La compagnie d’électricité de Gaza a déclaré qu’elle n’avait pas reçu d’ordonnance officielle concernant la réduction imminente de l’énergie, mais elle a demandé aux Palestiniens à Gaza de se préparer au pire, alors que les groupes de défense des droits de l’homme ont exhorté Israël à reconsidérer sa décision. Celle-ci devrait avoir des effets immédiats et désastreux sur le secteur médical en particulier.
L’approbation est venue après que les autorités israéliennes aient annoncé des projets de réaliser des coupures le mois dernier, à la demande de l’Autorité palestinienne (AP) en Cisjordanie occupée. L’AP refuse en effet de continuer à assurer le coût de l’électricité israélienne fournie au territoire assiégé.
Initiative conjointe entre Ramallah et les autorités d’occupation
L’ex-président palestinien Mahmoud Abbas aurait informé Israël que l’Autorité palestinienne avait seulement l’intention de payer 60% du coût mensuel de 40 millions de shekel (11,19 millions de dollars), alors que le Hamas, le parti qui administre de facto Gaza, et l’AP dirigée par le Fatah continuaient à se reprocher mutuellement la responsabilité de la profonde crise de l’énergie qui sévit à Gaza.
Pendant ce temps, la compagnie d’électricité de Gaza a déclaré lundi que la compagnie d’électricité égyptienne l’avait informé qu’elle pouvait couper les lignes électriques alimentant Gaza à tout moment, sans fournir d’autres détails.
Israël et l’Autorité palestinienne ont de manière concertée, accusé le Hamas de collecter des millions de shekels à travers les taxes collectées dans Gaza chaque mois, sans transférer de l’argent à l’Autorité palestinienne, et «en utilisant (l’argent) pour creuser des tunnels et à l’avantage du Hamas», selon les dires des autorités d’occupation.
La semaine dernière, l’Autorité palestinienne de l’énergie et des ressources naturelles a accusé le Hamas d’avoir bloqué le plan de l’Autorité palestinienne et d’Israël pour résoudre la crise de l’électricité en ne transférant pas les paiements d’électricité à Ramallah.
L’AP a rejeté les déclarations de l’Autorité de l’énergie de Gaza qui assure qu’elle avait satisfait à toutes les demandes pour mettre fin à la crise de l’électricité, mais que l’organe directeur en Cisjordanie occupée n’avait pas répondu.
L’agence de l’AP a insisté sur le fait qu’une solution aux graves problèmes d’électricité à Gaza ne pouvait être réalisée sans réconciliation politique, une dizaine d’années après le début d’une querelle amère entre le Hamas et le Fatah depuis la victoire du Hamas en 2006 lors des élections générales tenues en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.
Chantage politique
Il apparaît cependant que l’AP a tenté d’exploiter la crise de l’électricité pour exercer une pression sur le gouvernement du Hamas pour que celui-ci cède le contrôle du petit territoire palestinien.
Quelque deux millions de Palestiniens dans l’enclave côtière assiégée ont dû se contenter de seulement trois à quatre heures d’électricité par jour depuis avril, et selon le journal israélien The Jerusalem Post, les nouvelles coupures d’électricité ne laisseront que deux à trois heures par jour.
La compagnie d’électricité de Gaza a déclaré lundi après-midi qu’il n’avait pas encore reçu d’ordonnances officielles pour réduire l’approvisionnement en électricité d’une heure par jour, en réponse aux rapports.
“La bande de Gaza souffrira de conséquences désastreuses et dans de nombreux secteurs – en particulier la santé, l’éducation et les services – si l’approvisionnement en électricité est réduit”, a déclaré le chef du département des relations publiques de l’entreprise, Muhamad Thabet.
Thabet a exigé que les Nations Unies et les organisations de défense des droits de l’homme exercent des pressions sur Israël afin d’annuler la décision. Il a déclaré que la compagnie informerait la population de Gaza immédiatement dès que la décision israélienne sera mise en œuvre.
Malgré le manque d’informations sur le moment précis où les nouvelles coupures seraient imposées, Thabet a appelé les Palestiniens à Gaza à se préparer à la crise à venir en limitant encore plus leur consommation d’électricité pour atténuer un éventuel “effondrement” de la vie quotidienne.
Le ministère de la Santé de Gaza a également publié un communiqué lundi, soulignant que le secteur médical a déjà lutté pour fournir du carburant diesel pour exploiter les 87 générateurs qui fournissent de l’électricité aux hôpitaux pendant les heures de coupures.
Le chef du service de radiologie pour les hôpitaux publics de Gaza, Ibrahim Abbas, a également déclaré lundi que les équipements de radiologie qui ont été fournis au cours des dix dernières années – à une valeur estimée à 10 millions de dollars – seraient bientôt en fin de vie en raison de leur sensibilité aux pannes de courant.
Abbas a déclaré que les médecins et les chirurgiens de Gaza dépendent fortement des appareils pour diagnostiquer correctement l’état des malades et fournir des soins médicaux adéquats à des milliers de patients palestiniens.
La seule et unique centrale électrique de Gaza a fermé ses portes en avril, les responsables de l’électricité de Gaza disant qu’ils ne pouvaient pas assurer une taxe imposée par l’AP sur le carburant diesel qui a doublé le prix d’exploitation de l’usine. La fermeture a également coïncidé avec la fin de l’aide du Qatar et de la Turquie sur le carburant.
La centrale électrique n’a pas fonctionné à pleine capacité depuis des années, le blocus paralysant d’Israël limitant gravement les importations de carburant dans l’enclave côtière.
Cela a laissé les lignes électriques israéliennes comme la seule source d’énergie fiable alimentant le territoire appauvri, puisque les lignes électriques d’Égypte qui fournissent de l’électricité au sud de Gaza sont souvent en panne en raison de problèmes techniques.
Une crise humanitaire dévastatrice
Juste avant que le cabinet israélien ne prenne sa décision ce dimanche, l’ONG Gisha – le Centre juridique pour la liberté de circulation – a écrit une lettre au ministre israélien de la Défense, Avigdor Lieberman, qui l’exhortait à ne pas réduire encore plus l’énergie et à prévenir une crise humanitaire imminente à Gaza.
“Réduire l’approvisionnement en électricité d’Israël à Gaza est une ligne rouge qui ne doit pas être franchie. Cette suggestion devrait être entièrement effacée. Des mesures doivent être prises pour amener l’infrastructure de Gaza à un niveau qui réponde aux besoins de ses habitants», a affirmé la lettre.
Selon Gisha, des ailes entières des hôpitaux sont déjà obligées de fermer pendant les pannes journalières de Gaza, ce qui réduit les traitements les plus importants, ceux qui sauvent des vies. Les stations de dessalement d’eau sont maintenant inopérantes, ce qui signifie que l’eau domestique n’est disponible que par intermittence et que les eaux usées ne peuvent pas être pompées loin des zones résidentielles.
Notant les effets déstabilisants du conflit financier entre le Hamas et l’AP, Gisha a insisté sur le fait qu’Israël était tenu responsable de la crise en disant que l’État “n’est pas seulement un fournisseur de services, répondant de manière neutre à la demande d’un client”.
“La responsabilité collective de l’Autorité palestinienne, du gouvernement de facto du Hamas à Gaza, de l’Égypte et de la communauté internationale pour l’état terrible de l’infrastructure de Gaza ne diminue pas la responsabilité évidente d’Israël dans cette situation, ni son rôle incontournable dans les travaux de réparation”, ajoute le communiqué.
“Compte tenu de son contrôle étendu sur la vie dans la bande de Gaza, Israël est responsable d’une vie normale pour ses résidents. Israël est obligé de trouver des solutions qui permettront l’approvisionnement continu en électricité et la prise des mesures actives pour augmenter l’offre afin de permettre aux résidents, dont les taxes sont collectées et détenues par Israël, d’avoir accès à des conditions de vie acceptables».
La décision du cabinet israélien survient un jour après que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu ait appelé au démantèlement de l’Agence de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) – l’agence des Nations Unies chargée de fournir des services à plus de cinq millions de réfugiés palestiniens – une exigence contre laquelle l’UNRWA a mis en garde, car elle aurait des conséquences particulièrement dévastatrices sur la bande de Gaza, où 80% de la population dépend de l’aide humanitaire.
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) ont publié des rapports ce mois-ci, prévoyant une crise totale si la situation à Gaza continue sur sa trajectoire actuelle.
La grave pénurie d’électricité dans l’enclave au fil des ans a exacerbé les conditions de vie déjà terribles dans le petit territoire palestinien. La guerre a également eu des effets dévastateurs et, lors de l’offensive de 50 jours d’Israël sur Gaza en 2014, la centrale électrique a été bombardée et totalement arrêtée.
L’ONU a prévenu que la bande de Gaza deviendrait inhabitable pour ses habitants d’ici 2020, mettant en exergue la dévastation de la guerre et près d’une décennie de blocus israélien.
12 juin 2017 – Ma’an news – Traduction : Chronique de Palestine