Abu Al-Tein : un médecin, un père et un résistant

Le Dr Abdallah Abu Al-Tein, son épouse, Ansar, et ses deux fils - Photo Facebook

Le 14 octobre vers 8h30, la nouvelle est tombée qu’un médecin a été abattu d’une balle dans la tête par les forces israéliennes lors d’un raid dans le camp de réfugiés de Jénine, dans le nord de la Cisjordanie occupée.

Pendant les premières heures après qu’il a été abattu, les circonstances entourant l’assassinat du Dr Abdallah Abu Al-Tein n’étaient pas claires.

Les tentatives de réanimation de ses collègues ont échoué après plusieurs heures passées aux urgences de l’hôpital gouvernemental de Jénine.

Vers 13h35, le ministère palestinien de la Santé [MoH] a confirmé la mort du Dr. Abu Al-Tein, après avoir une première fois signalé qu’Abu Al-Tein avait été tué par des tirs israéliens alors qu’il exerçait ses fonctions de médecin.

Une deuxième déclaration du ministère de la Santé sur Facebook, indiquait alors : « Le MoH annonce le martyre du Dr Abdallah Abu Al-Tein, suite à une balle qui lui a transpercé la tête, tirée par les soldats de l’occupation devant l’hôpital gouvernemental de Jénine ce matin. »

Deux récits qui s’opposent

Un ambulancier palestinien a déclaré à Palestine TV, lors d’une interview en direct, que les équipes médicales ont été prises pour cible lors du raid. Le docteur Abu Al-Tein se trouvait à proximité de l’hôpital, situé vers l’entrée du camp de réfugiés de Jénine, alors qu’une jeep militaire israélienne fermait la rue principale menant à l’hôpital.

« Il est soudainement tombé face contre le sol. Les ambulanciers – qui se trouvaient également à proximité de l’hôpital, à l’autre extrémité de l’endroit où se trouvait la jeep militaire israélienne – ont tenté d’évacuer le médecin, qui a finalement été porté dans la cour de l’hôpital par d’autres médecins. »

Cependant, le réseau d’information Al-Arabiya a recueilli un autre récit auprès de témoins oculaires et de sources qu’ils ont préféré ne pas publier.

Selon un témoin oculaire, le Dr Abu Al-Tein se trouvait à l’hôpital lorsque les forces israéliennes ont pris d’assaut la ville de Jénine et son camp. Il serait alors sorti de l’hôpital, aurait saisi un M16 dans sa voiture, aurait mis un masque sur son visage et aurait engagé un échange de tirs à proximité de l’hôpital.

Jerusalem24 n’a pas été en mesure de vérifier cette affirmation de manière indépendante.

Deux vies en parallèles

La nouvelle de l’assassinat du Dr Abu Al-Tein s’est rapidement répandue dans les canaux d’information palestiniens, formels et informels, et les spéculations ont fusé pour savoir s’il avait été tué en sa qualité de médecin ou de combattant armé.

Le Dr Wissam Baker, ami du Dr Abu Al-Tein, déclare à Al-Arabiya que son ami menait une double vie.

« Abdallah est un vrai Palestinien, une personne qui possède un emploi avec une position élevée, mais c’est aussi un révolutionnaire. Il travaille comme médecin le jour, et comme combattant la nuit. »

Un combattant palestinien de Jénine a corroboré le récit selon lequel le Dr Abu Al-Tein avait l’habitude de travailler sous couverture. « Il travaillait discrètement dans le camp, il activait le travail des brigades des martyrs d’Al-Aqsa, et il apportait un soutien financier et moral aux brigades », a déclaré le combattant à Al-Arabiya.

Le Dr Abu Al-Tein était un membre actif de la section régionale du Fatah de Jénine et le chef de l’unité de résistance locale, selon le secrétaire du Fatah à Jénine, Ata Abu Rmileh.

Le Dr Abu Al-Tein était fils unique, marié à une dentiste avec qui il a eu deux fils.

Des équipes médicales prises pour cible

En l’absence de preuves de vidéosurveillance, il peut être difficile de déterminer si le Dr Abu Al-Tein a été pris ou non pour cible en sa qualité de médecin.

Cependant, les équipes médicales palestiniennes sont régulièrement visées par les tirs israéliens et l’ont été au cours du même raid sur Jénine.

Au cours de leur invasion, les forces israéliennes d’occupation ont tiré à plusieurs reprises sur des ambulanciers qui tentaient d’évacuer Mateen Dabaya, âgé de 26 ans – qui a été déclaré mort par la suite – des ruelles du camp de réfugiés de Jénine.

L’incident a été filmé et les images ont été largement diffusées sur les médias sociaux.

Plus tard dans la journée de vendredi, des colons israéliens ont attaqué une ambulance dans la ville de Huwara, au sud de Naplouse, blessant au visage l’infirmière Hala Halima.

Le 7 octobre, des soldats israéliens ont empêché le personnel médical et les autres personnes sur place de venir en aide à Mahdi Mohammad Abulmuti Ladadwa, âgé de 17 ans, qui a reçu une balle dans le bassin tirée par les forces israéliennes lors des affrontements qui ont éclaté dans le village d’Al Mazraa Al-Gharbia, au nord de Ramallah.

Les mêmes soldats ont ensuite agressé l’équipe de l’ambulance. Le décès de Mahdi a plus tard été constaté à l’hôpital Al-Istishari de Ramallah.

Le 2 octobre, des soldats israéliens ont attaqué une équipe médicale à Beit Furik, au sud de Naplouse, les frappant à la tête avec la crosse de leur fusil, ce qui a entraîné plusieurs blessures graves.

L’armée a ensuite détenu les ambulanciers à l’entrée de Beit Furik.

La société du Croissant-Rouge palestinien a condamné l’attaque et a déclaré que le droit humanitaire international interdit strictement de prendre pour cible les missions médicales, y compris les personnes, les véhicules et les installations, qui accomplissent des tâches humanitaires, et souligne qu’elles doivent être protégées et ne pas être exposées à un danger quelconque, à une attaque ou à une entrave à leur travail.

Une déclaration partagée sur la page Facebook du Croissant-Rouge indique : « Les violations commises depuis le début de l’année 2022 jusqu’à la mi-septembre contre les équipes et les véhicules du Croissant-Rouge palestinien dans le territoire palestinien occupé ont atteint 383, réparties comme suit : 19 violations contre les ambulances de la Société, 19 cas d’obstruction des ambulances et 331 cas d’empêchement des équipages d’ambulances d’atteindre leur destination, et 14 cas d’agression physique sur les équipages d’ambulances. »