Par Abdel Bari Atwan
Le président américain Donald Trump a révélé ses véritables intentions mercredi lorsqu’il a publiquement refusé de s’engager à un transfert pacifique du pouvoir s’il devait perdre les prochaines élections. “Nous allons devoir voir ce qui se passera”, a-t-il déclaré, ajoutant “il n’y aura pas de transfert, franchement, il y aura une continuation”.
M. Trump veut devenir président à vie et établir effectivement une dictature aux États-Unis qui ne soit pas très différente de celles auxquelles il prétend s’opposer dans le reste du monde. Cela explique peut-être son engouement pour les despotes arabes, en particulier les familles dirigeantes des États du Golfe.
Les remarques de Trump ne signifient pas seulement qu’il n’acceptera pas nécessairement les résultats des élections. Elles reviennent également à inciter certains secteurs parmi ses soutiens, en particulier les racistes blancs, à descendre dans la rue pour protester violemment si les résultats des élections ne vont pas dans son sens et sont prétendues – comme il l’a déjà prédit – avoir été piégées.
Les 40 jours qui nous séparent des élections du 3 novembre seront cruciaux non seulement pour les États-Unis et leur sécurité, leur stabilité et leur unité, mais aussi pour le reste du monde. Car personne ne peut prédire ce que ce voyou va faire ensuite.
Le transfert pacifique du pouvoir, basé sur le respect du verdict des urnes, est la pierre angulaire de toute démocratie. Refuser d’adhérer à ce principe est une recette pour l’anarchie, les conflits civils, l’effondrement du système fédéral et la plongée du pays dans une mer de sang et de chaos.
Le niveau de tension sociale et raciale aux États-Unis n’a jamais été aussi élevé et continue à augmenter. C’est pourquoi plus de 480 responsables de la sécurité nationale des États-Unis, sous la direction du général à la retraite Paul Selva – ancien vice-président de l’état-major interarmées et l’un des plus hauts conseillers militaires de Trump – se sont prononcés en faveur du candidat démocrate Joe Biden comme prochain président.
Ils ont convenu que “le président actuel a démontré qu’il n’est pas à la hauteur des énormes responsabilités de sa fonction ; il ne peut pas relever les défis, petits ou grands. A cause de son attitude dédaigneuse et à ses échecs, nos alliés ne nous font plus confiance ni ne nous respectent, et nos ennemis ne nous craignent plus”.
Trump est aux abois. Il se sent plus déprimé et vaincu que n’importe quel autre président américain, et il pourrait décider n’importe quoi dans n’importe quelle direction. Personne ne peut prédire quelles mesures désastreuses il pourrait alors prendre.
Il ne craint pas de perdre sa crédibilité parce qu’il n’en a plus. Il est méprisé dans le monde entier – y compris par certains dirigeants du Golfe qui prétendent l’adorer. En fait, ils tremblent de peur devant lui : ils lui ont versé à la pelle des centaines de milliards de dollars en réponse à ses diktats, et pour l’apaiser, ils ont même vendu leur honneur national et leur respect d’eux-mêmes en normalisant les relations avec l’État d’occupation israélien.
Les 40 prochains jours sont particulièrement cruciaux pour le Moyen-Orient, notamment pour les États du Golfe. La région pourrait se trouver transformée en champ de bataille d’une guerre de destruction massive déclenchée par Trump contre l’Iran – visant à rallier ses partisans derrière lui en tant que leader fort assurant la puissance américaine et le leadership mondial, ou à créer une situation d’urgence pour obtenir le report des élections.
Le Washington Post a documenté 20 000 mensonges établis de Trump depuis son entrée en fonction, dont environ 1000 liés au seul coronavirus. Le plus inquiétant de ces mensonges est sans doute ses récents tweets affirmant que l’Iran est à quelques mois de produire des armes nucléaires et promettant qu’il ne permettra jamais que cela se produise.
L’évocation d’une attaque sans retenue contre l’Iran par le roi Salman d’Arabie Saoudite dans son discours enregistré à l’Assemblée générale des Nations unies, va dans cette direction. Salman a accusé l’Iran de déstabiliser et de terroriser toute la région et a appelé le monde à s’unir contre lui, comme s’il préparait l’opinion publique à une telle guerre et à ses conséquences, et à la participation de l’Arabie saoudite d’une manière ou d’une autre.
Trump utilisera tous les moyens à sa disposition pour rester à la Maison Blanche, et pour cela il bénéficie du soutien enthousiaste du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et de son puissant réseau de groupes d’intérêts pro-sionistes et de leurs partisans aux États-Unis et ailleurs. Il s’agite aujourd’hui dans tous les sens comme une bête blessée.
Cela peut satisfaire ses pulsions et celles de ses partisans racistes, mais cela pourrait finalement aboutir à la destruction des États-Unis, tout comme Hitler a causé la destruction et la division de l’Allemagne, unissant la majeure partie du monde contre elle.
Cela semble apocalyptique ? Nous ne pouvons qu’attendre et voir.
* Abdel Bari Atwan est le rédacteur en chef du journal numérique Rai al-Yaoum. Il est l’auteur de L’histoire secrète d’al-Qaïda, de ses mémoires, A Country of Words, et d’Al-Qaida : la nouvelle génération. Vous pouvez le suivre sur Twitter : @abdelbariatwan
24 septembre 2020 – Raï al-Yaoum – Traduction : Chronique de Palestine – Lotfallah