Par Susana Khalil
Il y a aujourd’hui, des tyrans arabes qui acceptent de se soumettre à la puissance coloniale impériale sioniste pour garder le pouvoir, ce qui met en danger le monde arabo-persan.
Le sionisme est un mouvement colonial européen. Pour l’historien anglais Keith Whitelam, c’est la continuation de l’Europe coloniale.
En 1948, le sionisme a réussi à imposer un régime colonial en Palestine sous le nom d’”Israël”. Il s’agit d’un colonialisme classique qui, toutefois, se distingue du colonialisme historique en ce sens que le colonisateur n’est pas un autre peuple, mais un mouvement qui falsifie l’histoire et se fait passer pour un peuple, le “peuple juif”.
Les juifs, les musulmans et les chrétiens ne sont pas des peuples, ce sont des religions, et il est triste de devoir expliquer cela, à ce stade de l’histoire de l’humanité, à un public soi-disant éclairé, éduqué et laïc.
L’Occident est fier de sa noble histoire de luttes pour les valeurs laïques et de ses victoires obtenues dans le sang. La laïcité fait aujourd’hui partie de son identité et de sa culture, mais considérer les Juifs comme un peuple est ridicule et inepte.
Pourtant, lorsqu’on ose affirmer cela, on se heurte à une grande opposition, à une forte censure, même de la part des pro-palestiniens. Cette question est un odieux tabou occidental et l’évoquer a de graves conséquences, du fait d’une censure totalitaire sophistiquée qui s’ancre dans un obscurantisme occidental évident.
Les idéologues de l’entreprise coloniale sioniste savaient que si le peuple autochtone obtenait son indépendance, les colonisateurs qu’ils étaient, du fait qu’ils n’étaient pas un peuple mais un mouvement qui cherchait à devenir un peuple, n’avaient pas de pays où se réfugier comme les colons habituels ; ils savaient qu’eux, en tant que Juifs, seraient obligés de retourner dans leurs patries d’origine respectives.
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C’est pourquoi il était nécessaire au colonialisme sioniste d’en finir avec le peuple autochtone pour pouvoir prendre sa place et fonder un “État-nation” appelé “Israël”. Non seulement ce principe reste en vigueur, mais il progresse.
Aujourd’hui, certaines tyrannies arabes, afin de garder le pouvoir, acceptent de se soumettre à cette force coloniale-impériale, mettant en péril le monde arabo-persan.
Le régime colonial et expansionniste d'”Israël” s’est retiré des territoires égyptiens du Sinaï, en échange de la soumission de la dictature égyptienne. Il y a eu aussi un faux retrait des territoires palestiniens, qui permet à “Israël” de s’assurer les services des traîtres palestiniens de la soi-disant Autorité palestinienne.
“Israël” occupe militairement le plateau du Golan en Syrie. Par contre, il a été obligé de se retirer unilatéralement et inconditionnellement du Sud-Liban, sans avoir réussi à soumettre le gouvernement libanais ni aucune caste libanaise, une exception due à la résistance de l’armée libanaise du Hezbollah.
Le lobby sioniste international est le maître d’œuvre de la barbare invasion militaire impériale américaine de l’Irak, au prétexte fallacieux d’y établir la démocratie et de prendre le contrôle des supposées armes de destruction massive irakiennes. Il n’y aura pas de justice dans le monde arabo-persan, tant qu’il ne sera pas mis fin à l’expansionnisme colonial anachronique d'”Israël”.
Le pire dans les Accords d’Oslo n’est pas le colonialisme sioniste qui a réussi à s’imposer partout en Palestine grâce à la complicité de l’Autorité palestinienne, mais le “mémoricide” que commet cette Autorité palestinienne en éradiquant la raison d’être, l’essence même de la lutte du peuple palestinien autochtone pour sa libération contre le joug colonial israélien.
Et ce “mémoricide” est la conséquence du renoncement à la lutte armée, quand les gens sont encouragés à adopter une approche “pacifique” de la lutte, c’est-à-dire la lutte culturelle, juridique, universitaire, politique, financière, économique, médiatique, intellectuelle, humanitaire, religieuse, artistique, culinaire et historique, qui a toujours existé aux côtés de la lutte armée et qui doit exister ; elle est vitale et a des effets magiques.
Mais elle permet aussi d’éluder, de censurer, de faire oublier les racines, l’essence même de la Cause palestinienne. De fait, presque plus personne ne parle de l’OLP, l’Organisation de libération de la Palestine.
Je ne me rappelle plus qui a dit : “Si tu veux la paix, prépare la justice”. Le peuple palestinien est confronté au mouvement fasciste le plus puissant de notre époque historique. Le sionisme est un impérialisme à la fois néolibéral et non néolibéral.
La lutte armée n’est pas facile et ne garantit pas la libération de la Palestine historique. La lutte pacifique n’est pas facile non plus ; elle se concentre sur les droits de l’homme et, dans de nombreux cas, elle n’aborde pas l’essence de la Cause palestinienne.
Les deux fronts sont importants, tous les fronts de la lutte sont importants.
Personnellement, en tant que Palestinienne née dans la diaspora et fille de paysans survivants d’Al-Nakba, je lutte pacifiquement contre le joug colonial d’Israël et pour la Libération nationale de mon peuple.
Dans le cadre du scénario d’une libération pacifique, le régime colonial d'”Israël” pourrait-t-il continuer à exister ? Du plus profond de mon âme, je réponds non. La population dite israélienne deviendrait alors palestinienne. Le simple fait de soulever cette question est scandaleux.
Cependant, je comprends que certains ne puissent pas comprendre cette évidence ; qu’ils ne puissent pas accepter le fait que les peuples autochtones aient le droit de décider eux-mêmes de leur destin. Je comprends les athées de la liberté et de la justice.
On a le droit de défendre l’existence de ce régime colonial, impérial et anachronique mais ce qui n’est pas moralement acceptable et qui constitue un outrage à la dignité humaine, c’est de censurer le droit de ses opposants à exprimer leur rejet de ce régime d’occupation. C’est contraire à la liberté d’expression censée régner dans le “monde libre”.
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A ceux qui répètent amoureusement, je soutiens “Israël”, je réponds, soutenez-le dans votre pays. Pourquoi ne lui donnez-vous pas votre patrie ? Il doit y avoir un débat sur tous ces sujets, cela fait partie des droits humains.
Je crois que nous, Palestiniens, nous devons nous repositionner, renouer avec les racines de notre cause, nous concentrer sur elle, ne pas nous en laisser distraire et ne pas nous laisser porter par les évènements. Il faut un grand courage intellectuel et une grande force d’âme pour résister à autant de censure, d’intimidation, de diabolisation et de menaces.
Nous devons faire notre révolution intellectuelle pacifique. Nous devons renverser la table, notre rébellion doit être éblouissante de lucidité et de clairvoyance intellectuelle. C’est là que réside non seulement la beauté de la cause palestinienne, mais aussi la beauté d’être Palestinien.
… Plus qu’un défi intellectuel, il s’agit de se libérer de la peur intellectuelle en gardant bien à l’esprit que le sionisme est une fraude intellectuelle, universitaire, médiatique, juridique, historique, morale, esthétique, religieuse, archéologique, sociologique et philosophique.
La libération de la Palestine et la protection du monde arabe, perse et kurde contre le colonialisme expansionniste israélien sont une seule et même cause. Il paraît que, dans le quartier d’El Guarataro, au Venezuela, on dit que la libération de la Palestine est la libération du monde.
Libérons-nous aussi de l’autocensure qui nous muselle. Nous devons être ingénieux, perspicaces et subtils. Si nous nous nous rebellons de la sorte, nous n’aurons plus de subventions, nous serons rejetés, diabolisés.
Ils veulent exterminer le peuple palestinien ; ils ont non seulement colonisé notre patrie, mais aussi son histoire, sa cuisine et son expression artistique la plus populaire. On peut dire, par exemple, qu’ils ont colonisé le falafel et la broderie.
La preuve que le colonialisme sioniste n’est pas le fait d’un peuple, c’est qu’il a besoin de s’approprier les traditions du peuple autochtone pour se donner l’apparence d’un peuple. Les colons sionistes doivent exterminer le peuple palestinien, ils doivent l’effacer de l’histoire.
Pour être honnête, le sionisme est un danger pour tout le monde, pour le monde entier. Les Palestiniens ont un rendez-vous avec l’histoire. Leur mission historique est de libérer maintenant, en ce 21ème siècle, leur peuple du régime colonial anachronique et expansionniste d'”Israël”.
Les Palestiniens doivent à l’humanité toute entière d’extirper le sionisme, le fascisme le plus puissant de notre temps. C’est le plus grand combat de notre époque. Pour accomplir notre mission nous avons besoin de tout le monde.
Peu m’importe d’être la cible des accusations ignobles et répugnantes d’antisémitisme de la suprématie sioniste, peu m’importe d’être vilipendée et diabolisée. Comme le disait Ernesto Guevara : “Ma vie n’a pas d’importance au regard des souffrances l’humanité”(1).
Oui, la libération de la Palestine est la libération du monde. Nous devons empêcher la barbarie impériale coloniale sioniste de nous détruire corps et âmes.
La vérité est que si nous laissons le peuple palestinien disparaître de la surface de la terre, l’écho de son triste destin continuera à résonner dans l’âme de l’humanité. Il deviendra le symbole d’un peuple maudit qui a failli à sa mission et contribué à maintenir l’humanité dans les ténèbres.
Tout ce dont se souviendra l’humanité, c’est que les Palestiniens étaient maudits et que les Arabes les ont trahis.
Auteur : Susana Khalil
* Susana Khalil a obtenu une licence en sciences politiques à l'Université de Québec, au Canada. Elle est une militante pour la Palestine et une chercheuse indépendante qui se concentre sur l'histoire ancienne de la Palestine et sur le mouvement sioniste en tant que forme de colonialisme européen. Elle est la fondatrice de l'Association de secours au peuple palestinien, CANAAN, une association de défense des droits de l'homme au Venezuela. Son compte Twitter.
15 janvier 2022 – Al-Mayadeen – Traduction : Chronique de Palestine – Dominique Muselet