La garde nationale israélienne est une machine à opprimer et tuer les Palestiniens

9 décembre 2022 - Des Palestiniens en pleurs portent le corps de Diaa Al Rimawi - âgé de 16 ans et assassiné par les forces israéliennes la veille - lors de ses funérailles dans le village cisjordanien de Beit Rima, à l'ouest de Ramallah. Plusieurs jeunes ont été blessés par les forces coloniales israéliennes pendant les funérailles - Photo : Oren Ziv / Activestills

Par Ahmed Omar

En mars 2023, après des mois de protestations contre la réforme judiciaire contestée de Benjamin Netanyahu, Israël a donné au ministre de la sécurité nationale – le fasciste Itamar Ben-Gvir – le feu vert pour créer une garde nationale.

Cette force, qui sera composée de 1800 agents au départ et dont le budget de fonctionnement s’élève à un milliard de NIS (soit 273 millions de dollars US), aura pour mission principale d’aider la police israélienne dans les situations d’urgence liées à la « sécurité ». L’approbation du projet de constitution d’une garde nationale a suscité une large opposition, allant d’un ancien chef de la police israélienne aux organisations palestiniennes de défense des droits de l’homme.

Contrairement aux autres forces israéliennes, la garde nationale est conçue principalement pour cibler les citoyens palestiniens d’Israël.

Cette note politique examine la mise sur pied de la garde nationale afin de comprendre ses implications pour les citoyens palestiniens d’Israël. Elle propose aussi des recommandations aux parties prenantes concernées sur la manière de s’opposer à cette nouvelle force et de protéger les Palestiniens.

Pourquoi une garde nationale ?

L’appel à la création d’une garde nationale trouve son origine dans l’Intifada de l’unité palestinienne.

À la suite de l’assaut israélien contre les fidèles palestiniens de la mosquée al-Aqsa et du bombardement de Gaza en mai 2021, des milliers de citoyens palestiniens d’Israël ont protesté dans les villes des territoires de 1948.

Ces manifestations ont donné lieu à des flambées de violence et à des attaques ciblées contre les Palestiniens, en particulier dans les villes où la présence palestinienne est la plus importante.

Pour Israël, le caractère généralisé et continu du soulèvement a nécessité une réponse dépassant les capacités de sa police.

Afin d’étouffer la mobilisation et la résistance palestiniennes dans l’avenir, et sans épuiser les ressources existantes, le Premier ministre de l’époque, Naftali Bennett, avait annoncé la création de la garde nationale israélienne en juin 2022.

Toutefois, en raison de l’instabilité du gouvernement et des contraintes budgétaires, la création de cette garde avait été retardée jusqu’au début de l’année 2023.

En avril, le nouveau gouvernement israélien a approuvé la création de la garde nationale dans le cadre d’un compromis avec Ben-Gvir en échange de son soutien à la suspension de la réforme judiciaire prévue.

Implications pour les citoyens palestiniens de la Palestine de 1948

Alors que la proposition initiale de Bennett prévoyait que la garde nationale fasse partie de la police des frontières israélienne, la version approuvée tombera directement sous la supervision du bureau de Ben-Gvir.

Composée de milliers de policiers et de civils volontaires, la garde nationale aura pour mission de soutenir l’engagement de longue date de Ben-Gvir en faveur de l’assujettissement et de l’effacement des Palestiniens.

Les positions anti-palestiniennes de Ben-Gvir sont bien connues et documentées. Le ministre de la sécurité nationale a été condamné en 2007 pour incitation au racisme et soutien au groupe terroriste kahaniste Kach, qui prône le nettoyage ethnique des Palestiniens.

Depuis son entrée au gouvernement en 2022, M. Ben-Gvir a défendu des motions visant à imposer la peine de mort aux Palestiniens, à augmenter considérablement le nombre de permis de port d’arme pour les Israéliens juifs, à accorder l’immunité aux soldats et aux policiers israéliens contre les procès et les enquêtes, et à élargir le champ d’application de la loi dite « Dromi », qui légalise l’ « autodéfense » violente des biens.

Bien que la compétence de la garde nationale n’ait pas encore été officiellement définie, il est clair que la force s’attachera principalement à cibler les citoyens palestiniens d’Israël [Palestine de 48].

En tant que ministre de la sécurité nationale, M. Ben-Gvir est notamment chargé du ministère du développement du Néguev et de la Galilée, des régions qu’il a qualifiées de problèmes de sécurité et d’ « anarchie totale » en raison de l’importance de la population palestinienne qui y vit.

Lors de sa campagne électorale en 2022, il s’est engagé à rétablir la dite « sécurité » dans le Néguev et en Galilée.

Avec la garde nationale, Ben Gvir espère y parvenir. Probablement lourdement armée – avec des armes et des outils de surveillance – la garde nationale sera utilisée pour dissuader et disperser violemment la mobilisation palestinienne dans les territoires de 1948.

À court terme, la garde nationale israélienne sera sans aucun doute déployée pour faciliter l’arrestation arbitraire, le harcèlement, l’agression et la criminalisation des citoyens palestiniens à un rythme exponentiel.

À long terme, la garde nationale menace de perturber la cohésion de la communauté palestinienne et d’institutionnaliser davantage le système d’apartheid israélien.

L’augmentation des taux d’arrestation et de détention ne fera que rendre les Palestiniens plus vulnérables aux politiques discriminatoires d’Israël, y compris les démolitions punitives de maisons, l’expulsion par la déportation et la perte de la nationalité.

Recommandations

Afin de contrecarrer le projet de garde nationale israélienne, les mesures suivantes doivent être prises :

  • Les Palestiniens et leurs soutiens doivent coordonner des campagnes spécifiques appelant à des sanctions contre Ben-Gvir et exigeant la fin de son impunité.
  • Les groupes de la société civile, les militants et tous leurs soutiens doivent suivre le leadership des organisations palestiniennes dans les territoires de 1948 et faire prendre conscience de ce que sera la garde nationale, par des campagnes qui la dénoncent, ainsi que ses dirigeants, pour leur racisme flagrant, leur discrimination et leur violence.
  • Les Palestiniens de toute la Palestine doivent multiplier les efforts pour défier la fragmentation imposées par Israël et s’engager dans une organisation coordonnée et stratégique.
  • Les soutiens et les décideurs politiques doivent reconnaître que le système d’apartheid israélien s’étend « du fleuve à la mer » et réfuter toute affirmation selon laquelle il se limite géographiquement à la Cisjordanie et à Gaza.

2 juillet 2023 – Al-Shabaka – Traduction : Chronique de Palestine – Lotfallah