Parmi les blessés vendredi, 178 l’ont été par balles réelles, tandis que d’autres ont été blessés par balles d’acier revêtues de caoutchouc ou ont dû être traités pour exposition aux gaz lacrymogènes.
Des milliers de personnes se sont rassemblées dans la Bande de Gaza assiégée pour le cinquième vendredi consécutif dans le cadre d’un sit-in de masse connu sous le nom de la Grande Marche du retour. Les Palestiniens réclament le droit de retourner dans leurs maisons saisies par Israël en 1948.
Les protestations ont fait 45 morts et plus de 6 000 blessés depuis le début du mouvement de masse le 30 mars. Il n’y a pas eu de victimes israéliennes.
Stefanie Dekker d’Al Jazeera, sur place à Gaza, rapporte que l’on a pu voir des milliers de manifestants ” courir vers la clôture de séparation avec Israël, s’en approchant comme ils ne l’avaient encore fait au cours des cinq dernières semaines de protestations “.
“Nous avons soudain entendu des tirs à balles réelles [des forces israéliennes] tentant de repousser les gens de cette frontière “, a dit Mme Dekker.
“Israël a clairement indiqué qu’il ne veut pas que les gens s’approchent de ce qu’il appelle une zone tampon. Sinon les gens seront abattus.”
Dix-huit membres du personnel médical et des journalistes ont été blessés.
Ashraf al-Qidra, porte-parole du ministère de la santé de Gaza, a déclaré que les forces israéliennes ont également frappé à deux reprises des postes de soins médicaux avec des quantités de gaz non identifié à l’est du camp de réfugiés d’Al-Bureij dans le centre de Gaza.
Un certain nombre de victimes ont souffert de convulsions, de vomissements graves et de suffocation à la suite de leur exposition, a-t-il dit.
‘Les gens ont perdu leur peur’.
Connue comme la plus grande prison à ciel ouvert du monde, un blocus israélo-égyptien étouffe la Bande de Gaza depuis une dizaine d’années et les habitants disent qu’ils ont atteint un point de rupture.
Les conditions de vie se sont gravement détériorées au fil des ans. Le taux de chômage des jeunes est de 60 % et les résidents ne reçoivent généralement que quatre heures d’électricité par jour.
De nombreux malades meurent d’une mort lente parce que Gaza n’a pas les ressources médicales de base et qu’ils ne peuvent pas quitter Gaza pour se faire soigner ailleurs à cause du blocus.
La situation est devenue si désespérée que “les gens ont perdu leur peur” et qu’ils continueront à protester à la frontière malgré le danger d’essuyer des tirs à balles réelles des forces israéliennes, a expliqué Mme Dekker, notant que lorsque les manifestants se sont retrouvés sous un barrage de tirs à la clôture de séparation, ils n’ont pas reflué.
“Oui, ils vont à la clôture de séparation ; oui, ils lancent des pierres ; oui, ils lancent des cocktails Molotov, mais vous avez affaire à l’une des armées les mieux équipées au monde “, a-t-elle dit.
“C’est leur façon de résister à ce qu’ils appellent l’occupation, de résister au blocus qui ne leur donne aucune liberté de mouvement.
“Leur situation est si catastrophique à Gaza. Je fais des reportages depuis la Bande de Gaza depuis des années et ça n’a jamais été aussi grave.”
Les autorités israéliennes ont accusé les dirigeants de Gaza, le Hamas, d’être à l’origine des manifestations, mais pas une seule roquette n’a été tirée de la Bande de Gaza depuis le début des manifestations.
Appel en faveur d’un embargo sur les armes
Amnesty International a appelé les gouvernements du monde entier à imposer un embargo sur les ventes d’armes à Israël à la suite de la ” réponse disproportionnée ” du pays aux manifestations le long de la clôture de séparation.
“La nature de ces blessures montre que les soldats israéliens utilisent des armes militaires à forte vélocité conçues pour infliger un maximum de dégâts chez les manifestants palestiniens qui ne représentent pas une menace imminente pour eux “, a indiqué un rapport d’Amnesty International.
“Ces tentatives apparemment délibérées de tuer et de mutiler sont profondément troublantes, pour ne pas dire totalement illégales. Certains cas semblent constituer des homicides volontaires, une violation grave des Conventions de Genève et un crime de guerre.”
Plus tôt vendredi, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux Droits de l’Homme, Zeid Ra’ad al-Hussein, a condamné l’utilisation par Israël d’une ” force excessive ” contre les manifestants palestiniens, affirmant que ses forces de sécurité doivent répondre de leurs actes.
“Les pertes en vies humaines sont déplorables et le nombre stupéfiant de blessures causées par des balles réelles ne fait que confirmer le sentiment qu’une force excessive a été utilisée contre les manifestants – pas une fois, pas deux fois, mais de façon répétée “, a déclaré M. Zeid.
Les Palestiniens exigent depuis longtemps que jusqu’à cinq millions de descendants directs des réfugiés palestiniens d’origine aient le droit de retourner dans leur foyer ancestral.
Israël a exclu la demande, arguant que les Palestiniens revenant dans ce qui est maintenant Israël dépasseraient en nombre sa majorité juive actuelle.
Le mouvement de la Grande Marche du Retour doit officiellement continuer jusqu’au 15 mai, connu sous le nom de Jour de la Nakba, marquant l’expulsion de centaines de milliers de Palestiniens lors de la création d’Israël.
Cependant, en l’absence de solution de rechange, de nombreux participants pensent que le mouvement se poursuivra au-delà de cette date.
28 avril 2018 – .aljazeera.com – Traduction: Chronique de Palestine – MJB