Occupation : les Palestiniens doublement impactés par les effets du changement climatique

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Dans les territoires palestiniens sous occupation, le rationnement de l'eau est pour Israël une véritable arme de guerre - Photo : Archives

Par Zena Agha

Le changement climatique fait partie des plus grandes menaces auxquelles la vie humaine est actuellement confrontée. Ses effets sont globaux, étendus et inégalement répartis. Bien que les Palestiniens et les Israéliens partagent théoriquement le même espace, les Palestiniens sous occupation subiront plus durement les effets du changement climatique.

Le seul plus grand risque non environnemental auquel sont confrontés les Palestiniens de Cisjordanie reste l’occupation israélienne en cours, une occupation tellement omniprésente que le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) considère qu’il s’agit d’un “risque” environnemental à part entière.

Maintenant dans sa 52ème année, l’occupation [des territoires de 1967] empêche les Palestiniens d’accéder et de gérer leurs terres et leurs ressources, en particulier l’eau. De fai, cela les empêche de prendre des mesures pour soutenir l’adaptation au changement climatique, qui consiste à ajuster les systèmes humains ou naturels en réponse aux effets du changement climatique.

En Cisjordanie, l’incapacité de l’Autorité palestinienne à conduire des politiques d’adaptation est une conséquence directe de l’occupation et aura de graves conséquences humaines et environnementales pour les habitants palestiniens.

Conséquences pour la Palestine

La Palestine [parties occupées en 1948 et 1967] est situé dans l’une des régions les plus pauvres en eau du monde. Le changement climatique devrait entraîner une diminution des précipitations et une hausse des températures. Cela met gravement en péril les secteurs de l’eau et de l’agriculture, en particulier dans les Territoire palestiniens occupsé (TPO), qui possèdent l’une des plus faibles ressources en eau du monde.

La principale source d’eau potable des Palestiniens est l’eau souterraine stockée (principalement des aquifères), tandis qu’environ la moitié de l’eau extraite de ces puits est utilisée pour l’agriculture.

Israël a mis au point un système bureaucratique complexe conçu pour contrôler et limiter l’accès des Palestiniens aux eaux souterraines sous le couvert de l’application des termes de l’Accord intérimaire Oslo II de 1995, qui prévoyait l’attribution temporaire de ressources en eau au gouvernement israélien et à l’Autorité palestinienne. Oslo II a accordé à Israël le contrôle d’environ 80% des réserves d’eau de la Cisjordanie pour une période initiale de cinq ans.

L’accord, qui est en vigueur à ce jour, n’a donc pas pris en compte les changements à long terme dans la distribution de l’eau ou la croissance de la population.

Le Comité conjoint de l’eau (JWC), un organe des accords d’Oslo, empêche les Palestiniens de prendre des décisions relatives à l’eau sans l’accord d’Israël, leur bloquant l’accès au Jourdain et leur refusant les autorisations nécessaires pour capturer les eaux de ruissellement dans des barrages. Les politiques israéliennes rendent donc extrêmement difficile pour les Palestiniens de développer un nouvel système d’accès à l’eau ou de réparer les infrastructures existantes; il en résulte fréquemment la démolition de structures et de puits de survie, sous prétexte que ces structures ont été construites sans la permission de la force occupante.

Dans le même temps, les 600 000 colons illégaux d’Israël utilisent six fois plus d’eau que les trois millions de Palestiniens de Cisjordanie. Les destructions des colons contre les infrastructures palestiniennes met en péril les systèmes d’approvisionnement en eau déjà fragiles.

La plupart de l’eau palestinienne est utilisée pour l’irrigation, faisant des agriculteurs et des éleveurs ceux qui supporteront le poids de toute réduction supplémentaire de la disponibilité en eau.

Le vol de terres par Israël, les restrictions de mouvement et un accès contrôlé aux terres de pâturage aggravent la vulnérabilité particulière des agriculteurs et des éleveurs. Avec plus de 400 postes de contrôle et barrages routiers en Cisjordanie, un système discriminatoire pour la délivrance de permis de mobilité à des fins militaires, l’extension des colonies et des routes réservées aux colons, et le mur d’apartheid, les terres disponibles pour l’agriculture palestinienne sont de moins en moins disponibles et les agriculteurs sont de moins en moins en mesure d’exploiter leurs terres, ce qui menace leurs récoltes et leurs troupeaux.

En outre, la plupart des ressources naturelles et des espaces ouverts de la Cisjordanie, y compris certaines des meilleures terres agricoles de la vallée du Jourdain, se trouvent dans la zone C, qui représente plus de 63% de la Cisjordanie et qui a été annexée de manière effective par l’occupant israélien.

L’Autorité Palestinienne

L’Autorité palestinienne n’a pas de compétence souveraine sur plus de 60% du territoire de la Cisjordanie et n’exerce aucune autorité politique indépendante dans la gestion des risques liés au climat. La mauvaise gouvernance et la fracture politique entre le Hamas à Gaza et le Fatah en Cisjordanie accroissent les risques pour une population palestinienne déjà vulnérable.

En particulier, l’Autorité palestinienne est mal équipée pour soutenir l’adaptation à long terme, un défi qui nécessite un soutien politique extérieur, une collaboration interministérielle solide et des ressources budgétaires plus importantes que celles actuellement disponibles.

Par exemple, l’Autorité de la qualité de l’environnement de l’Autorité palestinienne a élaboré une “stratégie nationale d’adaptation au changement climatique” en 2011 avec le soutien d’experts externes et de donateurs. Le plan souligne la nécessité de s’adapter au climat et estime le coût estimé de l’adaptation des ressources en l’eau et de l’agriculture à 1 milliard de dollars et à 369,3 millions de dollars, respectivement, bien au-delà de la capacité financière existante.

Il convient de noter que bon nombre des problèmes fiscaux de l’Autorité palestinienne viennent d’Israël, qui a siphonné les recettes fiscales, l’aide et les recettes commerciales palestiniennes pour les rediriger vers ses propres coffres.

En ce qui concerne le soutien international, la Palestine est devenue partie à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) en mars 2016 et a ratifié l’Accord de Paris un mois plus tard. Le plan national d’adaptation de la Palestine a été soumis à la CCNUCC en novembre 2016.

Ces efforts sont certes indispensables, mais ils ne sont ni assez rapides ni suffisamment complets pour compenser les effets du changement climatique, aggravé par l’occupation israélienne en expansion constante.

Recommandations

1. Les arrangements environnementaux des Accords Oslo II, en particulier en ce qui concerne les droits d’utilisation de l’eau, devraient être reconnus comme expirés et les Palestiniens devraient retrouver un accès total et sans compromis aux aquifères et au Jourdain.

2. L’Autorité palestinienne et les organisations de la société civile palestinienne devraient développer une campagne de sensibilisation pour informer les Palestiniens des risques liés au changement climatique et suggérer des stratégies d’adaptation.

3. La collecte de données précises est cruciale pour renforcer la capacité de l’AP pour l’adaptation au changement climatique. L’AP devrait poursuivre la collecte, l’analyse et le partage coordonnés d’informations pertinentes sur le climat, en se concentrant sur les données climatiques locales afin de permettre un suivi en temps réel.

4. La société palestinienne étant fortement tributaire de l’aide extérieure, les donateurs internationaux devraient financer des projets intégrant pleinement l’atténuation des risques liés au climat. Toutefois, l’architecture de l’aide et des ONG dans les TPO suscite de nombreuses critiques et l’intégration de la vulnérabilité climatique dans ce cadre n’est pas sans préoccupations éthiques.

21 septembre 2019 – Quds News Network – Traduction : Chronique de Palestine