Par Nadim Bawalsa
Le droit des Palestiniens en exil à la nationalité palestinienne est protégé par le droit international, indépendamment des politiques racistes d’apartheid israéliennes. Comment les Palestiniens et leurs dirigeants de la diaspora peuvent-ils faire valoir ce droit par différents moyens juridiques et politiques ? Nadim Bawalsa, rédacteur en chef d’Al-Shabaka, propose des recommandations sur la manière de garantir aux Palestiniens exilés leurs droits à et en Palestine, où qu’ils se trouvent.
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Aperçu
La nationalité et la citoyenneté sont des concepts différents en droit international. Alors que la citoyenneté est un contrat formel dans lequel les individus s’engagent avec le gouvernement d’un État, la nationalité est considérée comme innée aux individus, et est protégée en dehors de la compétence de l’État.
Cependant, depuis sa création en 1948, le régime d’apartheid israélien a manipulé stratégiquement les deux concepts afin de priver les Palestiniens exilés – ainsi que les autres communautés palestiniennes opprimées – de leurs droits sur la Palestine, où qu’ils se trouvent.
Aujourd’hui, plus de sept millions de Palestiniens exilés ont le droit légal d’être considérés comme des ressortissants de Palestine par naissance et/ou par le sang, indépendamment des lois racistes d’Israël sur la nationalité et la citoyenneté.
Ce chiffre comprend cinq millions de réfugiés enregistrés auprès de l’UNRWA, ainsi que plusieurs millions d’autres ressortissants palestiniens ayant un statut secondaire de citoyenneté ou de résidence dans d’autres pays.
En d’autres termes, si les Palestiniens en exil et leurs représentants politiques imposent ce droit internationalement protégé par des voies légales efficaces, ils obtiendront le statut légal de ressortissants palestiniens en exil, remettant ainsi en cause les politiques d’apartheid d’Israël et posant les bases d’une future législation sur la nationalité et la citoyenneté palestiniennes. [1]
Ce document de politique générale replace la crise politique et juridique actuelle de la nationalité des Palestiniens exilés dans le contexte du droit international. Il souligne les différences fondamentales entre la citoyenneté et la nationalité, et montre comment les deux ont été utilisées de manière interchangeable par les autorités coloniales et colonisatrices britanniques, puis israéliennes, pour continuer à refuser la nationalité et la citoyenneté aux Palestiniens à travers le monde.
Dans ce but, il ne se concentre pas sur les Palestiniens de la Palestine colonisée dont les droits à la citoyenneté et à la nationalité sont dictés par le régime israélien dans les territoires de 1948, et par l’Autorité palestinienne (AP) et le régime israélien en Cisjordanie et à Gaza.
Le mémoire propose enfin des recommandations sur ce que les Palestiniens de la diaspora et leurs représentants au sein de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) devraient engager comme effort pour contester les politiques d’apartheid colonial d’Israël et garantir aux Palestiniens en exil leur droit d’être considérés comme des ressortissants palestiniens ayant des droits sur et en Palestine. [2]
Nationalité, citoyenneté et droit international
Alors que le droit au retour des réfugiés palestiniens est inscrit dans les résolutions de l’ONU, le droit de tous les Palestiniens exilés, dont les réfugiés et ceux qui ont été naturalisés citoyens d’autres États, d’être considérés comme des ressortissants de la Palestine colonisée à travers leur diaspora – et donc d’exiger une représentation légale et des droits en tant que Palestiniens de l’étranger – doit être appliqué.
Pour en comprendre les raisons, nous devons saisir les différences fondamentales entre la nationalité et la citoyenneté, deux concepts que le mandat britannique et le régime sioniste ont constamment et stratégiquement exploités de manière interchangeable pour occulter les droits de nationalité et empêcher les Palestiniens exilés de revendiquer la Palestine.
Définir la différence est donc crucial et doit constituer la base de la réponse palestinienne à ces politiques israéliennes d’apartheid.
La citoyenneté, qui est conférée aux individus en fonction de leur lieu de naissance, de la nationalité de leurs parents ou de la naturalisation par la résidence, est déterminée par les gouvernements afin d’accorder des droits et des responsabilités en tant que membres de l’État-nation.
Ainsi, les personnes qui demandent la citoyenneté d’un État doivent se soumettre à un processus de vérification rigoureux et doivent satisfaire aux conditions d’admissibilité de cet État. Les États peuvent également contester les droits des individus à la citoyenneté, les privant ainsi de la citoyenneté sous certaines conditions.
Les États ne peuvent toutefois pas dénationaliser un ressortissant.
En droit international, la nationalité est définie de manière générale comme le lien entre un individu et un territoire. Ce lien, appelé « lien authentique » par la Cour internationale de justice (CIJ) depuis 1955, peut être déterminé par la lignée du sang (jus sanguinis), le lieu de naissance (jus soli) ou la résidence de longue durée (jus domicile).
La nationalité est innée, inchangeable et protégée : l’article 15 de la Déclaration universelle des droits de l’homme stipule que « tout individu a droit à une nationalité. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité ni se voir refuser le droit de changer de nationalité. »
En fait, ce droit est tellement universel que plusieurs États étendent même la possibilité de demander la citoyenneté par le biais du jus sanguinis aux ressortissants non-citoyens résidant partout dans le monde.
Le droit historique des Palestiniens à la nationalité palestinienne
Le droit des Palestiniens d’appartenir à la Palestine en tant que ressortissants de n’importe où dans le monde est reconnu depuis la ratification du traité de Lausanne de 1923, le 6 août 1924. Si le traité est le premier document juridique à promulguer la nationalité palestinienne au niveau mondial, la loi ottomane de 1869 sur la nationalité a été la première à conférer légalement la nationalité aux résidents de la Palestine jus sanguinis, jus soli, et jus domicile.
Par conséquent, lorsque les autorités britanniques ont assiégé Jérusalem en décembre 1917, les résidents de Palestine étaient considérés comme des ressortissants palestiniens ottomans, et ils le sont restés en attendant que les forces alliées décident de ce qu’elles allaient faire de l’empire mis en pièces.
Ce statut s’applique également aux dizaines de milliers de ressortissants palestiniens ottomans qui ont émigré de la Palestine vers les Amériques pour des raisons économiques et politiques depuis le XIXe siècle.
Mais le 24 juillet 1923, les forces alliées et le gouvernement de la nouvelle république turque signaient le traité de Lausanne, délimitant officiellement les frontières de la nouvelle république. En échange de la reconnaissance de la souveraineté turque par les Alliés, la Turquie renonçait alors à toutes ses revendications impériales sur ses anciens territoires, y compris les provinces arabes, désormais sous mandat colonial européen.
Par conséquent, les anciens sujets arabes de l’Empire ottoman ont alors cessé d’être des ressortissants ottomans, y compris ceux résidant à l’étranger. Bien que l’article 34 du traité de Lausanne prévoie des dispositions à cet égard, permettant aux individus de déclarer la nationalité « du territoire dont ils sont originaires », la Grande-Bretagne contrevenait au traité, car elle avait promis à la Fédération sioniste d’établir un « foyer national » juif en Palestine dans la déclaration Balfour de 1917.
Par conséquent, cette déclaration devait assurer le flux régulier de Juifs vers la Palestine et leur naturalisation par la résidence en tant que sujets palestiniens du mandat britannique pour la Palestine.
Les autorités britanniques ont donc adopté la toute première ordonnance sur la citoyenneté palestinienne afin de délivrer des documents de citoyenneté palestinienne aux colons juifs.
Certes, cela était conforme à l’article 7 du mandat pour la Palestine, qui stipulait que le gouvernement de Palestine devait promulguer une loi sur la nationalité comportant « des dispositions conçues de manière à faciliter l’acquisition de la citoyenneté palestinienne par les Juifs qui prennent leur résidence permanente en Palestine ».
En juillet 1925, la Grande-Bretagne a promulgué l’ordonnance qui réglementait la citoyenneté palestinienne pendant le mandat. Alors que l’ordonnance exigeait des autorités britanniques qu’elles étendent la citoyenneté palestinienne à tous les demandeurs remplissant les conditions requises, elles ont au contraire donné la priorité à l’octroi de ce statut à des dizaines de milliers de colons juifs arrivant en Palestine (par le biais du jus domicile) au détriment de dizaines de milliers de migrants palestiniens (qui avaient droit à la citoyenneté par le biais du jus sanguinis et du jus soli).
Pour justifier cette pratique, les autorités britanniques invoquaient régulièrement la « capacité d’absorption » économique limitée de la Palestine, ainsi que le fait que les migrants n’apportaient pas la preuve de leur intention de résider de façon permanente en Palestine, de leur absence de Palestine depuis avant 1920 ou, tout simplement, de leur « indésirabilité manifeste ».
Le 8 mars 1937, deux décennies après le début de l’occupation britannique de la Palestine, les autorités coloniales en Palestine ont indiqué que plus de 28 000 Juifs avaient reçu des documents de citoyenneté palestinienne entre 1931 et 1936, et que sur un total de 4941 documents de citoyenneté accordés en 1936, 4847 concernaient des Juifs.
En revanche, environ 9000 demandes de citoyenneté avaient été soumises par des Palestiniens résidant en Amérique latine en 1937 ; sur ce nombre, pas plus d’une centaine ont été acceptées.
Les migrants palestiniens à travers les Amériques, qui étaient environ 40 000 en 1936, sont devenus de fait des ressortissants palestiniens apatrides portant des documents ottomans obsolètes.
Au cours de ses 30 années d’occupation de la Palestine, la Grande-Bretagne a constamment manipulé la nationalité en la niant par le biais de la citoyenneté. Et bien que la Grande-Bretagne ait violé le traité de Lausanne en agissant ainsi, la Société des Nations a laissé l’administration de la Palestine entièrement à la discrétion de la Couronne britannique.
La gouvernance de la Palestine se situait de fait en dehors de tout droit international.
La nationalité palestinienne sous le régime israélien
La violation permanente du droit international par le régime israélien depuis 1948, qui refuse à des millions de Palestiniens dans le monde leur droit à la nationalité palestinienne, trouve ses racines dans une pratique similaire qui l’a précédé de trois décennies.
En effet, dès sa création, le nouveau régime a rapidement refusé aux 750 000 Palestiniens exilés en 1948 le droit à la nationalité palestinienne, et il a réitéré après l’expulsion de 300 000 Palestiniens de Palestine en 1967.
Comme son prédécesseur, le régime sioniste a délibérément manipulé la citoyenneté et la nationalité afin d’atteindre son objectif démographique de création d’un État juif.
En d’autres termes, comme les autorités du mandat britannique, le régime israélien s’est continuellement présenté comme la seule autorité ayant le droit de conférer à la fois la citoyenneté et la nationalité à tous les sujets ayant des revendications légales d’appartenance à la Palestine colonisée.
Ces actes illégaux sont stratégiquement occultés par une série de lois, dont les plus significatives sont la Loi du retour de 1950, la Loi sur la nationalité de 1952 et la Loi sur l’État-nation juif de 2018.
En 1950, le nouveau régime israélien a promulgué la Loi du retour, qui offrait à tous les Juifs du monde le droit d’immigrer dans le nouvel État juif. Cette loi a été suivie par la loi sur la nationalité de 1952, qui a confirmé la nationalité des Juifs du monde entier en vertu de la Loi du retour.
Puis en 1952, le régime israélien a effectivement promulgué la Nationalité juive au niveau mondial.
Ainsi, si Israël peut disposer d’un régime de citoyenneté permettant aux non-Juifs d’acquérir la citoyenneté israélienne par la naissance dans les territoires de 1948, il reste un État pour les ressortissants juifs avant tout.
Cela a été réaffirmé dans la loi fondamentale de 2018 sur l’État-nation juif, qui stipule que le droit à l’autodétermination nationale est « propre au peuple juif ».
Par conséquent, le régime d’apartheid israélien a fait en sorte que les Palestiniens qui ont acquis la citoyenneté israélienne ne puissent jamais être incorporés en tant que ressortissants de l’État, ce qui facilite leur dénaturalisation.
En outre, afin de prévenir toute arrivée de l’extérieur de Palestiniens cherchant à obtenir des droits de citoyenneté en tant qu’anciens sujets du mandat britannique, qui avait délivré des passeports palestiniens britanniques, la loi de 1952 a abrogé rétroactivement toute attribution de citoyenneté antérieure à la création de l’État israélien en mai 1948.
Ainsi, le régime israélien a effectivement réinstauré les lois sur la citoyenneté dès sa création, rendant obsolètes tous les documents existants relatifs à la nationalité et à la citoyenneté palestiniennes. Cette pratique est illégale au regard du droit international, qui exige que tout « État successeur » confère la nationalité d’un territoire donné aux peuples qui lui sont liés.
Le régime israélien a également veillé à ce qu’aucun Palestinien expulsé en 1948 ne puisse prétendre à la nationalité palestinienne ou à la citoyenneté israélienne, puisqu’il n’est ni juif ni naturalisable à distance.
Selon la loi de 1952, pour avoir droit à la citoyenneté israélienne par le biais de la résidence, les Palestiniens doivent avoir été des habitants des territoires de 1948 au 1er mars 1952, et ils doivent être restés des habitants depuis le jour de la création de l’État jusqu’au jour où la loi sur la nationalité a été adoptée. Aucun des Palestiniens expulsés en 1948 ne remplit les conditions requises par cette disposition.
Pour la défense du droit à la nationalité palestinienne
La population mondiale des ressortissants palestiniens qui, depuis le Traité de Lausanne, ont un « lien authentique » légalement reconnu avec le territoire de la Palestine colonisée et, par conséquent, lui appartiennent en tant que ressortissants, peut revendiquer ces droits à travers la diaspora par différents canaux juridiques et politiques.
En d’autres termes, leurs droits de naissance et de sang à la nationalité palestinienne restent intacts, et une voie juridique et politique pour défier le régime israélien est toujours possible. En effet, leurs prédécesseurs qui se sont vus refuser la nationalité palestinienne par la citoyenneté pendant l’occupation britannique de la Palestine en étaient conscients.
Tout au long du mandat britannique, les Palestiniens de Palestine et de l’étranger ont protesté à plusieurs reprises contre les politiques britanniques par le biais de pétitions soumises au gouvernement de Palestine et à la Société des Nations.
Le 23 février 1927, par exemple, un groupe de Palestiniens de Monterrey, au Mexique, a rédigé une pétition de six pages adressée au haut-commissaire pour la Palestine, Herbert Plumer. Dans ce document, rédigé par des membres du Centro Social Palestino et signé par plus de 300 Palestiniens résidant au Mexique, les pétitionnaires demandaient à la Grande-Bretagne de reconnaître leurs droits à la nationalité palestinienne. Ils menaçaient alors de recourir à la Société des Nations, l’arbitre du droit international :
Nous sommes nés dans ce territoire ; nous avons toujours souhaité être Palestiniens ; et nous sommes sûrs que si, en dernier recours, il devient nécessaire de porter notre pétition devant la Société des Nations, cet auguste organisme nous accordera le droit de nous considérer comme des ressortissants de la Palestine.
Lorsqu’il s’agissait de la nationalité palestinienne, les pétitionnaires palestiniens faisaient régulièrement référence à l’article 34 du Traité de Lausanne, rappelant aux autorités britanniques leur obligation de respecter le droit international – ou, du moins, les traités dont ils étaient signataires.
En juin 1927, par exemple, une délégation de nationalistes palestiniens de Bethléem et de Beit Jala, qui composait le Comité pour la défense des droits des Palestiniens résidant dans des pays étrangers, a présenté une pétition au gouvernement de Palestine à Jérusalem. Ils ont replacé les droits des migrants palestiniens à la nationalité palestinienne dans l’article 34 du traité :
La conclusion logique à déduire des stipulations de l’article est que les émigrants de cette terre, qui appartiennent à la majorité, jouissent du droit à la nationalité palestinienne. Nous n’imaginons pas un instant que le gouvernement britannique veuille les priver de ce droit.
Les requérants palestiniens, en Palestine et à l’étranger, ont créé un précédent en exigeant que justice soit rendue sur la base de traités juridiques internationaux, et le régime du mandat britannique n’a cessé de les ignorer en toute impunité pendant toute la durée de son occupation de la Palestine.
S’emparer du statut d’État et du traité de Lausanne
Jusqu’en 2012, lorsque l’ONU a reconnu la Palestine comme un État souverain de jure, les Palestiniens en exil disposaient de ressources limitées pour revendiquer la nationalité palestinienne.
Mais avec la création de l’État, l’OLP a finalement rédigé en 2012 une loi sur la citoyenneté reconnaissant l’attribution de la nationalité palestinienne sur la base du traité de Lausanne, y compris pour les Palestiniens en exil : « Les citoyens palestiniens sont les personnes qui ont acquis ou avaient le droit d’acquérir la nationalité palestinienne à partir du 6 août 1924. »
Cependant, le Conseil législatif palestinien (CLP) n’a jamais examiné la loi en raison des complexités juridiques qu’elle impliquait ; à savoir, identifier comment la citoyenneté palestinienne serait conférée à une population fragmentée de réfugiés à travers le monde, et de ressortissants sous occupation en Cisjordanie et à Gaza qui ont des statuts de résidence et des droits de circulation et d’accès variables.
En outre, conformément aux accords d’Oslo, l’AP régit les statuts des Palestiniens en Cisjordanie et à Gaza, et toutes les attributions de résidence doivent être approuvées par le régime israélien d’occupation.
En tant que représentant politique et légal du peuple palestinien fragmenté, et en tant qu’organisme qui a reconnu l’importance de la nationalité, l’OLP doit agir en tant que garant des droits des Palestiniens exilés à la nationalité palestinienne. Mais avant de pouvoir revendiquer la nationalité palestinienne par des voies légales, l’OLP doit se mobiliser avec le peuple palestinien pour mettre en place un registre de population, en commençant par les réfugiés palestiniens enregistrés auprès de l’UNRWA.
Il faut noter que le projet de 2006 de Karma Nabulsi a marqué une étape importante vers l’établissement de ce type de connexion entre les Palestiniens en exil et l’OLP. Ce travail doit être poursuivi.
Alors que le droit international a échoué à été trop souvent incapable de protéger les droits des Palestiniens – comme les droits d’innombrables populations colonisées et marginalisées à travers le monde – les Palestiniens de la diaspora devraient néanmoins faire pression pour la reconnaissance de leurs droits à la nationalité palestinienne.
Comme première étape pour sauvegarder leurs droits, les Palestiniens devraient exiger que leurs dirigeants dans le corps diplomatique de l’OLP – dont les membres sont chargés de représenter les réfugiés et exilés palestiniens à travers la diaspora – exigent les droits de ceux qu’ils représentent à appartenir à la Palestine, matériellement et autrement, en adoptant les recommandations qui suivent :
- Créer des forums permettant aux Palestiniens du monde entier de se réunir et de définir les critères permettant de déterminer qui peut prétendre à la nationalité palestinienne. Bien que le traité de Lausanne contienne des dispositions à ce sujet (jus sanguinis, jus soli et jus domicile), il incombe aux Palestiniens de formuler ces droits à leur façon, un peu comme les communautés autochtones d’Amérique du Nord en discutent depuis des décennies. En d’autres termes, l’attribution de l’indigénéité par le sang réinstaure une pratique coloniale, et les communautés opprimées doivent donc se réunir pour dialoguer, comme le dit Christina A. Li, afin de « mieux reconnaître les rôles que jouent l’expérience vécue, les liens culturels, les formes précoloniales de production de connaissances et les classifications fondées sur le sang dans la formation de l’indigénéité ».
- Publier un registre de la population des Palestiniens exilés. Un registre officiel est le seul moyen de déterminer le nombre de Palestiniens de la diaspora qui peuvent prétendre à la nationalité palestinienne.
- Rédiger une loi complète sur la nationalité, fondée sur les droits des Palestiniens à leur nationalité, tels que définis par le droit international et par consensus. Cela permettrait de jeter les bases de l’octroi de la citoyenneté palestinienne.
- Soutenir les Palestiniens vivant dans des pays étrangers et possédant une citoyenneté de second rang qui demandent à être reconnus comme des ressortissants palestiniens par leur pays d’accueil.
- Exiger qu’Israël soit tenu pour responsable de la violation du droit international en refusant aux millions de Palestiniens qu’il a expulsés de Palestine en 1948 et 1967 leurs droits à la nationalité palestinienne. Cela doit être fait au niveau régional et international, dans chaque État où résident des Palestiniens.
Notes :
[1] L’analyse juridique et politique contenue dans cette note de politique générale repose en partie sur un entretien réalisé avec Susan Akram, experte en droits de l’homme et des réfugiés, que l’auteur a transcrit et édité. L’auteur tient à remercier Susan Akram et Kate Rouhana pour leur aide dans cette recherche.
[2] Les sections historiques de cette note de politique générale illustrent la recherche que l’auteur a incluse dans son livre, Transnational Palestine : Migration and the Right of Return before 1948, (Stanford University Press, 2022).
Auteur : Nadim Bawalsa
* Nadim Bawalsa est le rédacteur en chef d'Al-Shabaka. Il est historien de la Palestine moderne et auteur de Transnational Palestine : Migration and the Right of Return before 1948 (Stanford University Press, 2022).Ses autres travaux ont été publiés dans le Jerusalem Quarterly, le Journal of Palestine Studies, le NACLA Report on the Americas, ainsi que dans des volumes édités.Il a obtenu un doctorat conjoint en histoire et en études moyen-orientales et islamiques de l'Université de New York en 2017, et un master en études arabes du Centre d'études arabes contemporaines de l'Université de Georgetown en 2010. En 2019-2020, il a obtenu une bourse de recherche PARC-NEH en Palestine.
29 septembre 2022 – Al-Shabaka – Traduction : Chronique de Palestine – Lotfallah