Par Leila Warah
Tous les hôpitaux de la ville de Gaza sont désormais hors service, car l’attaque israélienne contre les systèmes de santé se poursuivent, obligeant le personnel médical à abandonner à leur sort leurs patients mourants, y compris les bébés prématurés.
Victimes :
- 11 078 Palestiniens tués, dont 4506 enfants, et 27 490 blessés à Gaza *
- 187 Palestiniens tués en Cisjordanie occupée et à Jérusalem-Est
* Le nombre de victimes à Gaza n’a pas été mis à jour depuis au moins trois jours, car « l’effondrement des services et des communications » a rendu presque impossible pour le ministère de la santé de documenter et de mettre à jour les nombres des victimes.
Principaux développements :
- Tous les hôpitaux de la ville de Gaza sont hors service, selon le ministère palestinien de la santé.
- Trois infirmières tuées à l’hôpital Al-Shifa de Gaza, selon l’ONU.
- Au moins 192 membres du personnel médical ont été tués dans les attaques israéliennes sur Gaza depuis le 7 octobre, selon le ministère de la santé de Gaza.
- Israël oblige les médecins à abandonner les patients de l’hôpital pour enfants Al-Nasr.
- Les équipes médicales ne sont pas en mesure d’enterrer les 100 corps qui ont commencé à se décomposer dans la cour de l’hôpital al-Shifa, mettant ainsi en danger la santé des patients, déclare le ministère palestinien de la santé.
- Au moins six bébés prématurés et neuf patients sont morts ces derniers jours, selon le ministère de la santé de Gaza.
Les systèmes de santé du nord de la bande de Gaza se sont effondrés
L’invasion terrestre d’Israël dans le nord de la bande de Gaza a continué à s’étendre et à s’intensifier, forçant de nombreux civils encore présents dans le nord à se sauver vers le sud de l’enclave assiégée.
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a qualifié l’évacuation de milliers de civils de tous âges de « précaire et peu sûre ».
« Des hommes, des femmes et des enfants, brandissant des drapeaux blancs, marchent sur des kilomètres en passant devant des cadavres gisant dans les rues et dépourvus des produits de première nécessité comme la nourriture et l’eau », a déclaré l’organisation dans un communiqué dimanche.
« La zone sud n’est pas équipée pour répondre au nombre massif de personnes arrivant avec rien d’autre que les vêtements qu’elles portent, et la quantité d’aide humanitaire qui arrive est largement insuffisante. »
Pendant ce temps, de nombreuses personnes sont toujours bloquées dans les hôpitaux du nord, qui sont maintenant tous hors service, incapables d’être évacuées en raison de leur situation médicale, notamment des handicaps et des blessures graves.
L’hôpital Al-Shifa compte encore environ 650 patients, 500 travailleurs de la santé et environ 2500 personnes déplacées dans l’enceinte de l’hôpital, a déclaré Muhammad Zaqout, directeur des hôpitaux de Gaza, à Al Jazeera.
Al-Shifa est soumis à un siège militaire imposé par les tireurs d’élite et les chars israéliens depuis vendredi et a été déclaré « complètement hors service » dimanche.
Au cours des trois derniers jours, le porte-parole du ministère palestinien de la santé, Ashraf Al Qidra, a déclaré à Al Jazeera qu’au moins 32 patients de l’hôpital étaient décédés, un nombre qui devrait augmenter si aucun carburant et aucun soin de santé adéquat n’est autorisé à entrer dans Gaza.
Zaqout a ajouté qu’environ 200 familles sont également bloquées près de l’hôpital, n’étant pas autorisées à quitter leurs maisons. Pendant ce temps, une centaine de cadavres se décomposent dans la cour de l’hôpital.
« Nous avons demandé à pouvoir enterrer les corps, mais quiconque sort dans la cour de l’hôpital Al-Shifa se fait tirer dessus », a déclaré Zaqout.
Tout en annonçant l’arrêt imminent de l’unité de soins intensifs néonatals de l’hôpital Al-Shifa en raison du manque de carburant pour alimenter les couveuses, Medical Aid for Palestinians (MAP) a déclaré qu’elle « est profondément préoccupée par la couverture médiatique non critique de la déclaration de l’armée israélienne selon laquelle elle aidera à déplacer les bébés prématurés piégés à l’hôpital vers un ‘hôpital plus sûr’ ».
« La seule option sûre pour sauver ces bébés serait qu’Israël cesse son assaut et son siège d’al-Shifa, qu’il permette au carburant d’atteindre l’hôpital et qu’il fasse en sorte que les parents survivants de ces bébés puissent être réunis avec eux ».
De même, à l’hôpital pour enfants Al-Nasr, au nord de Gaza, Fadi Abu Riyala, un travailleur de la santé de MSF sur le terrain à Gaza, dit qu’il a été forcé d’abandonner ses patients et d’évacuer l’hôpital pour enfants Al-Nasr, au nord de Gaza.
« Dans l’unité de soins intensifs de l’hôpital pour enfants Al-Nasr, nous avons dû laisser les patients sur leur lit. Nous n’avons pu en emmener aucun avec nous. Il y a des patients dans la zone de réception, toujours vivants et respirant, et nous n’avons pas pu les emmener avec nous », a-t-il déclaré à Quds News Network.
Lorsqu’on lui a demandé si Israël avait prévu d’acheminer du carburant à Gaza pour alimenter les hôpitaux, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a éructé : « Nous venons d’offrir du carburant à l’hôpital Shifa, qui l’a refusé ».
Le Hamas a réagi en déclarant : « Cette offre minimise la douleur et la souffrance des patients qui sont piégés à l’intérieur, sans eau, sans nourriture et sans électricité. Cette quantité n’est pas suffisante pour faire fonctionner les générateurs des hôpitaux pendant plus de 30 minutes ».
Le groupe a également précisé qu’il n’était pas associé à la direction de l’hôpital Al-Shifa et qu’il ne faisait pas partie de ses structures décisionnelles.
Le directeur de l’hôpital Al-Shifa, Muhammad Abu Salmiya, a corroboré ces propos dans une interview accordée à Al Jazeera : « Des responsables israéliens m’ont contacté à deux reprises au sujet de la fourniture de carburant à l’hôpital : une fois pour offrir 2000 litres [440 gallons] et une autre fois pour offrir 300 litres [80 gallons]. Il faut savoir que l’hôpital a besoin de 8000 [2 113 gallons] à 12 000 litres [3 170 gallons] par jour ! »
« La même personne m’a appelé à 2 heures du matin et m’a dit que les 300 litres pouvaient être pris à un endroit précis, dangereux et susceptible d’être bombardé. Je lui ai dit de l’envoyer ou d’en envoyer une plus grande quantité pour que nous puissions faire fonctionner un générateur par l’intermédiaire de la Croix-Rouge ».
« Israël prétend montrer ainsi au monde qu’il ne tue pas de bébés. Il veut blanchir son image avec 300 litres de carburant, qui durent à peine 30 minutes », poursuit Abu Salmiya.
En ce qui concerne les hôpitaux de Gaza soumis aux tirs israéliens, le conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, Jake Sullivan, a déclaré à l’émission Face the Nation de CBS News : « Les États-Unis ne veulent pas voir d’échanges de tirs dans les hôpitaux où des innocents, des patients recevant des soins médicaux, sont pris entre deux feux, et nous avons eu des consultations actives avec [l’armée israélienne] à ce sujet », mais aucune garantie ou solution n’a encore été mise en place.
Les directeurs régionaux du FNUAP, de l’UNICEF et de l’OMS demandent que des mesures immédiates soient prises pour protéger les installations médicales à Gaza et mettre fin aux attaques d’Israël contre les systèmes de santé.
« Les attaques contre les installations médicales et les civils sont inacceptables et constituent une violation du droit international humanitaire et des conventions relatives aux droits de l’homme. Elles ne peuvent être tolérées. Le droit de demander une assistance médicale, en particulier en temps de crise, ne devrait jamais être refusé », ont déclaré les agences.
« Un accès sans entrave, sûr et durable est maintenant nécessaire pour fournir du carburant, des fournitures médicales et de l’eau pour ces services qui sauvent des vies. La violence doit cesser maintenant. »
Le Croissant-Rouge a indiqué que soixante-seize camions transportant de l’aide, notamment de la nourriture, de l’eau, des fournitures médicales et des médicaments, étaient entrés dans la bande de Gaza dimanche par le point de passage de Rafah, ce qui est encore loin d’être suffisant pour une population de plus de 2 millions d’habitants.
Avant les attaques israéliennes, la bande de Gaza recevait plus de 500 camions d’aide par jour. Depuis, elle en a reçu 980 au total.
Cisjordanie occupée : un Palestinien âgé tué
En Cisjordanie occupée, les Palestiniens continuent d’être tués à un rythme alarmant et en toute impunité, tandis que le monde se concentre sur les atrocités commises par Israël à Gaza.
Lundi matin, les forces israéliennes ont tiré sur un vieil homme palestinien qui conduisait sa voiture près de la Société caritative islamique pour le soin des orphelins à Hébron, alors que l’armée effectuait un raid, a rapporté Wafa.
L’armée a également mené plusieurs autres raids dans le territoire occupé, arrêtant plus de 50 Palestiniens, la plupart d’entre eux étant concentrés dans les gouvernorats de Jérusalem, Ramallah et Hébron.
Les forces israéliennes ont tué 187 Palestiniens depuis le 7 octobre, dont trente dans la seule ville de Jénine, au nord de la Cisjordanie.
Kamal Abu al-Rub, gouverneur par intérim de Jénine, a déclaré à Al Jazeera qu’Israël attaquait quotidiennement la ville et son camp de réfugiés, la transformant en un troisième front après Gaza et le Liban.
« Les raids successifs sur la ville de Jénine, son camp et les villages environnants, le ciblage des civils et des ambulanciers, les fermetures de routes et les attaques contre les mosquées indiquent qu’Israël est en train de se venger. »
Selon Médecins sans frontières (MSF), les urgentistes de Jénine ont été appelés à l’hôpital public presque chaque nuit, alors que les incursions militaires israéliennes utilisant des chars et des troupes au sol s’abattent sur la ville.
Abu al-Rub explique que les habitants craignent qu’Israël ne mène une opération d’envergure « dans les prochains jours, étant donné que le monde est préoccupé par l’agression en cours dans la bande de Gaza et qu’il garde le silence sur ce qui se passe dans cette région et en Cisjordanie ».
MSF rapporte qu’au moins 30 Palestiniens ont été tués et 162 blessés depuis le 7 octobre à Jénine, soulignant que certains de ces décès auraient pu être évités si l’armée israélienne n’avait pas bloqué l’aide médicale aux blessés.
« Les forces israéliennes bloquent souvent l’entrée du camp, ce qui rend presque impossible l’entrée et la sortie des ambulances avec les blessés graves à temps pour leur sauver la vie », note l’organisation.
Auteur : Leila Warah
13 novembre 2023 – Mondoweiss – Traduction : Chronique de Palestine