Par Julia Kassem
Le scénario a été inversé : l’armée israélienne est désormais incapable d’envoyer ses drones et ses jets au Liban, tandis que ceux du Hezbollah survolent la Palestine occupée, atteignent leurs cibles et remplissent leurs missions, sans être interceptés.
Au lendemain de la guerre de 2006, l’entité sioniste a tenté de sauver la face en affirmant que personne n’avait gagné, alors même qu’ « Israël » n’avait pas atteint les objectifs qu’il s’était fixés, à savoir mettre hors d’état de nuire et désarmer le Hezbollah et que le Hezbollah avait, au contraire, démontré sa capacité à repousser une invasion israélienne et à infliger des pertes massives, en soldats et en matériel militaire, au régime d’occupation.
Ce n’est qu’en 2008 qu’une enquête israélienne a reconnu que l’armée israélienne avait échoué, du fait, notamment, d’une « dépendance excessive aux forces aériennes » et d’un manque de préparation et de compétences militaires.
Ces lacunes ont aussi joué un rôle dans ses échecs militaires contre Gaza, lors de ses campagnes de bombardements en 2014/2021, et maintenant dans le déluge d’Al-Aqsa, où l’entité sioniste semble en passe d’être vaincue sur toute la ligne.
Après l’invasion de Rafah, le Hezbollah a intensifié ses opérations contre l’entité sioniste, avec une bien meilleure précision de frappe.
Le Hezbollah a diffusé mardi 9 juillet 2024, le deuxième épisode de la vidéo d’espionnage par drone Hudhud. Cette vidéo de près de 10 minutes montre des images de reconnaissance aérienne de bases de renseignement, de quartiers généraux et de camps militaires de l’occupation israélienne sur le plateau du Golan syrien occupé, ramenées par des drones de la Résistance islamique.
Il a multiplié les frappes dévastatrices et décimé les quartiers généraux militaires à Kiryat Shmona et sur les hauteurs du Golan occupé.
Aujourd’hui, les responsables israéliens s’entêtent dans leur bellicisme en appelant à la guerre contre le Liban et Gallant affirme sans rire que les chars qui n’ont même pas réussi à traverser Gaza ou plutôt ce qu’il en reste après cette humiliante retraite, vont maintenant franchir le Litani.
Depuis le 8 octobre, le Hezbollah a efficacement dissuadé l’entité sioniste de l’attaquer en drainant ses forces et en montrant que ses infrastructures militaires à la frontière de la Palestine occupée n’étaient plus en sécurité, pendant qu’ « Israël » ne cessait d’exiger toutes sortes de choses et de menacer d’envahir le sud-Liban. En réalité, « Israël » est incapable de mener une campagne terrestre au Liban – ce que savent bien ceux qui ont assisté à la fin de la guerre du Liban de 2006 – et le Hezbollah est désormais capable de défier « Israël » dans les airs.
Lors des campagnes précédentes, « Israël » avait la supériorité aérienne sur ses voisins arabes. Dans le rapport de 2008 sur la guerre de 2006, l’armée de l’air israélienne était qualifiée de « superbe », mais ses réalisations militaires ou politiques globales étaient considérées comme insuffisantes.
De fait, le Hezbollah a infligé une défaite écrasante à « Israël », en repoussant toutes ses tentatives d’invasion terrestre, lancées bien trop tard dans le cours de la guerre.
L’armée d’occupation israélienne a par la suite échoué de la même façon lors de ses tentatives d’invasion terrestre de Gaza en 2009 et en 2014, face à des groupes de résistants aux technologies relativement rudimentaires.
Il y a près de 18 ans, le Hezbollah prouvait déjà qu’avec une faible technologie, il pouvait vaincre l’armée la mieux équipée et la plus avancée technologiquement au monde. Le Hezbollah continue de mener une guerre d’usure avec des résultats saisissants, en utilisant des moyens peu coûteux et des capacités limitées dans ses frappes de précision, et c’est maintenant lui qui fixe le niveau d’escalade, de riposte et d’intensité.
Une guerre générale avec la résistance libanaise serait dévastatrice pour l’état sioniste
L’entité sioniste et les États-Unis ont renoncé à convaincre le Hamas de se rendre et se concentrent maintenant sur le Hezbollah. Ils essaient de pousser le groupe de la Résistance libanaise à faire pression sur le Hamas, bien que le Hezbollah ait clairement refusé, au cours des mois précédents, de cesser ses opérations contre « Israël » à la frontière, comme le demandaient les États-Unis et la France.
Hochstein, un ancien soldat de l’armée israélienne a été, une fois de plus, envoyé par Biden au Liban, pour tenter de convaincre Beyrouth de limiter les opérations du Hezbollah dans le secteur occupé des fermes de Chebaa – reconnaissant implicitement, et peut-être involontairement, l’occupation illégale de ce territoire – pendant que la ligne de mire israélienne se déplace vers le Liban.
Rien qu’au cours des derniers mois, le Hezbollah a abattu 5 drones Hermes (coûteux), le premier le 26 février, ainsi que 2 drones Skylark. Les missiles antiaériens du Hezbollah ont repoussé les jets israéliens le 6 juin et, quatre jours plus tard, le groupe de la Résistance libanaise a presque réussi à abattre un chasseur à réaction israélien.
Le scénario a été inversé : l’armée israélienne est désormais incapable d’envoyer ses drones et ses avions à réaction au Liban, et ceux du Hezbollah peuvent traverser la Palestine occupée, atteindre leurs cibles et remplir leurs missions sans être interceptés.
En 2019, le Secrétaire Général du Hezbollah, Sayyed Hassan Nasrallah, a montré le déclin de la supériorité aérienne d’ « Israël » en abattant des drones israéliens au-dessus de Moucharrafieh, dans la banlieue sud de Beyrouth, et a juré que les drones israéliens qui survolaient le Liban seraient abattus.
Depuis, il tient sa promesse de combattre les violations quasi quotidiennes de l’espace aérien commises par Tel-Aviv au-dessus du Liban.
En février 2022, le Dôme de fer d’ « Israël » n’a pas réussi à intercepter un drone de reconnaissance du Hezbollah – un drone produit localement et baptisé à juste titre Hassaan – qui a passé plus de 40 minutes dans l’espace aérien palestinien occupé.
La même année, alors qu’ « Israël » et les États-Unis s’efforçaient de sécuriser les forages offshore près du Sud-Liban, le Hezbollah a continué à saper leur contrôle de la terre et des airs, en faisant voler un drone au-dessus du champ gazier de Karish, en Méditerranée.
Suite à l’abattage d’un drone israélien en 2021 et au succès des opérations de l’année suivante, alors que le Hezbollah modernisait rapidement ses missiles antiaériens, le commandant sortant de l’armée de l’air sioniste, Amikam Norkin, a admis que l’entité sioniste avait perdu sa domination sur le ciel libanais.
Le fait qu’ « Israël » ne puisse plus librement envahir l’espace aérien libanais et mener ses missions représente une perte historique de la supériorité aérienne longtemps vantée par l’entité sioniste, qui s’ajoute à sa perte de sécurité plus existentielle, ce qui rend d’autant plus risibles ses prétentions à envahir le Liban – outre le fait évident qu’il subit une défaite à Gaza.
Aujourd’hui, « Israël » n’a plus de marge de manœuvre, pas plus sur le territoire de la Palestine occupée et à sa frontière avec le Liban, qu’au Liban et dans la région. Aucun plaidoyer des États-Unis et de la France auprès du gouvernement libanais, ni aucune manipulation des Palestiniens et de la Résistance palestinienne par le Qatar, ne pourra compenser les énormes revers que Washington et Tel Aviv ont subis.
Au cours des premiers mois de la guerre, le Hezbollah a adopté une stratégie de guerre d’usure très contrôlée qui a progressivement aveuglé le contrôle aérien et le renseignement israéliens au nord de la Palestine occupée en détruisant l’infrastructure de sécurité le long de la frontière.
Les attaques contre la base aérienne de Meron – chargée de diriger les avions de guerre qui terrorisent notre pays – ont succédé à l’assassinat d’un responsable du Hamas, Saleh al-Arouri, le 3 janvier, et se sont poursuivies depuis.
Front nord Palestine occupée : le Hezbollah rend l’entité coloniale sourde et aveugle
Plus récemment, le 27 juin, le Hezbollah a mis le feu à la caserne de Berea, démontrant ainsi que non seulement « Israël x n’avait plus la capacité de mener des offensives aériennes, mais il n’avait même plus celle de contrecarrer les tirs de barrage de la Résistance libanaise.
Le Hezbollah a mené des attaques contre les batteries, les sites de lancement et les systèmes du Dôme de fer, ce qui a encore dégradé un système de défense dont l’inefficacité a été prouvée à plusieurs reprises par l’axe de la Résistance et laissé « Israël x en mauvaise posture, même en termes de puissance aérienne « défensive ».
L’entité est en train de perdre à la fois l’air et la mer en raison des opérations navales réussies du mouvement Ansarallah yéménite, inébranlable dans son engagement à pressurer l’entité sioniste en frappant et en appréhendant des navires liés à « Israël », et qui laisse entrevoir le lancement de sa « cinquième » phase d’opérations à la suite de l’échec de la supposée troisième phase d’ « Israël ».
Les responsables militaires israéliens et américains savent qu’au bout du compte, ils sont en train de perdre la course à l’armement avec l’Iran et craignent que la Résistance n’acquière des armes de défense aérienne iraniennes plus avancées.
Les États-Unis craignent depuis longtemps les systèmes matériels avancés et les missiles sol-air très efficaces de l’Iran, d’autant plus que désormais d’autres alliés régionaux de l’axe de la Résistance montrent qu’ils peuvent défier la supériorité militaire israélienne et donc américaine, et constituer une menace existentielle pour le projet sioniste.
Le Hezbollah a démontré qu’il était capable de battre « Israël » à la fois dans les airs et sur terre (ce qui aurait dû être déjà évident en août 2006), mais Tel-Aviv continue de se préparer à attaquer le Liban de la mi-juin à la mi-juillet.
Il est évident que l’entité sioniste ne contrôle plus ni le rythme ni le cours de l’escalade, et encore moins ses résultats. Même les assassinats par « Israël » de hauts commandants du Hezbollah – comme celui, mercredi, de Mohammed Nasser « Abu Nehme » – ne lui permettent pas de contrôler le rythme de l’escalade.
Si la prévisibilité est l’objectif désespéré d’ « Israël » à ce stade, il convient de lui rappeler les « surprises » que Sayyed Nasrallah a promises à l’entité sioniste le 24 mai. Il reste à savoir si la guerre totale entre le Hezbollah et l’entité sioniste, provoquée par Israël, aura lieu, mais ce n’est un secret pour personne que l’occupation se dirige vers son trépas.
Auteur : Julia Kassem
* Julia Kassem est rédactrice indépendante. Elle contribue à Press TV, Al-Mayadeen, au journal Riverwise de Detroit, à Against the Current et à des publications américaines telles que Counterpunch, Mintpressnews et TruthOut.
7 juillet 2024 – Al-Mayadeen – Traduction : Chronique de Palestine – Dominique Muselet