Par Leila Warah
Les agences des Nations unies alertent que la pénurie de carburant obligera les hôpitaux, les usines de dessalement et les boulangeries de Gaza à fermer leurs portes, entraînant indirectement la mort de nombreuses personnes. « La situation est catastrophique. Les civils, en particulier les enfants, continuent de payer le plus lourd tribut », déclare Save the Children.
Victimes :
- 10 818 Palestiniens tués, dont 4412 enfants, et 26 905 blessés à Gaza
- 175 Palestiniens tués en Cisjordanie occupée et à Jérusalem-Est
Principaux développements :
- Ministère palestinien de la santé : « Aucun endroit de Gaza n’est sûr ».
- UNRWA : 92 employés de l’agence ont été tués depuis le 7 octobre, le « plus grand nombre de travailleurs humanitaires des Nations Unies tués dans un conflit dans l’histoire des Nations Unies ».
- UNRWA : 160 personnes réfugiées dans des écoles de l’UNRWA partagent une seule toilette ; une douche pour 700 personnes.
- La députée palestinienne Rashida Tlaib a été censurée par la Chambre des représentants des États-Unis pour la phrase « Du fleuve à la mer, la Palestine sera libre ».
- 70 démocrates signent une déclaration condamnant la phrase « du fleuve à la mer » … « comme un cri de ralliement pour la destruction de l’État d’Israël et le génocide du peuple juif ».
- Le Parlement israélien adopte une loi « draconienne » criminalisant la « distribution de matériel terroriste”, dernier développement en date dans la guerre de censure menée par Israël contre les Palestiniens.
- Les forces israéliennes ont arrêté des responsables politiques palestiniens en Israël, dont le chef du Haut Comité de suivi des citoyens arabes d’Israël, Mohammad Barakeh, et l’ancien membre de la Knesset, Haneen Zoabi, rapporte Wafa.
- Deux mosquées ont été complètement détruites lors de l’attaque de Khan Younis mercredi : Khalid bin al-Walid et al-Ikhlas, selon le ministère de l’Intérieur de Gaza.
- Les États-Unis ont effectué une frappe sur une installation dans l’est de la Syrie, la deuxième attaque américaine dans le pays depuis le 7 octobre, en « réponse aux attaques contre le personnel américain en Irak et en Syrie » au cours des dernières semaines, tuant au moins neuf personnes, selon le Pentagone.
- Un drone américain a été abattu au large des côtes du Yémen par les combattants Houthis pro-iraniens, ont confirmé des responsables américains à Reuters et à l’AFP.
- Des frappes aériennes israéliennes ont touché huit hôpitaux dans la bande de Gaza au cours des trois derniers jours, selon le bureau des médias du gouvernement de Gaza.
Traiter les patients dans des couloirs, à même le sol et en plein air
Israël a soumis la population de Gaza à cinq semaines de bombardements incessants, privant plus de deux millions de personnes piégées dans l’enclave assiégée des nécessités de base, notamment la nourriture, l’eau, les soins médicaux et le carburant.
Les hôpitaux, en particulier, ont été la cible de l’agression en cours et ont été durement touchés par le siège et les bombardements .
Al Jazeera rapporte que trois personnes ont été tuées et des dizaines d’autres blessées après que des frappes aériennes israéliennes ont touché les environs de l’hôpital Al-Nasr dans l’ouest de Gaza à l’aube jeudi, ajoutant qu’Israël a également tiré plusieurs missiles autour du complexe médical Al-Shifa de la ville de Gaza, ce qui a entraîné la chute de fragments de missiles dans la cour de l’hôpital.
De même, les environs de l’hôpital Al-Quds, dans le nord de Gaza, sont soumis à des bombardements quotidiens depuis dimanche, dit Nebal Farsakh, porte-parole de la Société du Croissant-Rouge palestinien (SCRP).
Mercredi, le Croissant-Rouge palestinien indiqué que les bombardements israéliens près de l’hôpital Al Quds avaient entraîné la fermeture de toutes les routes menant à l’hôpital et l’impossibilité pour les équipes médicales de quitter l’hôpital pour se rendre auprès des blessés.
L’organisation a ajouté que l’hôpital était confronté à « une grave pénurie de carburant et que l’on s’attendait à ce qu’il n’en reste plus aujourd’hui », de sorte qu’il a réduit la plupart de ses activités pour tenter de rationner ce qui reste.
« Nous avons environ 500 patients à l’intérieur de l’hôpital. Nous avons 15 patients en soins intensifs. Ils sont blessés et sous assistance respiratoire. Nous avons des nouveau-nés en couveuse. Nous avons 14 000 personnes déplacées, dont la majorité sont des femmes et des enfants », a déclaré M. Farsakh à Al Jazeera, ajoutant qu’ils ont dû « empêcher quatre ambulances d’être en service ».
« Les patients subissent des douleurs immenses et inutiles car les médicaments et les anesthésiques viennent à manquer. En outre, des dizaines de milliers de personnes déplacées ont trouvé refuge dans les parkings et les cours de l’hôpital », a ajouté M. Farsakh.
Le commissaire général de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), Philippe Lazzarini, et le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, ont déclaré dans un communiqué commun que les médecins d’Al-Shifa, où les conditions sont « désastreuses », sont contraints de soigner les malades et les blessés « dans les couloirs, à même le sol et à l’extérieur », car les salles d’urgence sont débordées.
« Sans carburant, les hôpitaux et d’autres installations essentielles telles que les usines de dessalement et les boulangeries ne peuvent pas fonctionner, ce qui entraînera très certainement la mort d’un plus grand nombre de personnes », ont-ils déclaré.
Alexandra Saieh, de Save the Children, a souligné que les enfants qui ne sont pas tués par les bombes risquent de mourir de faim, de maladie et de déshydratation.
« La situation est catastrophique. Les civils, en particulier les enfants, continuent de payer le plus lourd tribut à la violence actuelle. Si nous n’avons pas de cessez-le-feu, les chiffres continueront d’empirer », a-t-elle déclaré, selon Al Jazeera.
Mercredi, le Croissant-Rouge palestinien a déclaré que 106 camions du Croissant-Rouge égyptien, chargés d’aide et de cinq véhicules ambulanciers en provenance du Koweït, avaient franchi le poste-frontière égyptien de Rafah, mais qu’aucun d’entre eux ne contenait de carburant, pourtant indispensable.
L’organisation précise que 756 camions sont entrés dans l’enclave assiégée depuis le 21 octobre, ce qui reste bien en deçà des besoins de l’enclave assiégée. En revanche, avant le 7 octobre, l’enclave assiégée recevait environ 500 camions par jour.
Selon Ghebreyesus et Lazzarini, un convoi contenant des fournitures médicales indispensables a été livré à l’hôpital principal de Gaza, al-Shifa.
Cependant, les fournitures sont « loin d’être suffisantes pour répondre aux immenses besoins » de Gaza, car la situation à l’hôpital al-Shifa est « désastreuse », et les installations médicales à travers l’enclave assiégée sont à court de fournitures et de carburant.
« La capacité des hôpitaux et des installations médicales à fonctionner est primordiale, en particulier pendant les conflits », poursuit le communiqué.
Le porte-parole de l’armée israélienne, Daniel Hagari, a présenté des vidéos, des photographies et des enregistrements audio qui prétendaient montrer que le Hamas construisait un tunnel sous les hôpitaux.
Cependant, une enquête menée par Al Jazeera n’a trouvé aucun élément permettant d’étayer les affirmations d’Israël concernant la présence d’un tunnel du Hamas sous les hôpitaux et, plus particulièrement, sous l’hôpital Sheikh Hamad, dans le nord de Gaza.
De même, Mohammed al-Emadi, président du Comité qatari pour la reconstruction de Gaza, a décrit l’accusation d’Israël comme une « tentative flagrante de justifier le ciblage par l’occupation d’installations civiles, notamment d’hôpitaux, d’écoles, de rassemblements de population et d’abris pour les personnes déplacées ».
La résistance poursuit ses opérations sur le terrain
Lors d’une allocution télévisée mercredi, le responsable adjoint du mouvement Hamas, Saleh al-Arouri, a précisé que l’offensive de la résistance le 7 octobre avait été lancée principalement pour « assurer la liberté et l’indépendance de notre peuple, ce qui commence par la libération de nos prisonniers politiques ».
« Tous nos prisonniers doivent être libérés », a déclaré M. Arouri, réaffirmant que le Hamas était prêt à conclure un « accord global ».
« Prenez tous ceux que nous avons et donnez-nous tous les prisonniers que vous avez », a-t-il proposé, faisant référence aux prisonniers faits par la résistance le 7 octobre et aux prisonniers politiques palestiniens détenus dans les prisons israéliennes.
« Il est préférable de prendre vos prisonniers vivants. Acceptez un accord d’échange maintenant ».
« Cette question ne peut être résolue que par un échange au sein de chacune de ces catégories [de prisonniers et de captifs] ou dans le cadre d’un processus global incluant tout le monde », a déclaré le porte-parole des Brigades Qassam, Abu Obeida, dans une allocution télévisée sur Al-Aqsa T.V.
Les brigades Al-Qassam et Al-Quds continuent de cibler les forces d’occupation israéliennes et les colonies avec des roquettes en réponse à l’agression contre Gaza.
Pour le 35e jour consécutif, la Résistance palestinienne a continué à cibler les véhicules militaires et les forces d’occupation israéliennes qui tentaient de s’infiltrer dans la bande de Gaza et a bombardé les colonies israéliennes illégales avec des roquettes et des pièces d’artillerie, causant des pertes importantes.
Sur le front nord-ouest de la ville de Gaza, les Brigades al-Qassam, l’aile militaire du Hamas, ont annoncé que les combattants de la Résistance avaient détruit deux chars israéliens en utilisant des roquettes Yassin 105.
Sur le même front, les Brigades al-Qassam ont également confirmé la destruction d’un char israélien dans la zone de Twaim, ainsi qu’un autre dans le nord du quartier de Sheikh Radwan.
A l’ouest de la ville de Gaza, les Brigades ont détruit trois véhicules blindés et un bulldozer israéliens à la périphérie du camp de réfugiés d’al-Shati en utilisant des roquettes Yassin 105.
Au sud-est de la ville, les Brigades al-Qassam ont rapporté avoir tendu une embuscade à une unité d’infanterie de l’occupation israélienne dans la région de Deir al-Balah et ont annoncé que leurs combattants avaient visé les soldats israéliens avec une roquette anti-personnel et les avaient engagés à bout portant.
En outre, les Brigades ont ciblé la base militaire israélienne « Re’im » dans l’enveloppe de Gaza avec une salve de roquettes et ont lancé une attaque intensive à la roquette sur la ville occupée d’Asdoud en réponse à l’agression israélienne en cours sur Gaza.
Les Brigades Al-Quds, l’aile militaire du Jihad islamique palestinien (PIJ), ont également annoncé avoir ciblé Asdoud occupée avec une salve de roquettes.
Les Brigades Al-Quds ont tiré plusieurs obus de mortier sur des véhicules militaires israéliens avançant à l’ouest du complexe gouvernemental d’Ansar, à l’ouest de la ville de Gaza. Les combattants de la Résistance ont également visé des véhicules militaires israéliens près du site 17 au nord-ouest de la ville de Gaza avec le même type d’obus.
Cisjordanie : Trop c’est trop
La situation en Cisjordanie continue de s’aggraver, les soldats et les colons israéliens poursuivant leurs attaques meurtrières contre les Palestiniens.
Au cours des seules dernières 24 heures, les forces israéliennes ont assassiné au moins 12 Palestiniens.
À Jénine, dans le nord de la Cisjordanie, le ministère palestinien de la santé a indiqué que neuf Palestiniens avaient été tués lors d’un raid militaire israélien jeudi matin dans la ville palestinienne.
Selon Wafa, deux Palestiniens ont été tués dans la nuit de mercredi à jeudi par les forces israéliennes lors d’une violente incursion militaire à Hébron et à Bethléem.
À Hébron, Anas Abu Atwan, 25 ans, a été tué d’une balle dans la poitrine dans le village de Tabqa.
À Bethléem, Mohammad Thawabta, 51 ans, originaire de Beit Fajjar, est mort des suites de ses blessures lors de l’incursion des forces israéliennes à Bethléem mercredi. 19 personnes ont été blessées par des tirs à balles réelles et cinq par des éclats d’obus.
Le douzième Palestinien est décédé de blessures critiques après avoir été abattu par les forces israéliennes jeudi matin dans le camp de réfugiés d’al-Amari, à Ramallah.
La campagne d’arrestations massives menée par Israël s’est également poursuivie, avec la détention de plus de 2200 Palestiniens, hommes et femmes, depuis le 7 octobre, selon le Club des prisonniers palestiniens.
Ahed Tamimi, une bien connue militante palestinienne, âgée de 22 ans et originaire du village de Nabi Saleh dans la région de Ramallah, a été tabassée en détention après avoir été kidnappée en début de semaine pour une prétendue activité sur les réseaux sociaux, a rapporté Dena Takruri, journaliste à Al Jazeera, citant la mère d’Ahed Tamimi.
« Sa mère a reçu un appel d’un avocat qui rendait visite à une autre prisonnière palestinienne. Cette prisonnière a informé son avocat du statut d’Ahed [et] de prévenir sa famille », a déclaré Mme Takruri.
Des organisations de défense des droits de l’homme telles qu’Amnesty International, basée au Royaume-Uni, ont recensé des « cas horribles de torture et de traitement dégradant de détenus palestiniens » dans le cadre de la « recrudescence des arrestations arbitraires x.
Le journal israélien Haaretz a également constaté une augmentation du nombre de soldats israéliens qui documentent ouvertement en ligne les mauvais traitements qu’ils infligent aux Palestiniens.
Alors que les tensions augmentent en Cisjordanie, Al Jazeera a déclaré qu’un combattant palestinien armé aurait tiré sur deux colons israéliens près de la colonie israélienne illégale d’Itamar, à l’est de Naplouse, et que l’un d’entre eux se trouve actuellement dans un état critique.
« Les conditions de vie en Cisjordanie occupée sont de plus en plus désastreuses », a déclaré Martin Griffiths, responsable des affaires humanitaires de l’ONU, en rappelant le nombre de Palestiniens, dont des dizaines d’enfants, qui ont été tués, blessés et déplacés depuis le 7 octobre.
« Trop c’est trop », a-t-il ajouté.
« Il est plus que temps de prendre des sanctions contre Israël »
Chaque jour où Israël poursuit ses bombardements impitoyables sur Gaza, les retombées diplomatiques se multiplient.
Le président turc Erdogan a déclaré qu’Israël « écrase toutes les valeurs humanaines ».
« Israël continue de bombarder des écoles, des mosquées, des églises, des hôpitaux, écrasant ainsi toutes les valeurs humaines », a déclaré M. Erdogan, ajoutant que 73 % des personnes tuées sont des femmes et des enfants.
Le Premier ministre de la Malaisie, qui soutient depuis longtemps la Palestine et plaide en faveur d’une solution à deux États, a rejeté la proposition de loi américaine prévoyant des sanctions unilatérales à l’encontre du Hamas, visant le groupe de résistance palestinien ainsi que ses partisans étrangers.
« Nous ne reconnaissons que les décisions du Conseil de sécurité des Nations unies qui sont considérées comme multilatérales », a déclaré le Premier ministre Anwar Ibrahim au Parlement, selon Al Jazeera.
La vice-première ministre belge Petra De Sutter exhorte la Belgique à adopter des sanctions à l’encontre d’Israël et demande que des enquêtes soient menées sur les bombardements d’hôpitaux et de camps de réfugiés dans la bande de Gaza.
« Il est plus que temps de prendre des sanctions contre Israël. La pluie de bombes est inhumaine », a-t-elle déclaré selon Reuters.
« Il est clair qu’Israël ne se soucie pas des demandes internationales de cessez-le-feu », a-t-elle poursuivi, ajoutant que les responsables de crimes de guerre devraient être bannis de l’Union européenne.
Auteur : Leila Warah
9 novembre 2023 – Mondoweiss – Traduction : Chronique de Palestine