Au cœur de Gaza : la force silencieuse des femmes en temps de conflit

29 janvier 2025 - Les Palestiniens reviennent à Beit Lahiya, totalement détruite, dans le nord de la bande de Gaza, alors qu'ils tentent de reconstruire leur vie. Au cours des 15 derniers mois de la guerre génocidaire d'Israël, le nord de la bande de Gaza a été coupé des autres régions de Gaza. Israël a refusé l'accès à l'aide humanitaire, a pris pour cible les installations médicales et a lourdement bombardé la région, forçant de larges pans de la population à fuir vers le sud. Avec l'ouverture du « corridor de Netzarim », environ 500 000 Palestiniens ont pu regagner ce qui restait de leurs maisons, pour y trouver des scènes de dévastation et de destruction apocalyptiques. Malgré l'effondrement total des infrastructures, de nombreux Palestiniens ont choisi de revenir et d'installer des tentes sur les ruines de leurs maisons - Photo : Yousef Al-Zanoun / Activestills

Action Contre la Faim – Je suis une travailleuse humanitaire pour Action contre la Faim dans les Territoires palestiniens occupés, mais je ne peux pas révéler mon vrai nom pour des raisons de sécurité. En ce 8 mars, Journée internationale de la femme, je veux élever la voix pour partager l’histoire de la résilience et de la force des femmes de ce peuple meurtri.

Je connais très bien cette terre. J’ai vécu à Gaza pendant près de deux ans et, depuis le début du conflit, j’ai pu entrer cinq fois dans la bande de Gaza.

La dernière fois, je suis arrivé à Gaza en janvier, après le début du cessez-le-feu. J’ai traversé le point de passage de Kerem Shalom avec une valise prête à me permettre de survivre pendant trois semaines. Quand on se rend à Gaza, il faut penser à emporter dans sa valise tout ce dont on a besoin pour vivre : articles de toilette, vêtements, nourriture…

La vie à Gaza ressemble à ces films apocalyptiques où tout est détruit et où il ne reste que des ruines.

Cette fois-ci, j’ai remarqué un changement important par rapport aux mois précédents du conflit : la tension a diminué et un optimisme prudent se fait sentir. Mais ce que mes yeux voient est dévastateur : des familles entières ont perdu leur maison et leurs proches. La reconstruction est une tâche herculéenne qui prendra des années.

Pourtant, malgré tout, la vie continue de se frayer un chemin. J’ai vu de mes propres yeux comment les gens retournent dans leurs maisons détruites, cherchant dans les décombres quelque chose qui peut être réutilisé. Ils consacrent du temps, des efforts et le peu de ressources dont ils disposent pour réparer ce qu’ils peuvent, s’accrochant à l’espoir de reconstruire un foyer.

Cet acte de résistance, cette détermination à reconstruire, c’est ce qui me donne la force de continuer.

Je suis retournée saluer une mère qui a participé à l’un de nos projets. Je suis touchée de voir comment, malgré le manque d’ingrédients et de combustible pour cuisiner, cette mère a réussi à maintenir en vie la tradition de la boulangerie familiale.

Son fils en rêvait, mais c’est elle qui a eu la vision, la force de la faire avancer. Ce n’est qu’un exemple de la résilience et de l’impact fondamental des femmes dans leurs communautés.

Je travaille avec Action contre la Faim, une organisation humanitaire qui apporte une aide essentielle à la population de Gaza. Nous distribuons de l’eau, de la nourriture, des kits d’hygiène et des tentes, mais notre travail va au-delà de la simple assistance. Nous cherchons des solutions à long terme, telles que la réhabilitation d’infrastructures de base comme les puits d’eau et les systèmes d’assainissement.

Dans le nord de Gaza, nous travaillons à rétablir les services essentiels pour permettre à la population de retrouver une vie plus normale. Nous réparons par exemple les canalisations et réhabilitons les puits pour assurer l’accès à l’eau potable.

Cependant, les besoins restent énormes. Les familles vivent dans des tentes qui les protègent à peine de la pluie et du froid. Le manque d’hygiène, l’absence de toilettes et de douches, la contamination de l’eau sont des problèmes graves qui menacent la santé de la population.

La situation est aggravée par les pluies et le froid qui inondent les champs et propagent les maladies.

Malgré les difficultés, mes collègues d’Action contre la Faim travaillent sans relâche pour aider la population de Gaza. Beaucoup d’entre eux ont également été déplacés et ont perdu leur maison, mais ils restent engagés dans leur travail.

Leur courage et leur dévouement sont une source d’inspiration pour moi.

En tant que femme travaillant dans l’humanitaire, je suis fière de faire partie de cette équipe. Je crois que les femmes jouent un rôle fondamental dans le travail humanitaire. Nous apportons une perspective différente, une sensibilité particulière pour comprendre les besoins des gens et une grande capacité d’empathie.

À Gaza, j’ai rencontré des femmes incroyables qui ont tout perdu, mais qui continuent de se battre pour leur famille et leur communauté. Ce sont des femmes fortes, résilientes et pleines d’espoir. Leur exemple me touche et me pousse à continuer à œuvrer pour un avenir meilleur à Gaza.

Aujourd’hui, à l’occasion de la Journée internationale de la femme, je tiens à leur rendre hommage. Leur solidarité nous donne la force d’aller de l’avant. Ensemble, nous pouvons faire la différence.

6 mars 2025 – Action Contre la Faim – Traduction : Chronique de Palestine