Les Israéliens ont-ils les moyens de réenclencher une guerre sur tous les fronts ?

30 janvier 2025 - Des combattants de la résistance armée palestinienne remettent le prisonnier israélien Arbel Yehud à Khan Yunis, dans le sud de Gaza, devant les restes de la maison détruite de l'ancien dirigeant du Hamas Yahya Sinwar, assassiné l'année dernière. Une foule nombreuse se rassemble pour saluer les forces de la résistance et assister à la cérémonie de remise, au cours de laquelle huit prisonniers, trois Israéliens et cinq Thaïlandais, ont été libérés en échange de 110 prisonniers palestiniens, dont 30 enfants, dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu. Environ 14 000 prisonniers palestiniens sont détenus dans les geôles israéliennes, soumis aux mauvias traitements dont la torture et la négligence médicale. Un tiers d'entre eux sont en détention administrative, c'est-à-dire détenus sans aucune accusation - Photo : Yousef al-Zanoun / Activestills

Par Ramzy Baroud

« Une année de combat » : c’est ainsi que le nouveau chef d’état-major israélien, Eyal Zamir, a décrit l’année 2025 lors d’une conférence organisée par le ministère israélien de la Défense.

La formulation exacte, traduite de l’hébreu, était la suivante : « L’année 2025 continuera d’être une année de combat ». Le mot « continuer » est crucial, suggérant qu’Israël reprendra ses guerres, malgré les accords de cessez-le-feu signés avec le gouvernement libanais en novembre et les groupes palestiniens en janvier.

En d’autres termes, il semble que Zamir signale qu’Israël rouvrira ces deux fronts, même face à des accords de cessez-le-feu.

Malgré l’appétit insatiable d’Israël pour la guerre, il est difficile d’imaginer ce que l’armée israélienne pourrait accomplir par une reprise de la violence alors qu’elle n’a déjà pas réussi à atteindre ses objectifs en près de 14 mois au Liban et plus de 15 mois à Gaza.

Israël a lancé des milliers de frappes aériennes sur le Liban, détruisant des villes et des villages entiers et tuant et blessant des milliers de personnes. Il a également largué des bombes sur Gaza, faisant plus de 170 000 morts et blessés et provoquant un génocide sans précédent.

Malgré cela, Israël a échoué sur les deux fronts.

Nazisme 2.0

À Gaza, comme l’a rapporté Reuters, le Hamas a réussi à recruter à lui seul jusqu’à 15 000 combattants juste avant la fin du 471e jour d’une guerre sans merci.

En outre, le retour de près d’un million de Palestiniens dans le nord de Gaza a remis en question les prétendues réussites tactiques ou stratégiques d’Israël.

Ces actions génocidaires, visant à dépeupler le nord de Gaza pour créer des zones tampons militaires permanentes, ont été rendues caduques par le retour de la population.

La guerre a également coûté très cher à l’armée israélienne. Ironiquement, lors de la même conférence du ministère de la Défense, Zamir a révélé les coûts réels des guerres menées par Israël au cours de l’année écoulée.

Il a avoué que le ministère « prend désormais en charge 5942 nouveaux membres de familles endeuillées », ajoutant que « le département de réadaptation a accueilli plus de 15 000 militaires blessés, dont beaucoup portent des séquelles physiques et mentales de la guerre ».

Ces chiffres n’étaient pas ventilés par catégorie ou par front de guerre et n’incluaient pas les victimes du 7 octobre 2023 à la fin de l’année. Cependant, ils représentent l’estimation la plus élevée des victimes israéliennes fournie à ce jour, ce qui soulève la question suivante : Israël peut-il se permettre de retourner en guerre ?

L’ancien ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, qui a été démis de ses fonctions par le Premier ministre Benjamin Netanyahu le 5 novembre, a donné des indices sur la crise militaire en Israël lors d’une interview accordée à la chaîne 12. Gallant s’est souvenu d’une conversation qu’il avait eue avec Netanyahu après l’assaut du Hamas sur la bande de Gaza, dans le sud d’Israël.

« Le Premier ministre m’a dit que nous verrions des milliers de morts dans l’offensive à Gaza. Je lui ai répondu : nous ne verrons pas des milliers de morts », a déclaré Gallant.

Les chiffres de Zamir ont cependant validé les estimations de Netanyahu, et non celles de Gallant.

Netanyahu craignait également que « le Hezbollah détruise tout si nous le frappions », en référence à la ville de Tel Aviv. Bien que cette prédiction ne se soit pas entièrement réalisée, l’impasse au Liban garantit qu’Israël restera hanté par des craintes similaires.

Alors, 2025 sera-t-elle une année de combat pour Israël ?

Netanyahu est confronté à un double défi : si tous les fronts de guerre prennent officiellement fin, son gouvernement s’effondrera ; mais s’il retourne à la guerre active, il ne remportera aucune victoire décisive.

Il est possible que la doctrine de l’« année de combat » de Zamir vise à sauver la face, en projetant une force sans rouvrir de grands fronts de guerre. Israël pourrait continuer à créer des crises à Gaza et au Liban sans s’engager pleinement dans la guerre, peut-être en retardant les retraits prévus, en ajoutant de nouvelles exigences, etc…

Mais cela pourrait ne pas suffire à Netanyahu pour rester au pouvoir, surtout face à un mécontentement grandissant. C’est là qu’intervient le Mur de fer, l’opération militaire en cours en Cisjordanie.

Bien qu’Israël ait lancé de nombreux raids en Cisjordanie, la campagne du 21 janvier était directement liée à la guerre à Gaza. Elle a commencé deux jours après le dernier cessez-le-feu, signalant qu’un important déploiement de forces israéliennes en Cisjordanie était destiné à compenser la réduction des combats à Gaza.

Elle a également servi à détourner l’attention du sentiment d’échec d’Israël à Gaza, tel que décrit par le ministre israélien de la Sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir, qui a quitté la coalition de Netanyahu le 19 janvier.

L’État génocidaire tourne maintenant le maximum de sa violence vers la Cisjordanie

La guerre en Cisjordanie, centrée sur le camp de réfugiés de Jénine, a utilisé des tactiques similaires à celles employées à Gaza.

Des dizaines de milliers de personnes ont été déplacées de Jénine, Tulkarem et d’autres régions du nord de la Cisjordanie ; des centaines ont été tuées ou blessées et ont vu leurs maisons détruites.

L’armée israélienne semble tenter de compenser son échec dans le nettoyage ethnique de Gaza en déplaçant des communautés entières en Cisjordanie.

Si Israël persiste à faire de 2025 une « année de combat » centrée sur la Cisjordanie, les conséquences pourraient être désastreuses, en particulier pour une armée qui a déjà subi des pertes sans précédent sur plusieurs fronts.

Si Israël continue sur cette voie, un soulèvement généralisé pourrait devenir imminent, et de nouveaux fronts inattendus pourraient s’ouvrir simultanément.

Il faut freiner Israël. Il se comporte comme un monstre blessé et, ce faisant, il continue de tuer des Palestiniens au nom de sa prétendue sécurité tout en déstabilisant l’ensemble du Moyen-Orient.

Il faut stopper Netanyahu.

10 février 2025 – Middle-East-Monitor – Traduction : Chronique de Palestine – Lotfallah

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