Par Abdel Bari Atwan
L’assassinat par un avion israélien du martyr Al-Arouri et de ses compagnons au cœur de la banlieue sud, sera-t-il le détonateur qui déclenchera la guerre régionale à laquelle tout le monde s’attend ?
Comment « Sayyed » [Nasrallah] va-t-il réagir : par des représailles immédiates avec des missiles précis ou en faisant preuve de retenue ?
L’assassinat du Moudjahid Saleh Al-Arouri, chef adjoint du Bureau politique du Mouvement Hamas, par un drone qui a bombardé ce soir un bureau du Mouvement de la Résistance islamique (Hamas) dans la banlieue sud de la capitale libanaise, Beyrouth, a été un choc énorme pour le mouvement et son soutien libanais (Hezbollah).
C’est un choc également pour l’axe de la résistance en général, d’autant plus que cette opération terroriste est intervenue quelques jours après l’assassinat du général Reza al-Moussawi, l’un des plus d’éminents conseillers du martyr Qassem Soleimani, chef de la Force Qods des Gardiens de la révolution iranienne, alors que se poursuit le génocide et le nettoyage ethnique dans la bande de Gaza.
Viser le Moudjahid Al-Arouri vaut une déclaration de guerre contre le Liban et la résistance islamique (Hezbollah) dans le sud du Liban, et représente une provocation au plus haut degré contre son principal dirigeant, Son Eminence Sayyed Hassan Nasrallah.
Une provocation qui, nous le pensons, ne restera pas sans réponse, compte tenu des menaces explicites de Sayyed Nasrallah, à plus d’une reprise, de représailles immédiates pour tout assassinat, qu’il s’agisse de dirigeants du parti, ou de dirigeants palestiniens qui bénéficient de son hospitalité et de sa protection sur le sol libanais.
L’assassinat du Moudjahid Al-Arouri semble avoir été soigneusement pensé en fonction de son objectif, qui est de déstabiliser la sécurité du Liban et d’entraîner la résistance dans une confrontation à plus grande échelle avec l’entité d’occupation.
L’entité a subi des défaites humiliantes et existentielles sur plus de sept fronts internes et externes, notamment le Front de Galilée au nord, la Palestine occupée, la bande de Gaza, la Cisjordanie, les fronts de la mer Rouge et sur les bases américaines en Irak.
L’armée israélienne s’est partiellement retirée de certaines zones du nord de Gaza en raison des pertes croissantes dans ses rangs, qu’elles soient humaines ou en termes de chars et de blindés, et peut-être pour se mobiliser sur le sud du Liban, d’où se sont intensifiées les bombardements de missiles, d’avions et de drones au cours des trois derniers mois.
Dans le nord de la Palestine occupée, plus de 350 000 colons ont fui vers le Néguev à la recherche d’un refuge loin des bombardements en provenance du sud du Liban, un fait qui est le premier de son genre depuis 75 ans.
Des sources médiatiques sionistes ont confirmé que la troisième phase de l’agression contre la bande de Gaza comprendra le début d’une campagne d’assassinats contre les dirigeants des mouvements « Hamas » et « Jihad islamique » à l’intérieur et à l’extérieur de la Palestine occupée.
Sur la liste des assassinats sionistes se trouvent le moudjahid Yahya Al-Sinwar, premier dirigeant du mouvement « Hamas » dans la bande de Gaza, et le moudjahid Ziad Al-Nakhalah, secrétaire général du mouvement du Jihad islamique.
Le martyr Saleh Al-Arouri a su mettre dans une confusion mortelle les Israéliens, parce qu’il a soutenu la résistance armée en Cisjordanie, dès le premier jour, en lui fournissant des armes, une formation et des fonds.
Tel Aviv, Jérusalem-est et la plupart des autres villes se sont retrouvées dans un champ de guerre terrifiant qui a ébranlé la sécurité et la stabilité de l’occupation et doublé les chiffres de l’immigration.
Le martyr Al-Arouri, en coordination avec le mouvement du « Jihad islamique » et ses cadres en Cisjordanie, ainsi qu’avec les Brigades des martyrs Al-Aqsa du Fatah, a transformé la Cisjordanie en un amas de flammes.
Ce torrent enflammé va d’une ville à l’autre, brûlant tous ceux qui se tiennent sur son chemin, soldats et colons, et aussi en soutien aux résistants de la bande de Gaza, en confondant l’ennemi et en l’obligeant à disperser ses forces.
Le martyre d’Al-Arouri et de ses compagnons n’affaiblira pas le mouvement « Hamas », mais augmentera plutôt sa solidité et sa force, car c’est un assassinat qui reflète la faiblesse, la défaite et la frustration de l’occupation, et une tentative ratée de diversion.
La longue liste des assassinats de dirigeants du Hamas, à commencer par son fondateur, Cheikh Ahmed Yassin, et en terminant par les dirigeants martyrs Abdel Aziz Al-Rantisi, Salah Shehadeh, Ahmed Al-Jaabari, et Yahya Ayyash n’a conduit le mouvement qu’à augmenter sa force, son eétendue et son armement, et finalement à la grande et sans précédente offensive victorieuse du 7 octobre dernier.
L’État occupant paiera un très lourd tribut pour avoir commis ce crime, que ce soit dans les territoires occupés ou dans d’autres arènes de résistance, au sud du Liban, en mer Rouge ou sur la grande terre d’Irak, et peut-être se retrouvera-t-il plongé dans une situation de crise, avec une guerre régionale élargie et des combats auxquels il faut s’attendre sur plusieurs fronts.
L’administration du président Biden, qui a soutenu et continue de soutenir les massacres israéliens dans la bande de Gaza et a déployé de grands efforts pour ne pas étendre la guerre au-delà de Gaza – en particulier sur le front libanais – a été « récompensée » par l’État occupant avec cette opération criminelle qui pourrait être le déclencheur d’une guerre régionale majeure.
On ne sait pas comment Son Eminence Sayyed Hassan Nasrallah réagira à ce défi israélien qui le visait personnellement, et qui visait l’un des dirigeants palestiniens supposé sous sa protection et au cœur de sa capitale.
Sayyed Nasrallah élargira-t-il le cercle de guerre qui est menée en Haute Galilée et utilisera-t-il ses arsenaux de missiles balistiques de précision ? Pour frapper Tel-Aviv, Haïfa, Jaffa et les plates-formes d’extraction du gaz palestino-libanais volé en Méditerranée, ou va-t-il montrer de la retenue ?
L’attaque israélienne qui a visé le martyr Al-Arouri et un certain nombre de ses adjoints, y compris des Libanais, et sur le sol libanais, était une agression contre le Liban, sa souveraineté et sa dignité.
Par conséquent, tous les Libanais doivent soutenir toute réponse ferme à cette attaque par l’intermédiaire des forces du Hezbollah, selon que le feu vert soit donné ou non par Sayyed Nasrallah.
Il s’agit d’une agression dont nous pensons qu’elle ne restera pas sans réplique, et peut-être sera-t-elle le déclencheur d’une guerre qui pourrait mettre un terme au projet raciste de colonisation sioniste.
Grandi par sa fermeté et ses aptitudes au combat, [le Hezbollah] résiste depuis 3 mois et a déjà donné à l’ennemi israélien une leçon qu’il n’oubliera pas. Alors que se passerait-il si les missiles, les drones et 100 000 de ses missiles, avec ses redoutables combattants entraient dans la guerre pour se venger des martyrs de l’axe de la résistance en Palestine, au Yémen, en Irak et dans les régions avoisinantes ?
Les prochains jours pourraient être très difficiles et le début de la fin pour l’État occupant. Que Dieu ait pitié du martyr Al-Arouri et de tous ses compagnons, martyrisés par des missiles.
La riposte est attendue et le temps joue en notre faveur.
Auteur : Abdel Bari Atwan
* Abdel Bari Atwan est le rédacteur en chef du journal numérique Rai al-Yaoum. Il est l’auteur de L’histoire secrète d’al-Qaïda, de ses mémoires, A Country of Words, et d’Al-Qaida : la nouvelle génération. Vous pouvez le suivre sur Twitter : @abdelbariatwan
2 janvier 2023 – Raï-al-Yaoum – Traduction de l’arabe : Chronique de Palestine