau national qu’international. Mais beaucoup n’ont pas compris que Biden s’est déjà engagé à faire des promesses de campagne qui garantissent non seulement un manque de respect du droit international, mais aussi une forte disposition à violer le droit américain.
Selon Tony Blinken, le premier conseiller de Joe Biden, “Il [Biden] ne liera pas l’assistance militaire aux décisions politiques que prend Israël. Point final. Il l’a dit, il s’y est engagé”.
Bien sûr, la colistière de Biden, Harris, a réaffirmé les sentiments exprimés par Blinken. Elle a déclaré lors d’un meeting en ligne le 26 août que “Joe [Biden] a clairement fait savoir qu’il ne liera pas l’assistance à la sécurité aux décisions politiques prises par Israël, et je ne pourrais pas être plus d’accord”.
Ces différentes déclarations auraient dû en frapper plus d’un comme étant plus problématiques qu’elles n’ont semblé de prime abord. En fait, Biden et Harris s’engagent à enfreindre la loi américaine pour Israël. En 1998, les premières lois dites “Leahy” ont été définies par le sénateur du Vermont Patrick Leahy.
Le premier élément de ces lois est celui sur l’aide à l’étranger (FAA) de 1961, à la section 620M, et le second est le projet de loi de crédits du ministère de la défense/la loi de crédits consolidés de 2014. Pour l’essentiel, ces lois stipulent que l’assistance militaire étrangère doit être suspendue ou interrompue s’il existe des informations dignes de foi selon lesquelles l’unité de force de sécurité étrangère bénéficiaire a commis une violation flagrante des droits de l’homme.
Une “violation flagrante des droits de l’homme” est définie par la FAA comme suit : “Des traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants ; la détention prolongée sans inculpation ni jugement ; la disparition de personnes par enlèvement et détention clandestine de ces personnes ; et d’autres dénis flagrants du droit à la vie, à la liberté ou à la sécurité de la personne”.
Depuis 1946, le gouvernement américain a fourni des milliards d’aide militaire à Israël, ainsi que des milliards de garanties de prêts pour aider Israël à développer son large avantage militaire qu’il utilise presque exclusivement pour tourmenter et massacrer les Palestiniens dans la bande de Gaza et en Cisjordanie.
Les infractions spécifiques incluent les prisons israéliennes qui détiennent environ 700 enfants palestiniens, dont plus de 75 % déclarent avoir été torturés et maltraités physiquement ; l’utilisation de phosphore blanc sur des cibles civiles à Gaza ; et les balles qui ont assassiné et handicapé des milliers de manifestants palestiniens pacifiques.
En théorie, une seule violation suffit pour que l’aide militaire soit retirée à l’unité qui a commis la violation – dans ce cas Israël – conformément aux lois Leahy. Les organisations de défense des droits de l’homme les plus réputées ont largement rendu compte des violations commises par Israël et en ont consigné les détails.
Cependant, les aides à Israël ont été augmentées chaque année, avec l’aide de Joe Biden. Une seule et unique enquête connue du public a été conduite contre Israël, en 2006, même si l’auteur de la loi, le sénateur Leahy, a demandé que le Département d’État enquête sur les violations des droits de l’homme israéliens en 2016.
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En 2017, puis en 2019, la représentante du Minnesota, Betty McCollum, a rédigé un projet de loi, désormais classé sous la cote H.R. 2407 : Loi sur la promotion des droits de l’homme pour les enfants palestiniens vivant sous l’occupation militaire israélienne.
Le projet se réfère aux lois Leahy pour plaider en faveur de l’inclusion dans la législation américaine de la question des jeunes Palestiniens confrontés aux tribunaux militaires israéliens, et donc de révoquer l’aide des unités militaires et policières israéliennes qui se livrent à de telles pratiques.
En août de cette année, la représentante McCollum a également publié le H.R. 8050 : Israeli Annexation Non-Recognition Act, qui s’engage révoquer l’aide à Israël qui pourrait être utilisée pour aider directement ou indirectement à l’annexion de la terre palestinienne en Cisjordanie.
Cette loi a recueilli de plus en plus de soutien de la part de représentants de tout le pays, notamment Alexandria Ocasio Cortez (NY-14), Rashida Tlaib (MI-13), et Ilhan Omar (MN-05), réservant une place à la Palestine dans la politique américaine. Malheureusement, le débat entre les candidats aux élections reste sous-informé, trivial et dangereux.
Peu importe qui l’emportera en novembre, les deux candidats à la présidence ont sans aucun doute un engagement “inébranlable” envers le régime d’apartheid qu’est Israël et doivent être tenus responsables selon la loi américaine, au minimum. Il ne s’agit pas de “souplesse” politique, mais de franche complicité dans des crimes contre l’humanité (voir des crimes de guerre), et les électeurs américains sont tout à fait dans leur droit d’exiger que les conditions [d’attribution de l’aide à Israël] soient renforcées.
Auteur : Zarefah Baroud
* Zarefah Baroud est titulaire d'un master en études politiques de l'Université de Washington, où elle a effectué des recherches sur les programmes d'aide américains à l'armée israélienne. Zarefah Baroud a publié divers articles sur CounterPunch, Common Dreams, Socialist Worker et d'autres, et elle travaille en tant qu'associée aux médias numériques pour l'organisation American Muslims for Palestine.Zarefah est doctorante au Centre européen d'études palestiniennes de l'Université d'Exeter. Son compte Twitter.
30 septembre 2020 – Middle East Monitor – Traduction : Chronique de Palestine – Lotfallah