Par Ramona Wadi
Sur les 161 témoignages sous serment recueillis par l’organisation auprès des mineurs palestiniens détenus, 25 ont affirmé avoir été maintenus à l’isolement 16 jours en moyenne, la plus longue période étant de 29 jours. Ils se sont vus également refuser l’assistance d’un avocat et la visite de membres de leur famille avant l’interrogatoire. DCIP a également constaté que 62,7% avaient été victimes de violences physiques et que 52,8% avaient été menacés et intimidés verbalement.
Israël n’utilise pas l’isolement carcéral seulement pour garantir la sécurité des enfants ou par mesure disciplinaire, de fait, le pays a institutionnalisé cette pratique en la justifiant par la rhétorique sécuritaire habituelle. Les forces israéliennes sont donc autorisées à utiliser cette méthode de torture pour obtenir des aveux des enfants pendant les séances d’interrogatoire, ce qui montre que les enfants palestiniens sont soumis aux mêmes tactiques d’interrogatoires que celles utilisées contre les détenus palestiniens adultes.
Selon Ayed Abu Eqtaish, le directeur du Programme de reddition de comptes de DCIP, « les autorités israéliennes utilisent apparemment le maintien à l’isolement pour détruire la résistance psychologique de l’enfant dont la vulnérabilité augmente encore lorsque l’accès au conseil juridique lui est refusé ».
Le fait qu’Israël fasse subir à des mineurs les mêmes violations de droits qu’à des détenus adultes prouve à l’envie que ce pays méprise les normes internationales telles que décrites dans la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant. En outre, le manque volontaire de distinction entre un mineur et un adulte permet à Israël de s’autoriser à ne pas rendre des comptes sur ces pratiques, comme sur toute la violence qui bétonne l’entité coloniale.
Plusieurs rapports et recommandations ont été publiés au fil des années. Cependant, le résultat a toujours été le même : le cri universel d’indignation initial a été étouffé sous l’habituelle rhétorique condescendante d’Israël, et les mineurs palestiniens, toujours privés de leurs droits, ont été oubliés jusqu’au prochain rapport international.
Le fait que ces rapports soient rarement suivis d’effets concrets met en lumière les failles énormes qui existent en matière de protection des droits. La sensibilité des gens est émoussée du fait de la banalisation croissante de la pratique de la torture et des privations de toutes sortes, et, pour les mêmes raisons, la volonté des organisations de mener ces inestimables recherches a diminué. Le fait qu’Israël ne soit jamais contraint de respecter les normes internationales a créé une situation dans laquelle la législation relative aux droits de l’homme trône sur son piédestal sans avoir d’autre effet que de générer des paroles creuses.
Quand ces mineurs palestiniens atteindront l’âge adulte, ils auront vécu une expérience qui les prédisposera à de futures incarcérations par Israël. La parution de ce rapport devrait engendrer une réflexion plus approfondie sur la grève générale de la faim et sur la manière dont le brutal système carcéral israélien permet d’asservir les Palestiniens à tous les âges de leur vie.
Il faut profiter de la mobilisation qui suscite des grèves de la faim de solidarité à l’extérieur des prisons pour attirer l’attention sur le sort des mineurs palestiniens et les abus qu’ils subissent. En effet, si la seule raison pour laquelle Israël fait grand usage de !’isolement carcéral des mineurs palestiniens est la répression, alors cette répression est clairement devenue un des piliers de la survie d’Israël.
Auteur : Ramona Wadi
* Ramona Wadi est rédactrice au Middle East Monitor. Écrivain, chercheuse et journaliste indépendante, elle est également critique. Ses écrits couvrent une série de thèmes en relation avec la Palestine, le Chili et l'Amérique latine. Elle contribue régulièrement au PalestineChronicle.com. Consultez son site internet. Son compte Twitter.
20 avril 2017 – Middle East Monitor – Traduction : Chronique de Palestine – Dominique Muselet