Par Al-Mayadeen
Un marchand d’armes français est mis en examen pour avoir aidé l’occupant israélien à commettre des crimes de guerre dans la bande de Gaza lors de l’attaque de 2014.
La justice française enquête sur Exxilia, un fabricant d’armes français, sur la possibilité que des crimes de guerre aient été commis avec ses systèmes d’armes. L’enquête porte sur l’assassinat de trois enfants palestiniens par les forces d’occupation israéliennes à Gaza il y a neuf ans.
Les enfants, Fella, 8 ans, Wassim, 9 ans, et Jihad Shuhaiber, 10 ans, nourrissaient des pigeons sur le toit de leur maison, dans le nord de la bande de Gaza, lorsqu’une roquette tirée par un drone israélien les a touchés et a brusquement mis fin à leur vie à un si jeune âge.
Leurs cousins Bassel, 9 ans, et Uday, 16 ans, ont également été grièvement blessés et transportés à l’hôpital.
L’assassinat des enfants palestiniens a eu lieu le 17 juillet 2014, dans le cadre d’une campagne de terreur israélienne contre le territoire palestinien, qui avait débuté dix jours plus tôt.
L’opération a été baptisée « Bordure protectrice » et a donné lieu à un assaut de l’occupation israélienne sur Gaza pendant près de deux mois. Au moins 2310 Palestiniens ont été tués au cours de cette opération.
En 2016, la famille Shuhaiber a déposé une plainte contre Exxilia Technologies, une société à l’origine de l’un des composants utilisés dans le missile avec lequel les forces d’occupation israélienne ont tué les petits enfants.
Aujourd’hui, l’affaire voit enfin le jour puisque l’entreprise est mise en examen pour sa participation à un crime de guerre.
Diverses organisations humanitaires qui ont pu se rendre sur place ont découvert, parmi les débris du missile tiré sur la maison, un composant électronique fabriqué par le groupe d’armement français. Il s’agit d’un capteur à effet Hall (mesure de variation de champ magnétique) fabriqué par Eurofarad, l’ancien nom d’Exxelia Technologies.
« L’industrie française de l’armement ne peut plus se soustraire à sa responsabilité morale et juridique. La vente de matériel utilisé pour commettre des crimes de guerre doit être sévèrement punie », a déclaré Ingrid Metton, l’avocate du plaignant à l’époque.
« En dehors de l’affaire Exxelia, nous appelons la France, qui a joué un rôle de premier plan dans l’élaboration et l’adoption du traité sur le commerce des armes, à faire preuve de responsabilité », a déclaré Hélène Legeay, de la Fédération internationale de l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (FIACAT).
L’immeuble de Shuheibar a été touché, juste avant la rupture du jeûne, “« ans un quartier où il n’y a jamais eu de bombardement » car « il n’y avait pas le moindre objectif militaire », a déclaré à l’AFP Joseph Breham, l’avocat de la famille. « C’est un crime de guerre », a-t-il ajouté, rejetant l’hypothèse d’une erreur car « il est quasi impossible de confondre des enfants avec des soldats surarmés ».
La plainte de la famille Shuheibar est « emblématique », a souligné l’avocat. Pour la première fois, les pratiques des forces d’occupation israéliennes et la responsabilité des fabricants d’armes sont mises en cause devant la justice française, a-t-il ajouté.
Les marchands d’armes sont responsables de l’utilisation de leurs armes alors qu’ils ne pouvaient ignorer que des crimes de guerre étaient commis avec leurs produits, a ajouté l’avocat français.
Il a ensuite appelé à mettre fin à l’impunité des marchands d’armes et à appliquer le traité sur le commerce des armes qui prévoit l’interdiction des exportations ou le réexamen des autorisations lorsque des clients sont soupçonnés d’avoir commis des crimes de guerre.
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Un rapport parlementaire annuel indique que les exportations d’armes françaises ont atteint un niveau record de 27 milliards d’euros en 2022, la région du Proche et du Moyen-Orient représentant 64 % du total des commandes.
En juillet, Uday Shuhaiber, accompagné de ses parents, de son oncle et de son cousin Bassel, s’est rendu en France pour présenter leur dossier au juge d’instruction.
Shuhaiber a fait part de la tension qu’il endurait, déclarant qu’il n’arrivait pas à dormir la nuit précédant le voyage, sachant qu’ils auraient enfin l’occasion de faire valoir leurs droits.
« J’ai été blessé à l’âge de 16 ans et j’en ai maintenant 25. Toutes ces années ont été perdues », déplore Uday Shuhaiber.
Bassel, qui a subi une grave blessure au crâne, a expliqué pourquoi ils cherchaient de l’aide en France. « Nous sommes venus ici pour trouver une solution et un traitement. À Gaza, nous manquons de ressources médicales essentielles et j’ai encore des éclats d’obus dans le corps ».
L’occupation israélienne a mis en place un blocus sévère sur la bande de Gaza, qui s’applique même aux équipements médicaux.
Bassel et Uday ont raconté en détail leurs blessures et l’impact durable qu’elles ont eu sur leur vie.
Uday a une large cicatrice sur l’abdomen, et des éclats d’obus sont restés incrustés dans son bras gauche, ainsi que dans ses jambes. Il a expliqué à quel point cette affaire l’avait touché, en déclarant : « Cela m’a beaucoup affecté et m’a complètement dévasté. »
Plus de 15 ans après le blocus imposé par « Israël » à Gaza en juin 2007, qui a paralysé ses secteurs vitaux, l’ONG britannique Save the Children a publié un rapport sur les conséquences de ce blocus étouffant pour les enfants de Gaza.
Dans ce rapport intitulé « Piégé », l’ONG indique que depuis 2018, le nombre de ceux qui signalent des symptômes de « dépression, de chagrin et de peur » est passé de 55 à 80 %.
Jason Lee, directeur de Save the Children pour la Palestine occupée, a déclaré que les enfants avec lesquels ils se sont entretenus pour réaliser ce rapport ont décrit vivre « dans un état perpétuel de peur, d’inquiétude, de tristesse et de chagrin. »
Ces enfants étaient constamment dans l’attente de la prochaine vague de violence et se sentaient incapables de dormir ou de se concentrer.
Leur détresse s’est également manifestée par des symptômes physiques, comme l’énurésie, la perte de la capacité de parler ou même d’accomplir des tâches élémentaires, ce qu’il a qualifié de « choquant » et qui devrait servir de « signal d’alarme pour la communauté internationale ».
Save the Children a également indiqué que les enfants représentent environ la moitié des 2,1 millions de personnes vivant dans la bande de Gaza. En outre, environ 800 000 jeunes n’ont « jamais connu la vie sans le blocus ».
Dans une déclaration marquant l’anniversaire du blocus en 2022, Human Rights Watch (HRW) a déclaré qu’ « Israël » avait « transformé Gaza en une prison à ciel ouvert ».
Omar Shakir, directeur de HRW pour la Palestine et les territoires occupés, a déclaré à l’AFP que les jeunes subissaient « le poids du blocus parce qu’ils ne connaissent pas la Gaza d’avant la fermeture ».
Auteur : Al-Mayadeen
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2 août 2023 – Al-Mayadeen – Traduction : Chronique de Palestine