![Photo : Doaa Albaz /Activestills](https://www.chroniquepalestine.com/wp-content/uploads/2025/02/00-19-678x455.jpg)
6 février 2025 - Les Palestiniens déplacés continuent de retourner dans leurs quartiers le long de la route côtière d'Al-Rashid à Gaza, malgré des conditions météorologiques difficiles, notamment de fortes pluies, des vents violents et des températures basses. Depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu et l'ouverture du « couloir de Netzarim », environ 500 000 Palestiniens ont regagné ce qui restait de leurs maisons, pour y trouver des scènes de dévastation et d'apocalypse. Malgré l'effondrement complet des infrastructures, de nombreux Palestiniens ont choisi de revenir et de monter des tentes sur les ruines de leurs maisons. En raison des conditions hivernales difficiles de ces derniers jours, de nombreuses tentes ou abris de fortune ont été endommagés, ce qui a encore aggravé les conditions humanitaires. Un porte-parole de la défense civile de Gaza signale également qu'Israël ne respecte pas les protocoles humanitaires définis dans l'accord de cessez-le-feu, notamment en autorisant l'entrée dans la bande de Gaza de maisons mobiles et d'équipements lourds - Photo : Doaa Albaz /Activestills
Par Yara Hawari
Les gens se sont battus bec et ongles contre les assassinats, l’emprisonnement et l’expulsion de leur patrie. Ils ne céderont pas d’un pouce.
Les premières semaines de mandat de Donald Trump ont envoyé un message clair : il soutiendra la vision de Benjamin Netanyahou concernant l’expulsion permanente des Palestiniens de Gaza.
Cela était évident avant même sa conférence de presse incohérente de mardi avec le Premier ministre israélien, premier dirigeant étranger à se rendre aux États-Unis depuis l’investiture du président.
Comme d’habitude, M. Trump a commencé son discours en énumérant toutes ses soi-disant réalisations dans la région – dont beaucoup sont illégales au regard du droit international – au cours de son mandat précédent, notamment le déménagement de l’ambassade des États-Unis à Jérusalem, la reconnaissance de l’annexion illégale du Golan syrien par Israël et les accords d’Abraham.
Une fois qu’il a eu fini de s’autocongratuler, il a présenté les projets de son administration pour Gaza.
Il s’en est suivi un flot de contradictions : il a affirmé qu’il n’y aurait pas de reconstruction à Gaza, tout en déclarant que les États-Unis dirigeraient les efforts de reconstruction ; il a affirmé que les Palestiniens devraient partir, avant de déclarer que les États-Unis créeraient des emplois pour tous, et pas seulement pour « un groupe spécifique de personnes », et que les Palestiniens continueraient à vivre dans cette région.
La dissonance cognitive était palpable, et à certains moments, même Netanyahu a semblé embarassé.
Trump a également avancé l’idée d’une « appropriation » de Gaza par les États-Unis – la question de savoir si cela signifierait le déploiement de troupes américaines n’a pas été confirmée.
L’ambiguïté entourant cette déclaration reflète la rhétorique incohérente habituelle de Trump, mais aussi son désir récemment exprimé d’étendre le territoire américain, y compris au Canada et au Groenland.
Une semaine après l’investiture, les Américains faisaient pression sur l’Égypte et la Jordanie pour qu’elles accueillent les Palestiniens déplacés de force, afin de « nettoyer » Gaza.
Alors que certains commentateurs et journalistes des médias grand public ont exprimé leur indignation face à ce qui équivaut à une projet de nettoyage ethnique, ils oublient commodément qu’au début du génocide, l’administration Biden lançait également l’idée d’expulser les Palestiniens vers le Sinaï égyptien, en plus de fournir régulièrement au régime israélien des armes qui ont contribué à l’assassinat de plus de 60 000 Palestiniens.
Ce type d’indignation sélective sur ce que dit Trump par rapport à ce que l’administration Biden a réellement fait est sans aucun doute un phénomène que nous verrons se répéter dans les années à venir.
Cependant, il est essentiel de comprendre qu’il ne s’agit pas simplement d’une déclaration de nettoyage ethnique, mais aussi d’un désir de poursuivre le génocide que le régime israélien commet contre les Palestiniens de Gaza depuis 16 mois.
Il est tout aussi essentiel de reconnaître que ce génocide s’est étendu à la Cisjordanie, où l’armée israélienne rase les camps de réfugiés et déplace des milliers de Palestiniens.
Le camp de réfugiés de Jénine, qui subit depuis des semaines l’invasion de l’armée, a vu tous ses résidents expulsés de force, des dizaines de personnes, dont des enfants, tuées, et des quartiers entiers détruits à l’explosif.
Cet assaut est clairement un assaut contre la vie palestinienne elle-même, et l’objectif est très simple : débarrasser la terre du plus grand nombre possible de Palestiniens.
Face à tout cela, les Palestiniens n’ont pas été des acteurs passifs, et ils ne l’ont jamais été.
Au cours des 16 derniers mois, les Palestiniens de Gaza nous ont également montré à quoi ressemble la résistance au génocide. Ils ont refusé de quitter leur patrie après des destructions massives – comme nous n’en avons jamais vu de notre vivant.
Après les commentaires de Trump, les Palestiniens de Gaza se sont rendus sur les médias sociaux pour dire au dirigeant du pays le plus puissant du monde qu’ils ne quitteront pas leur terre.
Par exemple, le journaliste Abubaker Abed, basé à Gaza, a écrit : « Comment mon avenir peut-il être décidé par quelqu’un d’autre ? … Nous sommes ici. Et nous ne partirons pas. »
Cela n’a rien de surprenant. Depuis plus de sept décennies, le peuple palestinien subit des massacres, des incarcérations et des déplacements systématiques de sa terre ancestrale par le régime israélien. Pourtant, il s’est battu bec et ongles contre cet effacement.
Ainsi, bien que les commentaires de Trump soient alarmants et génocidaires, il est clair qu’il sous-estime la détermination des Palestiniens à rester sur leur terre.
Auteur : Yara Hawari
* Yara Hawari est Senior Palestine Policy Fellow d'Al-Shabaka. Elle a obtenu son doctorat en politique du Moyen-Orient à l'Université d'Exeter, où elle a enseigné en premier cycle et est chercheur honoraire.En plus de son travail universitaire axé sur les études autochtones et l'histoire orale, elle est également une commentatrice politique écrivant régulièrement pour divers médias, notamment The Guardian, Foreign Policy et Al Jazeera. Son compte twitter.
5 février 2025 – The Guardianhttps://www.theguardian.com/commentisfree/2025/feb/05/palestinians-donald-trump-gaza-killings-incarceration-displacement-homeland – Traduction : Chronique de Palestine
Soyez le premier à commenter