Gaza : massacrer ou faire mourir de faim les survivants

6 novembre 2024 - Des Palestiniens tentent de sauver des victimes du bombardement israélien de la maison de la famille Al-Sana' dans le camp de réfugiés de Nuseirat, au centre de Gaza. L'assaut génocidaire israélien en cours à Gaza a tué au moins 43 391 Palestiniens, et des milliers d'autres sont toujours portés disparus - Photo : Yousef al-Zanoun / Activestills

Par Tareq S. Hajjaj

En un mois de massacres ininterrompus, on estime que l’armée israélienne a procédé à un nettoyage ethnique de quelque 100 000 personnes hors du nord de Gaza. Ceux qui restent sont affamés et exterminés.

Depuis que l’armée israélienne a lancé son assaut sur le nord de Gaza le 5 octobre dernier, il est devenu clair qu’Israël a mis en œuvre le ainsi nommé « Plan des Généraux », une proposition avancée par un groupe de hauts responsables militaires israéliens reprenant la vision génocidaire du général israélien à la retraite Giora Eiland.

Au cours des premiers mois de la guerre contre Gaza, Eiland a écrit un éditorial affirmant que le gouvernorat du nord de la bande de Gaza – la zone au nord de la ville de Gaza comprenant Jabalia, Beit Lahia et Beit Hanoun – devrait être vidé de tous ses civils par des déplacements massifs et une famine délibérée.

Tous ceux qui resteraient seraient alors considérés comme des combattants ennemis et seraient soit exterminés, soit affamés, car Eiland a déclaré qu’aucune nourriture ou aide humanitaire ne devra être autorisée à entrer dans le nord de Gaza.

Deux semaines avant le début de l’invasion israélienne du gouvernorat du nord, Netanyahu aurait rencontré des députés israéliens et leur aurait dit qu’il envisageait d’appliquer le plan des généraux. Alors que l’opération nord commençait le 5 octobre, il semblait que la vision d’Eiland était en train d’être mise en œuvre.

L’assaut israélien s’est concentré sur le camp de réfugiés de Jabalia, dont c’est la troisième invasion depuis le début de la guerre, ainsi que sur les villes de Beit Lahia et Beit Hanoun.

Ces zones ont été le théâtre de bombardements incessants, d’arrestations massives, d’exécutions sommaires, de traitements dégradants et inhumains, de déplacements forcés à grande échelle et d’attaques systématiques contre les hôpitaux, selon de nombreux témoignages recueillis par Mondoweiss au cours du mois dernier.

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Des centaines de civils ont été tués dans leurs maisons, tandis que l’armée israélienne est allée de maison en maison et a rassemblé les habitants de Jabalia, séparant les hommes, les femmes et les enfants en trois groupes et les forçant à descendre dans des fosses creusées par les bulldozers de l’armée.

L’armée en arrête certains, en exécute d’autres sur place et déporte les autres, ont déclaré des témoins directs à Mondoweiss. Un nombre indéterminé d’hommes ont été arrêtés ou tués dans des circonstances qui n’ont pas encore été précisément décrites.

L’armée israélienne détruit également le système de santé dans le nord, en empêchant l’entrée de nourriture et de médicaments et en ciblant délibérément les équipes de secours et les premiers intervenants.

Les forces israéliennes ont vidé l’hôpital Kamal Adwan de Beit Lahia, kidnappant la quasi-totalité de son personnel médical et ne laissant qu’une poignée de médecins pour s’occuper des malades.

Au début de l’invasion du nord de la bande de Gaza, les organisations d’aide et de secours appelaient le monde à sauver 200 000 civils assiégés par l’armée israélienne dans le nord, qui les bombarde partout et empêche les équipes de secours de les atteindre.

Les nouvelles déclarations des équipes de secours appellent désormais le monde à sauver les 100 000 personnes restées dans le nord. En d’autres termes, en un mois de massacres continus, l’armée israélienne aurait procédé à un nettoyage ethnique de quelque 100 000 personnes dans le nord de la bande de Gaza. Ces chiffres sont des estimations de la défense civile de Gaza.

La majorité des personnes déplacées se sont installées dans la ville de Gaza, juste au sud du gouvernorat du nord du territoire. « Il y avait environ 100 000 citoyens dans le nord de la bande de Gaza… maintenant, il reste environ 80 000 personnes. Ce nombre continue de diminuer avec les tueries et les bombardements », explique Mahmoud Basal, porte-parole de la défense civile de Gaza, à Mondoweiss.

« Ceux qui restent sont en danger immédiat. Depuis près d’un mois, ils n’ont ni eau, ni nourriture, ni médicaments. » « Comme on empêche nos équipes de travailler et d’utiliser les véhicules et le matériel, nous ne pouvons pas faire notre travail », poursuit M. Basal. « Le seul sort qui attend les habitants du nord de la bande de Gaza est la mort. »

La défense civile de Gaza a publié ces chiffres comme une estimation basée sur le mouvement des personnes déplacées de différentes zones du nord. La dernière estimation date du jeudi 7 novembre, lorsque des ordres d’évacuation ont été envoyés à des quartiers entiers, y compris les quartiers al-Shimaa et al-Amal à Beit Lahia.

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Basal souligne que les chiffres sont basés sur le nombre de tentes et de personnes déplacées dans la ville de Gaza, ainsi que sur le nombre de personnes arrivées par la rue Salah al-Din, la route principale de la bande qui relie le nord de Gaza au sud.

Quelle est la suite de l’opération au nord de Gaza ?

Le Jerusalem Post a affirmé que la 162e division de l’armée israélienne avait « fini de démanteler complètement les trois bataillons du Hamas » dans le camp de réfugiés de Jabalia, affirmant, sans la moindre preuve, avoir tué plus de 1000 combattants et en avoir arrêté 500 autres.

Les personnes déplacées du nord de Gaza attendent la fin de l’opération militaire pour pouvoir rentrer chez elles, mais des déclarations récentes de l’armée israélienne indiquent que les Palestiniens ne seront pas autorisés à rentrer chez eux et que l’armée israélienne restera dans le nord.

Ces déclarations indiquent que l’armée israélienne poursuit son plan visant à vider complètement le nord de la bande de Gaza de ses habitants.

Lors d’un briefing mardi soir, le porte-parole de l’armée israélienne, Yitzhak Cohen, a déclaré aux journalistes israéliens qu’étant donné que les soldats israéliens avaient déjà pénétré dans des zones telles que le camp de réfugiés de Jabalia tout au long de la guerre, « il n’est pas question de permettre aux habitants du nord de Gaza de rentrer chez eux », comme le rapporte The Guardian.

Le porte-parole a ajouté qu’aucune aide humanitaire ne serait plus autorisée dans le nord puisqu’il n’y a « plus de civils ». Le Guardian rapporte qu’un autre porte-parole de l’armée a précisé que les commentaires de M. Cohen « avaient été sortis de leur contexte ».

Ces déclarations sont le premier aveu israélien que l’armée israélienne occupera le nord de la bande de Gaza de manière permanente et empêchera le retour des résidents palestiniens.

Le mois dernier, les Nations unies ont estimé que quelque 400 000 civils ne pouvaient ou ne voulaient pas se conformer aux ordres d’évacuation israéliens. L’armée continuant à opérer dans le nord, les quelque 80 000 habitants de cette région sont menacés d’extermination.

« Depuis environ un mois, l’armée d’occupation assiège complètement le gouvernorat du nord, y compris Jabalia, Beit Lahia et Beit Hanoun, et impose un siège étouffant à ses habitants », a déclaré Mahmoud Basal.

« Aujourd’hui, le plan des généraux visant à vider le nord de la bande de Gaza est en train d’être mis en œuvre. C’est ce qui ressort clairement des scènes qui se déroulent dans le nord de la bande de Gaza », a ajouté M. Basal.

8 novembre 2024 – Mondoweiss – Traduction : Chronique de Palestine