Depuis Gaza assiégée, Ismaïl Haniyeh, responsable du Bureau politique du mouvement Hamas, a lancé un appel pour une nouvelle une Intifada en réponse à la décision du président américain Donald Trump de judaïser Jérusalem, reprenant ainsi à son compte le discours israélien qui prétend que la ville est la capitale politique et religieuse du monde juif.
Dans le même temps, le chef palestinien prétendument “légitime”, Mahmoud Abbas, n’est sorti de sa torpeur que pour nous adresser un discours honteux et lamentable, où sa réponse à cette insulte se résumait à une décision de contacter plus d’instances internationales et de poursuivre les consultations avec “les frères arabes” avant de prendre d’autres mesures.
C’est comme s’il était le président de la Micronésie, et non pas de l’OLP…
Sous Trump, les États-Unis voulaient être le premier pays au monde à reconnaître Jérusalem occupée comme la capitale d’Israël. Mais les États-Unis et leur président raciste ne se rendent pas compte qu’ils ont administré le “choc” dont les nations arabes et islamiques avaient besoin pour sortir de leur coma et de l’état d’humiliation et de honte dans lequel elles vivent.
En déplace son ambassade de Tel Aviv occupée à Jérusalem occupée, Trump a donné le coup de grâce non seulement au faux processus de paix, mais aussi aux dirigeants arabes qui sont ses alliés, en particulier en Égypte et en Arabie saoudite. Car, selon la chaîne de télévision israélienne Channel 10, ces deux pays ont soutenu l’initiative de Trump avant qu’elle ne soit réellement décidée et déclarée, ce qui explique leurs réactions tardives et inaudibles.
Trump ne veut pas des alliés mais des valets et des laquais qu’il traite avec condescendance et arrogance. Après leur avoir vendu pour 550 milliards de dollars d’armements lors de sa première rencontre à Riyadh (dont 460 milliards rien que pour l’Arabie Saoudite et le reste avec le Qatar, les Émirats Arabes Unis et Bahreïn), avec sa décision de judaïser Jérusalem occupée il les récompense à présent en les giflant au visage.
Il ne faut pas compter sur la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU qui se tiendra aujourd’hui pour débattre de cette insulte américaine. Ce sur quoi nous comptons, c’est que les mosquées des 56 États arabes et islamiques où ont lieu les prières du vendredi se transforment en arènes de colère et de slogans hostiles aux États-Unis et à Israël, exigeant une revanche.
Certaines voix capitulardes encouragent le défaitisme et prônent des relations normalisées avec Israël, considérant ce dernier comme un allié de confiance puisqu’il n’a jamais tué un seul Arabe saoudien ou du Golfe. Ils voient Israël comme un ami et un allié, insultant au passage les Palestiniens et les accusant d’avoir vendu leurs terres [aux Juifs avant 1948]. À ces voix qui diffusent une culture de l’abandon et de la soumission et qui mettent en doute la valeur de ces manifestations coléreuses, tout comme elles mettent en doute l’efficacité des intifadas, nous disons : ces vagues de colère ont déclenché la première Intifada des “pierres” et la deuxième Intifada armée, et entraîné la défaite de trois agression israélienne sur la bande de Gaza en moins de trois ans. Ce sont ces mêmes vagues qui ont humilié l’occupation israélienne au Sud-Liban, l’obligeant à se retirer unilatéralement et dans la défaite en 2000, et qui lui ont cassé le nez dans la guerre de 33 jours au Liban en juillet 2006.
Trump n’aurait pas pu commettre ce péché ou cette folie si l’Irak avait été forte, si la Syrie n’avait pas été confrontée à un projet de démantèlement au cours des sept dernières années, si la Libye n’avait pas été enfoncée dans l’anarchie et la fragmentation, si l’Égypte n’avait pas été réduite à mendier son pain, si l’Algérie n’était pas occupée à soigner les blessures de sa décennie noire de terrorisme et si le Yémen n’avait pas été confronté à une agression injuste.
Le projet américain de destruction des principaux États arabes sous la bannière de la démocratie et des droits de l’homme, et de faire d’Israël la superpuissance régionale nous a conduits à cette humiliation. La dernière gifle a été la décision de Trump sur Jérusalem, qui est un prélude à un accord pour une capitulation majeure : l’établissement d’un État palestinien dans le Sinaï, faisant de Netanyahu le nouveau secrétaire général de la Ligue arabe.
Trump a mis bas tous les masques et a montré sa face hideuse à ses alliés arabes. Il a allumé la mèche d’une guerre religieuse dont le combustible sera son pays et son allié israélien. L’époque où le pétrole et ses profits conditionnaient les décisions des dirigeants arabes est bien révolue.
Nous avons toujours parié sur les peuples arabes et islamiques, jamais sur leurs régimes. Et nous avons une grande confiance dans ces nations et n’avons jamais été trompés par des manifestations fausses ou trompeuses ici ou là. Quand nos frères du Golfe s’opposent vaillamment aux tentatives de normalisation et à ceux qui les prônent, cela ne fait que confirmer que notre pari n’a pas été vain, et que ces nations à travers tout le monde islamique n’abandonneront pas leur Jérusalem, leur al-Aqsa, et leur église du Saint-Sépulcre.
Je peux vous assurer que le peuple de Palestine ne vous décevra pas. Les Palestiniens sont comme nous les avons toujours connus. Ne sont-ce pas les mêmes qui se sont retranchés sur les places de la mosquée al-Aqsa, portant dans leurs mains les linceuls du martyre, forçant Netanyahu à retirer ses portes électroniques et à faire marche arrière ? N’ont-ils pas forcé Sharon à se retirer de la bande de Gaza en laissant derrière lui ses colonies ? N’ont-ils pas offert d’innombrables martyrs pour défendre leur dignité, leur honneur et leur foi en la nation pendant plus de cent ans de djihad et de lutte ?
Je vous assure également que les peuples arabes – et non leurs gouvernants et gouvernements – se portent bien et que leurs “véritables” révolutions de colère balaieront toute la pourriture qui s’est accumulée dans le corps de la nation au cours des dernières années. Ils prendront position dans la tranchée de la résistance, adopteront sa culture et défendront ses slogans.
La déclaration de Trump était une occasion en or pour Abbas et son Autorité de se faire pardonner les péchés d’Oslo et la coordination répressive déshonorante avec l’occupant, ainsi que 23 ans de négociations honteuses. Mais Abbas ne l’a pas fait. Il insiste pour se préparer une fin tragique pour lui-même. Il est pénible de voir ceux qui l’entourent éviter de se saisir de ce moment historique et embellir en son nom ces positions défaitistes.
Mais nous remercions Trump – même s’il ne mérite aucune reconnaissance – pour avoir involontairement allumé la mèche d’un éveil arabe et islamique. Cet éveil transformera la région mais sur de nouvelles bases dont le caractère principal sera la résistance. Car Trump a fourni les munitions les plus puissantes à des positions extrémistes et radicales au détriment de ses alliés qui se cachent derrière la bannière de la “modération”.
Trump et ses alliés arabes regretteront les jours de l’État islamique et d’Al-Qaïda. Son parti pris acharné et brutal en faveur de l’agression raciste israélienne ouvrira la voie à l’émergence d’organisations plus dangereuses et plus fortes qui, pour leur vengeance, profiteront de cette opportunité.
Jérusalem – et non Abu Dis – restera la capitale de la Palestine, de toute la Palestine. Et tout comme les combattants de la liberté en Afrique du Sud, en Rhodésie et en Algérie ont supplanté par la force la réalité colonialiste qui leur était imposée, les Palestiniens suivront la même voie, avec le soutien de leurs frères arabes et musulmans, et remporteront la victoire.
Et les jours qui vont suivre montreront que nous avons raison.
* Abdel Bari Atwan est le rédacteur en chef du journal numérique Rai al-Yaoum. Il est l’auteur de L’histoire secrète d’al-Qaïda, de ses mémoires, A Country of Words, et d’Al-Qaida : la nouvelle génération. Vous pouvez le suivre sur Twitter : @abdelbariatwan
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11 décembre 2017 – Raï al-Yaoum – Traduction : Chronique de Palestine – Lotfallah