Par Abdel Bari Atwan
La résistance vient maintenant d’Égypte et il y a des milliers de futurs Mohammad Salah dans tous les pays arabes, écrit Abdel Bari Atwan.
Au-delà des sentiments, il convient de faire une lecture politique de l’opération de guérilla de dimanche à al-Awja, au cours de laquelle le policier égyptien des frontières Mohammad Salah a tué trois soldats israéliens et en a blessé deux autres, provoquant une réelle inquiétude dans l’État occupant israélien et déconcertant ses généraux bardés de médailles.
Plusieurs points méritent d’être soulignés.
Tout d’abord, le jeune conscrit de 23 ans a bien planifié son attaque. Il ne s’agissait pas d’un incident spontané. Des pinces coupantes, cinq chargeurs de munitions, des poignards militaires et un Coran ont été trouvés en sa possession.
Il a marché sept kilomètres depuis sa base jusqu’à la clôture de la frontière avec la Palestine occupée, et a utilisé les pinces coupantes et les poignards pour la franchir.
Deuxièmement, toutes les victimes étaient des soldats israéliens en uniforme de l’armée d’occupation, comme lui. Il n’a pas visé de civils, contrairement aux troupes d’occupation israéliennes en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, dont la dernière victime a été un enfant en bas âge.
Troisièmement, franchir la barrière de sécurité de barbelés, équipée de caméras de surveillance, que ce soit par la brèche qu’il a ouverte ou par la porte de secours fortifiée, est un exploit considérable, qui témoigne d’une grande intelligence, d’une détermination sans faille et d’une volonté de terminer sa vie en martyr.
Quatrièmement, cette opération et l’importante brèche militaire et sécuritaire qu’elle a entraînée ont mis en évidence non seulement les défaillances de l’armée israélienne, mais aussi le haut niveau de la nouvelle génération émergente de jeunes résistants arabes à laquelle l’occupant israélien est confronté.
Cinquièmement, Mohammad Salah s’est appuyé sur un fier héritage d’opérations similaires menées par le personnel égyptien, à commencer par l’attaque de Suleiman Khater en 1985 contre les troupes et les colons israéliens dans le Sinaï, au cours de laquelle sept personnes ont été tuées, et suivie par Ayman Muhammad Hussein, qui a franchi la frontière en uniforme militaire et a ouvert le feu sur des véhicules israéliens en novembre 1990, tuant cinq Israéliens et en blessant 27 autres.
Sixièmement, malgré tous les drones, les caméras et les patrouilles motorisées et pédestres à la frontière, les généraux israéliens n’ont appris l’attaque que cinq heures après qu’elle ait eu lieu. Voilà pour la prétendue « invincibilité » de l’armée d’occupation.
Le coup au moral porté par Mohammad Salah à l’armée et aux services de sécurité israéliens a été bien plus grave que les pertes réelles qu’il a infligées, surtout après la récente faille de sécurité dans le nord, lorsqu’un combattant a traversé le Liban et fait exploser une bombe à Megiddo, en Galilée.
L’avenir nous dira quand des attaques similaires commenceront sur le front oriental, ou par la mer sur le front occidental. Les préparatifs sont en cours.
Les clôtures électrifiées, barbelées ou en béton ne pourront pas protéger l’État occupant et ses colons. Les résistants peuvent y faire des brèches, les franchir avec des tirs de roquettes ou creuser des tunnels en dessous.
Des centaines de milliers de jeunes gens partagent l’engagement et la détermination de Mohammad Salah en Égypte et dans tous les autres pays arabes et musulmans.
Auteur : Abdel Bari Atwan
* Abdel Bari Atwan est le rédacteur en chef du journal numérique Rai al-Yaoum. Il est l’auteur de L’histoire secrète d’al-Qaïda, de ses mémoires, A Country of Words, et d’Al-Qaida : la nouvelle génération. Vous pouvez le suivre sur Twitter : @abdelbariatwan
8 juin 2023 – Raï-al-Youm – Traduction : Chronique de Palestine