Par Philippe Alain
L’état d’urgence a été instauré par le gouvernement Valls le 14 novembre 2015 suite à l’attentat du Bataclan. Prolongé systématiquement depuis cette date, il permet en particulier au préfet, sans aucun contrôle du juge, de procéder à des perquisitions, d’assigner à résidence mais aussi de fermer des sites Internet, d’interdire des manifestations, de dissoudre des associations… Bref toute la panoplie de la parfaite petite dictature digne de la Corée du Nord.
Les médias tout puissants, relais officiels de la propagande d’Etat, nous ont longtemps expliqué qu’il s’agissait de mesures provisoires visant à lutter contre le terrorisme. Ah bon ?
Prenons les assignations à résidence par exemple. Cette mesure permet aux préfets d’assigner à résidence toute personne: “dont son comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre public”. Et comment le préfet sait-il qu’une personne constitue une menace pour la sécurité et l’ordre public ? Une boule de cristal ? Bingo, presque. Généralement le préfet est informé par une note blanche des service de renseignements, notre Stasi bleu-blanc-rouge.
La note blanche ne possède pas d’en-tête, elle n’est pas datée, pas signée et ne comporte même pas de référence. Depuis le décret royal, on n’a pas trouvé mieux pour décider du sort d’un citoyen en le privant de toute liberté.
Alors vous vous dites, quel outil fantastique contre les candidats terroristes dont on soupçonne qu’ils pourraient un jour passer à l’acte mais dont on n’est pas sûr… Dans le doute aller hop, on les assigne tous.
Le premier problème c’est que l’assignation à résidence ne garantit en rien que la personne ne passera pas à l’acte. il suffit juste pour cela qu’elle ne rende pas à son contrôle judiciaire et qu’elle disparaisse dans la nature.
Le second problème c’est que l’assignation à résidence n’est pas utilisée uniquement contre les terroristes. Elle est également utilisée contre les opposants politiques comme les militants écologistes qui ont été perquisitionnés et assignés à résidence juste avant la COP 21 en novembre 2015.
Si on se souvient des interdictions de manifester qui touchaient les manifestants contre la loi travail quand ce n’étaient pas les manifestations elles-mêmes qui étaient interdites, on commence à comprendre le véritable objectif de tout cela.
Une des premières mesures du gouvernement Macron consiste à casser définitivement le code du travail en allant encore plus loin que la loi El-Khomri. Même le PS ou du moins ce qu’il en reste s’en indigne, c’est pour dire.
Et bien demain, Niet, Nada, Verboten. On nous interdira de manifester contre la loi travail au nom du risque de trouble à l’ordre public. Ca y est, vous avez compris ?
Vous avez encore un doute sur le caractère liberticide de ce projet de loi ? Et bien lisez l’article L228-4 qui indique que « le ministre de l’intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République de Paris faire obligation à toute (personne ciblée par l’autorité administrative) de déclarer ses identifiants de tout moyen de communication électronique dont elle dispose ou qu’elle utilise, ainsi que tout changement d’identifiant ou tout nouvel identifiant ».
Quoi ? Comment ? Un préfet peut vous obliger à déclarer vos identifiants Internet comme ça ? Simplement parce qu’il a des raisons de penser que, peut-être, votre comportement peut présenter une menace pour l’ordre public ? Et oui, vous avez maintenant tout compris. La France, patrie autoproclamée des droits de l’homme va devenir la patrie des non droits de l’homme. Qui que vous soyez, où que vous soyez Big Brother vous suivra à la trace et saura tout sur vous. Ils auront accès à votre boîte mail, votre compte Twitter, votre compte Facebook…
Alors bien sur, quelques personnes ont vu l’escroquerie qui se profile et commencent à se manifester. L’Union Syndicale des Magistrats par exemple vient de publier un communiqué de presse dans lequel elle dénonce la mise en place d’un “Etat policier”. (1)
Elle souligne en particulier l’absence de tout contrôle par les juges et conclue que: “dans un Etat démocratique, sortir de l’état d’urgence ne signifie pas introduire dans le droit commun des mesures d’exceptions et exclure le contrôle de l’autorité judiciaire.”
La Ligue des Droits de l’Homme, elle, rappelle que “loin de ne concerner que les actes de terrorisme, ces mesures s’appliqueraient indifféremment à une large gamme de délits. Chacun pourrait alors être victime de cet arbitraire. Aujourd’hui déjà, nous voyons des dispositions inscrites dans l’état d’urgence utilisées contre des militants associatifs, syndicaux ou politiques.” (2)
L’indifférence générale des Français devant ces mesures liberticides en dit long sur l’état de notre pays. Dans l’ère assumée du chacun pour soi, la plupart des sujets du Roi Macron se disent que cela ne les concerne pas et ne les concernera jamais. L’égoïsme de chacun est aujourd’hui devenu officiellement l’un des principaux piliers de notre démocratie moribonde.
Le 21 décembre 2016, à l’occasion d’une nième prolongation de l’état d’urgence, la France a écrit au Conseil de l’Europe pour le prévenir qu’elle allait continuer à violer la Convention Européenne des Droits de l’Homme en raison de la “persistance de la menace terroriste”. Avec l’Ukraine et la Turquie, la France est le 3ème pays qui déroge ainsi à la CEDH.
Demain, la loi permettra donc de mettre en œuvre des mesures de violation des libertés fondamentales contre toute personne “à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics”, c’est-à-dire vous ou moi pour peu qu’on ne la ferme pas suffisamment.
Après chaque attentat, on nous explique pourtant que c’est notre mode de vie que les terroristes veulent détruire, nos valeurs et surtout notre liberté. Avec cette loi Macron liberticide, la victoire des terroristes sera totale. Au nom de la préservation de nos libertés, on nous prive de nos libertés publiques et individuelles. Elle est pas belle l’hypocrisie de nos dirigeants ?
Dimanche, la France va voter pour donner à Macron une majorité afin de mettre en oeuvre ses projets de saccage de nos libertés fondamentales. Dans quelques mois, ce sera la gueule de bois quand ils se rendront compte qu’à défaut d’une République en marche, c’est une Dictature en marche qu’ils viennent de porter au pouvoir.
Notes:
(1) http://www.union-syndicale-magistrats.org/web2/fr/vers-etat-policier-_news_1053
(2) http://www.ldh-france.org/president-republique-gouvernement-cocktail-risques-les-libertes/
10 juin 2017 – I am Spartacus – Communiqué par l’auteur