Par Ali Abunimah
Au bout de 10 ans de blocus israélien, les conditions de vie des deux millions de Palestiniens piégés dans la bande de Gaza sont, à tous égards, pires que jamais.
Le blocus israélien, selon le groupe des droits de l’homme B’Tselem, oblige les résidents de Gaza « à vivre dans une pauvreté abjecte dans des conditions inhumaines sans égales dans le monde moderne ».
Mais l’Union européenne, qui se targue pourtant d’être le champion de la liberté, de la démocratie et des droits de l’homme, se lave les mains du sort des habitants de Gaza.
Après quatre jours de réduction progressive d’électricité, Israël en est arrivé maintenant à réduire de 60 % l’électricité qu’il fournit à la bande de Gaza.
Comme à cela s’ajoutent les coupures habituelles, la plupart des ménages ne disposent que d’environ quatre heures d’électricité par jour.
Comme de nombreux organismes internationaux le clament, le territoire est en pleine crise humanitaire.
À la mi-mai, le Comité international de la Croix-Rouge a déclaré que Gaza était au bord de l’effondrement systémique du fait que les salles d’opération, les systèmes d’eau et d’assainissement avaient cessé de fonctionner.
Déjà, le principal hôpital de la ville de Gaza a réduit ses opérations chirurgicales d’un tiers et, comme l’effet du blocus est exacerbé par la crise de l’électricité, le territoire est inondé par les eaux usées.
La cruauté de l’Autorité Palestinienne
Israël se cache derrière l’Autorité palestinienne, qui a demandé à Israël de réduire l’approvisionnement en électricité de Gaza, dans le cadre des efforts du chef de l’Autorité Palestinienne Mahmoud Abbas pour saper le Hamas qui régit l’intérieur de Gaza.
L’approvisionnement en carburant pour la seule centrale électrique de Gaza a cessé en avril, ce qui a transformé une grave pénurie chronique d’électricité en une catastrophe imminente. Les autorités de Gaza ont maintenant réussi à obtenir quelques jours d’approvisionnement en carburant depuis l’Égypte – malgré les efforts de l’AP pour empêcher l’Égypte de donner ce bref sursis à Gaza.
La cruelle campagne de l’Autorité palestinienne contre le peuple de Gaza comprend également la réduction des approvisionnements en médicaments sur le territoire. En conséquence, plus de 300 patients atteints de mucoviscidose sont en danger mortel et 90 % des patients cancéreux ne reçoivent plus un traitement complet, entre autres menaces imminentes à la vie et à la santé, selon l’association Médecins pour les droits de l’homme – Israël.
L’UE est un élément-clé du problème
Mais comme de nombreux groupes de défense des droits de l’homme l’ont souligné, Israël ne peut pas échapper à sa responsabilité.
Israël reste la puissance occupante à Gaza. Il a seul le pouvoir de mettre immédiatement fin à la souffrance de ses habitants et il a l’obligation légale de le faire en vertu de la Quatrième Convention de Genève.
Israël agit cependant en toute impunité, car il est soutenu par des puissances mondiales, en particulier par l’Union européenne, son plus grand partenaire commercial.
Cela fait plusieurs jours, que l’Intifada électronique demande au Service d’action extérieure de l’Union européenne, le ministère des Affaires étrangères de l’UE, de commenter la situation à Gaza et d’expliquer ce que fait l’UE pour obtenir d’Israël qu’il recommence à fournir de l’électricité à Gaza.
Mardi, Maja Kocijancic, le porte-parole du chef de la politique étrangère de l’UE, Federica Mogherini, a confirmé qu’elle avait reçu la demande de The Electronic Intifada et elle a promis « de s’informer des derniers développements » et « de revenir vers vous le plus vite possible ».
Mais deux jours de plus ont passé et la date butoir de jeudi après-midi est arrivée dans un silence total de l’UE, malgré nos rappels fréquents à Kocijancic et à ses collègues.
Qui ne dit mot consent…
L’UE accorde à Israël toutes sortes de concessions commerciales et d’avantages financiers en vertu de leur soi-disant Accord d’association.
Cet accord précise que les relations entre l’UE et Israël « doivent reposer sur le respect des droits de l’homme et des principes démocratiques », une assertion considérée comme « un élément essentiel » de l’accord.
Des dizaines de membres du Parlement européen ont exhorté Mogherini à suspendre l’accord – à la lumière des violations répétées et flagrantes d’Israël des droits des Palestiniens.
Mais au lieu de cela, l’UE semble déterminée à récompenser Israël.
Un indicateur fiable de ce parti pris est le flot régulier de tweets que le Bureau de représentation de l’UE à Tel-Aviv, envoie, sur son compte officiel, pour célébrer le « partenariat » de l’UE avec Israël, y compris des programmes de « recherche » qui financent l’industrie militaire israélienne.
Cette semaine même, alors que les conditions à Gaza se détérioraient, l’UE a vanté sa coopération militaire avec Israël sur de soi-disant « défis partagés ».
Qui plus est, le Service d’action extérieure de l’UE ne s’est pas fendu d’un seul tweet sur Gaza depuis 2015.
La récente intensification de la crise à Gaza dure depuis avril et elle a suscité de nombreuses inquiétudes qu’elle pourrait conduire à une nouvelle guerre.
Le silence de l’UE ne peut donc pas être dû à une méconnaissance des faits.
On ne peut que le considérer comme un soutien tacite à l’intensification du blocage contre Gaza et une acceptation implicite des souffrances qu’Israël inflige sciemment à une population épuisée et traumatisée par une décennie d’isolement et d’agressions militaires israéliennes répétées.
L’Union européenne est bien en train d’approfondir son partenariat avec Israël.
C’est un partenariat dans le crime.
* Ali Abunimah est un journaliste palestino-américain, auteur de The Battle for Justice in Palestine. Il a contribué à The Goldstone Report : The Legacy of the Landmark Investigation of the Gaza Conflict. Il est le cofondateur de la publication en ligne The Electronic Intifada et consultant politique auprès de Al-Shabaka.
22 juin 2017 – The Electronic Intifada – Traduction : Chronique de Palestine – Dominique Muselet