Par Addameer
France : une plainte auprès de la justice a été déposée contre la société israélienne NSO pour intrusion illégale dans le téléphone du défenseur des droits humains franco-palestinien, Salah Hamouri.
La Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), la Ligue des droits de l’homme (LDH) et Salah Hammouri ont déposé une plainte conjointe en France visant la société israélienne de cyber-renseignement NSO Group, pour avoir infiltré illégalement le téléphone du défenseur des droits de l’homme, le franoc-palestinien Salah Hammouri.
La violation a débuté dans le Territoire palestinien occupé et s’est poursuivie sur le sol français, ce qui constitue une violation du droit au respect de la vie privée en droit français.
En octobre 2021, Salah Hammouri a contacté Front Line Defenders pour lancer un examen de son téléphone après avoir appris l’infiltration des téléphones d’autres défenseurs des droits humains palestiniens. Front Line a conclu son enquête en novembre 2021, et The Citizen Lab et Amnesty International ont confirmé ses conclusions.
L’enquête a révélé que les téléphones de M. Hamouri et d’autres défenseurs palestiniens des droits humains avaient été piratés à l’aide de Pegasus, un logiciel espion fabriqué par le groupe NSO.
L’enquête a confirmé que le téléphone de M. Hamouri a été infiltré en avril 2021. En décembre 2021, M. Hamouri a pris contact avec la FIDH pour le représenter dans le dépôt d’une plainte légale contre le groupe NSO, qui utilise illégalement ce logiciel espion pour pirater et infiltrer son téléphone, et à travers elle, toute sa vie professionnelle et privée, le privant ainsi notamment de son droit à la vie privée.
« Nous demandons maintenant au parquet de Paris d’ouvrir une enquête préliminaire sur les violations dénoncées dans notre plainte », ont déclaré Emmanuel Daoud, Clémence Bectarte et Patrick Baudouin, qui ont déposé plainte aujourd’hui au nom de la FIDH, de la LDH et de Salah Hamouri.
M. Hamouri fait l’objet de persécutions de la part des Israéliens depuis l’âge de 15 ans lorsqu’il a été blessé par balle en 2000.
Il a été arrêté pour la première fois à l’âge de 16 ans et fait depuis face à un harcèlement continu de la part des autorités israéliennes pour son militantisme en faveur des droits humains, dont six peines d’emprisonnement et arrestations arbitraires, plusieurs interdictions de voyager, des cautions et amendes exorbitantes, des assignations à résidence, la séparation d’avec sa famille et la révocation de la résidence.
Il fait actuellement face à une menace imminente d’expulsion et plus récemment, le 7 mars 2022, il a été soumis à une autre détention administrative illégale pour une période de trois mois sujette à des renouvellements indéfinis conformément aux règlements d’urgence appliqués par le commandant militaire israélien en Cisjordanie.
« Je poursuis ma lutte parce que je veux que tous les Palestiniens vivent dans la liberté et la dignité, et je sais que cela ne se fera pas sans combat, sans sacrifice de la part de ceux qui veulent prendre position », a déclaré Salah Hamouri.
Le 18 octobre 2021, le ministre israélien de l’Intérieur a rendu une décision de révoquer la carte de séjour permanent de M. Hamouri à Jérusalem. La décision est fondée sur le prétendu « manquement à l’allégeance à l’État d’Israël » de M. Hamouri et sur des allégations vaguement formulées et mal définies d’ « activités terroristes » et/ou d’affiliation à des « entités terroristes », relatives à des « informations secrètes ».
Si cette mesure était mise en œuvre, cela signifierait que M. Hamouri, qui est né à Jérusalem en 1985 et y a vécu toute sa vie, serait définitivement expulsé de son pays d’origine et centre de vie sans pouvoir y retourner.
Cela créera également un précédent juridique extrêmement dangereux qui sera systématiquement utilisé par les autorités israéliennes pour révoquer les résidences des Palestiniens de Jérusalem dans leur tentative de vider Jérusalem de sa population palestinienne.
« Il faut cesser de tirer parti des réalisations de l’humanité dans le domaine des technologies pour commettre des violations des droits de l’homme et des mesures de responsabilisation sont nécessaires de toute urgence. Ne pas traduire en justice NSO et ses filiales encourage la poursuite de la persécution des défenseurs des droits humains », a déclaré Shawan Jabarin, vice-président de la FIDH.
La FIDH et la LDH condamnent ces mesures abusives et arbitraires. Les attaques contre Salah Hamouri semblent viser uniquement à le punir pour ses activités légitimes en faveur des droits humains, notamment en faveur des prisonniers politiques palestiniens.
Ces attaques font partie d’une campagne plus large du gouvernement israélien visant à délégitimer les groupes de défense des droits de l’homme et les défenseurs des droits de l’homme palestiniens et israéliens, et à faire pression activement pour réduire leurs sources de financement.
Le groupe NSO a fait l’objet de plusieurs poursuites judiciaires à travers le monde pour son utilisation illégale de technologies en violation des lois et principes des droits de l’homme.
Plusieurs ONG, dont la FIDH, ont exhorté l’Union européenne à inscrire le groupe NSO sur sa liste mondiale de sanctions et à prendre toutes les mesures appropriées pour interdire la vente, le transfert, l’exportation, l’importation et l’utilisation des technologies du groupe NSO jusqu’à ce que des garanties adéquates en matière de droits humains soient en place.
Il est essentiel que lorsque des entreprises violent les droits de l’homme, des sanctions et des mesures adéquates soient adoptées et que les victimes aient le droit de d’obtenir réparation de toute violation.
Comme la FIDH l’a préconisé à plusieurs reprises, toute réglementation en ce sens au niveau européen doit s’adresser à toutes les entreprises, y compris les entreprises opérant dans le secteur des technologies.
Le dépôt de la plainte devant la justice est accueilli et salué par les principales organisations de défense des droits de l’homme et les principaux enquêteurs sur le groupe NSO, notamment :
- Access Now
- Amnesty International
- Front Line Defenders
- Forensic Architecture
- Center for Constitutional Rights
- Addameer Prisoner Support and Human Rights Association
- Al Haq Organization – Law in the Service of Mankind
- The Palestinian Institute for Public Diplomacy
- 7amleh – Arab Center for the Advancement of Social Media
Auteur : Addameer
* ADDAMEER (mot arabe signifiant la « conscience ») Prisoner Support and Human Rights Association, est une institution civile non gouvernementale palestinienne qui œuvre en faveur des prisonniers politiques palestiniens détenus dans les prisons israéliennes et palestiniennes. Créé en 1991 par un groupe de militants motivés par la question des droits de l'homme, le centre offre une aide juridique gratuite aux prisonniers politiques, défend leurs droits au niveau national et international, et s'efforce de mettre fin à la torture et aux autres violations des droits des prisonniers par le biais d'une surveillance, de procédures juridiques et de campagnes de solidarité.Le compte twitter.
5 avril 2022 – Addameer – Traduction : Chronique de Palestine