Les Libanais font face aux massacres israéliens et se préparent au pire

La population civile libanaise fuit les frappes israéliennes - Capture vidéo - Al Jazeera

Par Samaa Abu Sharar

Malgré la crise humanitaire qui menace le Sud-Liban, Libanais et Palestiniens se serrent les coudes pour faire face à une nouvelle et brutale guerre israélienne. Samaa Abu Sharar effectue un reportage pour le Palestine Chronicle depuis Beyrouth.

Beyrouth – Hisham Youssef a déjà échappé deux fois à la mort depuis le raid israélien sur le quartier sud de Beyrouth le 20 septembre. Il a également été déplacé deux fois en moins d’une semaine.

Résident d’Al-Dahieh, le nom utilisé par les Libanais pour désigner le quartier sud de Beyrouth, Hisham possède un magasin de téléphonie mobile situé à quelques mètres de l’endroit où le raid a eu lieu vendredi.

Après l’explosion, il a déclaré à Palestine Chronicle, d’une voix encore sous le choc, « Je perds mes nerfs », tout en expliquant que la frappe a eu lieu dans la rue derrière le magasin familial.

Hisham et ses frères et sœurs ont alors décidé d’évacuer leurs maisons à Al-Dahieh jusqu’à ce que les choses se calment.

Ils se sont dirigés vers leur village de Yohmor, dans la vallée de la Bekaa, où vivent leurs parents, pensant qu’ils y trouveraient un havre de paix pour quelques jours.

Malheureusement, le village de Yohmor a été l’une des cibles des raids israéliens sans précédent menés lundi dans différentes régions du Liban.

Selon Hisham, cinq ou six personnes ont été tuées dans leur seul village.

Des raids sans précédent

Selon le ministère libanais de la santé, 558 personnes ont été tuées et 1835 autres blessées, dont des femmes, des enfants et des membres du personnel paramédical, lors des attaques israéliennes de lundi sur l’ensemble du Liban.

Avec la concentration des raids israéliens sur le sud du Liban et la Bekaa, toute la famille a décidé d’évacuer une fois de plus, cette fois à Dawhet Aramoun, dans le district d’Aley au Mont-Liban.

« Un membre de notre famille qui voyage nous a offert son appartement, et toute la famille s’y est installée pour le moment », explique Hisham.

L’histoire de Hisham est celle de milliers de Libanais qui ont fui leurs villes et villages du sud du Liban et de la vallée de la Bekaa pour se rendre dans des zones présumées plus sûres.

Des milliers de Libanais du sud ont encombré les autoroutes pendant des heures hier, certains se dirigeant vers la ville méridionale de Sidon et ses environs, d’autres vers Beyrouth, sans destination précise.

Beaucoup ont passé leur première nuit de déplacement dans leur voiture, dans les rues, tandis que d’autres ont eu la chance de trouver à la hâte une réservation d’hôtel ou un appartement à louer.

Solidarité entre deux peuples

Iman Sabbah, un habitant de Saïda, a déclaré au Palestine Chronicle que la ville était devenue « un centre d’opérations » pour les personnes qui prévoyaient d’y rester ou de se rendre à Beyrouth.

« Les gens ont passé des heures dans leurs voitures, et de nombreux habitants se sont portés volontaires pour distribuer de l’eau ou des collations à ceux qui étaient bloqués dans leurs véhicules », a expliqué Iman Sabbah.

Des images ont été diffusées montrant des jeunes Palestiniens du camp d’Ein Al-Helweh distribuant de l’eau aux personnes bloquées dans leur voiture, en signe de solidarité.

Ces images allaient de pair avec les annonces émanant des résidents des différents camps palestiniens à travers le Liban, qui offraient leurs maisons aux Libanais déplacés.

Sabbah a expliqué à Palestine Chronicle que son cousin avait quitté Nabatieh vers une heure de l’après-midi et qu’il était arrivé à Beyrouth le lendemain à 12h45, en raison du trafic intense sur l’autoroute qui relie Saïda à la capitale.

« C’était déchirant de voir cette énorme vague de personnes déplacées dans les rues. Il y avait beaucoup de panique et de chaos parmi les gens », a ajouté M. Sabbah.

En l’absence d’un véritable plan d’urgence officiel, ce sont les initiatives des particuliers et des petites organisations qui ont permis de secourir les Libanais déplacés, selon l’habitant de Sidon.

« Nous avons reçu de nombreux appels hier pour des produits alimentaires et des couvertures, car les personnes déplacées grelottent de froid la nuit », a déclaré M. Sabbah.

Plusieurs appels ont également été lancés sur des groupes WhatsApp pour demander de l’aide.

« Ma famille est isolée à Sidon, (leur voiture s’est arrêtée complètement) juste avant le marché. Je veux juste que quelqu’un leur apporte de l’eau parce que la voiture a surchauffé », a écrit quelqu’un, en donnant le numéro de sa mère et en demandant à toute personne susceptible de l’aider de ne pas hésiter.

Abris d’urgence

Le gouvernement libanais a ouvert des abris pour les personnes déplacées dans des écoles, des universités et d’autres établissements publics dans le cadre de ce qui a été qualifié de « plan d’urgence ».

Ce « plan d’urgence » a été largement critiqué, les Libanais estimant qu’il était inadéquat et ne répondait pas aux besoins considérables des personnes déplacées, alors que le gouvernement avait eu suffisamment de temps pour s’y préparer.

« Ils ont bombardé la zone située au-dessus de la maison de mes parents dans un village appelé Almat », a déclaré Mohammed Abi Haidar à Palestine Chronicle.

Le comptable libanais a déclaré qu’un flux de personnes déplacées a inondé Jbeil à la suite de l’attaque israélienne.

« Certains se sont dirigés vers des appartements qu’ils possèdent, d’autres ont été hébergés par des personnes », a expliqué Abi Haidar.

Selon Abi Haidar, le parti de la résistance libanaise, le Hezbollah, a fourni des matelas et d’autres aides aux Libanais déplacés, ainsi qu’aux municipalités.

« Il y avait une ambiance générale de solidarité entre les gens, mais que Dieu nous aide si cela continue, car il y a déjà un flot de personnes déplacées et si cela ne s’arrête pas, je ne sais pas comment le problème du déplacement sera résolu », a-t-il ajouté.

Les rues de Beyrouth, un jour après les raids de lundi, sont toujours encombrées de voitures de personnes ne sachant pas où aller.

Depuis lundi, un certain nombre d’hôtels de la capitale Beyrouth ont fait circuler des prix réduits pour les Libanais déplacés, tandis que des annonces d’appartements vacants à louer se sont répandues sur les différents médias sociaux.

Des rumeurs ont également circulé selon lesquelles certains partis libanais auraient forcé certains hôtels à ouvrir leurs portes aux réfugiés de tout le pays.

Depuis lundi, les voitures s’entassent dans les stations-service du pays par crainte d’une pénurie d’essence, car personne ne peut prédire combien de temps durera l’agression israélienne en cours.

Rappelant les guerres israéliennes passées contre le Liban, les supermarchés sont bondés de gens qui essaient d’acheter tout ce qui leur tombe sous la main, certains se plaignant déjà d’une pénurie de pain.

Alors que l’agression israélienne se poursuit au Liban, les Libanais et tous les habitants de ce petit pays vivent dans l’attente de ce que les prochaines heures pourraient leur apporter.

Les scènes de mort, de destruction et de déplacement rappellent cruellement les scènes qui continuent de se dérouler dans la bande de Gaza ravagée.

Malgré les déclarations répétées des responsables libanais et de la résistance libanaise elle-même, selon lesquelles le Liban ne veut pas d’une guerre totale, les Libanais connaissent trop bien Israël.

24 septembre 2024 – Palestine Chronicle – Traduction : Chronique de Palestine – Lotfallah

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