Par Abdel Bari Atwan
Les États arabes sont de connivence dans la guerre américano-israélienne contre la résistance palestinienne.
Il est honteux que des dirigeants arabes aient assisté à la conférence de la Cop28 à Dubaï aux côtés du président israélien Isaac Herzog, alors que ce pays mène un assaut génocidaire contre la bande de Gaza, qui a coûté la vie à au moins 16 000 civils innocents jusqu’à ce jour.
Je comprends qu’il s’agisse d’un événement annuel de l’ONU pour discuter des questions environnementales et du changement climatique, mais le tapis rouge déroulé pour Herzog et ses rencontres avec des dirigeants arabes, notamment ceux des Émirats arabes unis et du Qatar, sont une insulte aux victimes et aux deux millions de personnes qui ont été déplacées de force et privées des éléments essentiels de la vie.
Le président iranien Ebrahim Raisi a boycotté la conférence et la délégation iranienne s’est retirée pour protester contre la présence du président israélien.
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Les participants arabes auraient dû faire de même, au minimum, ou aller plus loin en rompant tous les liens avec Israël et en fermant ses ambassades, comme l’ont fait plusieurs pays non arabes et non musulmans tels que la Bolivie, le Chili, la Colombie et l’Afrique du Sud.
Les groupes palestiniens qui résistent courageusement à l’assaut, après avoir infligé une défaite historique à l’occupation en attaquant les avant-postes militaires et les colonies entourant la bande de Gaza, ont violemment critiqué l’accueil de M. Herzog à ce moment-là.
Le Hamas a contenu son indignation dans une déclaration polie disant qu’il « espérait que les Émirats arabes unis ne l’auraient pas invité ».
Les États-Unis ont été directement impliqués dans la guerre génocidaire, en transportant par avion des munitions et des missiles vers Israël, en envoyant 2000 soldats pour soutenir l’assaut et en fournissant 14 milliards de dollars pour couvrir les coûts.
Ils préparent maintenant une guerre politique parallèle contre les groupes de résistance, en particulier le Hamas, visant à leur fermer les portes de la plupart des capitales arabes, en particulier Doha (qui, de l’aveu d’un de ses propres officiels, avait ouvert un bureau du Hamas à la demande des États-Unis eux-mêmes et avec l’approbation d’Israël).
Selon un rapport de l’agence Reuters, confirmé par la suite par d’autres médias, le Qatar a déclaré aux États-Unis qu’il était prêt à reconsidérer la présence de dirigeants du Hamas sur son sol une fois que la crise actuelle concernant les captifs détenus par le groupe sera terminée.
L’émir du Qatar, le cheikh Tamim bin-Hamad, et le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, seraient parvenus à un accord à ce sujet.
Cette campagne contre les mouvements de résistance, initiée par Israël, risque de se retourner contre les États-Unis et leurs intérêts dans la région. Elle alimentera l’extrémisme et renforcera l’attrait de l’axe sino–russe en pleine ascension.
Le Qatar, qui a accueilli le Hamas pour se distinguer politiquement et dans l’opinion publique des autres États du Golfe – des « normalisateurs » en particulier – risque d’être l’un des plus grands perdants s’il cède aux diktats américains.
L’histoire est occupée ces jours-ci à enregistrer les positions prises par les gouvernements arabes, dont la plupart sont en contradiction flagrante avec les valeurs islamiques et les principes de solidarité arabe qu’ils prétendent épouser, puisqu’ils conspirent contre les mouvements qui résistent au nettoyage ethnique et au génocide et qui défendent les lieux saints de Jérusalem au nom des peuples arabes et musulmans.
Quelle que soit l’issue de la guerre de Gaza – et je pense qu’elle se soldera par une défaite stratégique pour Israël -, elle pourrait renverser toutes les politiques de soumission qui l’ont précédée à la suite des directives des États-Unis et de leurs appendices dans la région.
Elle pourrait déclencher l’effondrement des régimes de connivence, à l’instar de la période qui a suivi la Nakba de 1948.
Les régimes complices devraient commencer à se faire du souci.
Auteur : Abdel Bari Atwan
* Abdel Bari Atwan est le rédacteur en chef du journal numérique Rai al-Yaoum. Il est l’auteur de L’histoire secrète d’al-Qaïda, de ses mémoires, A Country of Words, et d’Al-Qaida : la nouvelle génération. Vous pouvez le suivre sur Twitter : @abdelbariatwan
3 décembre 2023 – Raï al-Yaoum – Traduction : Chronique de Palestine