En effet, Il s’était écoulé moins d’un mois depuis la remarquable déclaration du président américain Donald Trump sur Jérusalem, – décision apparemment à l’ordre du jour dès le début de sa remarquable administration – avant que le parti au pouvoir, le Likoud, ne frappe.
Tout d’abord, à la veille du Nouvel An – présage pour l’avenir s’il en fut -, le comité central du Likoud, le parti du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, bien qu’en son absence, a adopté à l’unanimité une motion pour l’annexion de toutes les colonies de peuplement juives en Cisjordanie occupée (à l’exception de Jérusalem, qu’Israël avait annexée unilatéralement depuis longtemps, en violation du droit international).
Regardez une carte et voyez combien cela représente de la Cisjordanie. Annexer la soi-disant zone C – dont Israël a le contrôle militaire et administratif complet – signifierait la mort (une fois de plus) de la solution à deux états. (Jetez un coup d’œil à la carte et demandez-vous quelle chance la solution à deux états a jamais eu).
LIRE ÉGALEMENT : Jérusalem : Israël accélère son projet raciste et ségrégationniste
La motion du Likoud n’est pas contraignante pour le cabinet ministériel, ni n’a été adoptée au parlement. C’est toutefois une indication de ce que les likoudniks considèrent être une politique populaire. On dit aussi que ce serait l’ébauche d’un projet de loi qui sera bientôt soumis au parlement israélien, la Knesset, en vue de faire appliquer le droit israélien dans toutes les colonies de peuplement, mais il n’est pas clair en quoi cela différera de la situation actuelle, où les colons juifs sont régis par le droit civil israélien et les Palestiniens de la même région par le droit militaire.
Un clou de plus
Quoi qu’il en soit, cela revient à une tentative de légaliser l’annexion de facto de la dite zone C, et c’est ainsi que la voient les hommes/femmes politiques israéliens qu’ils soient pour ou contre.
En outre, le 2 janvier, les députés israéliens ont adopté une nouvelle loi qui impose à tout gouvernement israélien d’obtenir une super majorité (80 des 120 sièges de la Knesset) pour céder à un autre pays tout territoire de Jérusalem (tel que défini par la frontière élargie par Israël autour de la ville).
En d’autres termes, le parlement israélien actuel a rajouté un obstacle supplémentaire d’importance pour entraver tout futur gouvernement qui voudrait signer un accord de paix avec les Palestiniens dans le but de créer deux états.
Rien de tout ceci ne signifie que sans l’avènement de la coalition de Trump ou de Netanyahu, la solution à deux états n’était pas déjà une idée depuis longtemps périmée.
On peut soutenir qu’elle était mort-née, avortée par la détermination de Yithzak Rabin à ce que les Accords d’Oslo ne fassent aucune référence à un état palestinien, mais seulement à l’auto-détermination, et par la croissance quasi exponentielle des colonies sous son mandat. Cette croissance n’a fait bien sûr, que se poursuivre, sans interruption, sous tous les premiers ministres israéliens et présidents américains depuis. (Regardez encore cette carte et dites-vous que la solution à deux états avait une quelconque chance).
Ainsi, alors qu’il serait tentant de dire que la droite israélienne se hâte d’enfoncer le dernier clou dans le cercueil des deux états, ce cercueil est tellement criblé de derniers clous qu’il semble plus juste de soutenir que la droite israélienne se livre à une veillée délirante, bien arrosée et annule la période de deuil pour faire en sorte qu’il ne puisse y avoir de résurrection.
Ignorante et arrogante
Cette fuite en avant a bien entendu été encouragée par l’administration états-unienne qui lui est totalement favorable.
On dit que D. Trump veux que la Jordanie prenne en charge ce qui restera de la Cisjordanie, et l’Égypte Gaza, ce qui, si cela est vrai, montre à quel point cette administration est d’une ignorance crasse et arrogante. La Jordanie n’acceptera pas les restes de la Cisjordanie. Pourquoi le ferait-elle ? Aucune somme d’argent au monde ne pourrait compenser l’instabilité que cela provoquerait dans un royaume qui fait déjà le grand écart sur le fossé démographique entre les populations dites des rives orientale et occidentale du Jourdain.
Quant à l’Égypte, Le Caire a suffisamment de problèmes dans le Sinaï sans y ajouter Gaza.
Voilà pour Washington. Mais quelle nouvelle réalité la droite israélienne veut-elle ? Elle ne semble pas le savoir très clairement. Annexer les colonies de peuplement, toutes illégales au regard du droit international qui interdit à une puissance occupante telle qu’Israël de transférer sa population civile dans les territoires qu’elle occupe, ne résout pas le problème épineux de toute cette population indigène qui y vit.
A court terme, cela signifierait une séparation plus officielle de zones peuplées de personnes (colons juifs) qui jouissent de droits pleins et entiers, et d’autres de personnes (Palestiniens) sans aucun droit, sans contiguïté territoriale, sans auto-détermination et sous totale dépendance économique. Tout comme la réalité actuelle, mais sans le vernis d’un processus de paix.
Et à plus long terme ? Fini l’Autorité palestinienne (que ferait-elle, de toute et façon ?) et quel rôle pour la Jordanie et l’Égypte, rien de moins clair. Plus de nettoyage ethnique ? Pour être efficace il faudrait qu’il surpasse l’expulsion massive de 1948. Après tout il y a maintenant près de trois millions de Palestiniens en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est. Et deux autres millions à Gaza.
Ou est-ce le début d’une longue route, ardue, sinueuse et (peut-être) inévitable, faisant des détours par le racisme et l’apartheid, vers un état unique dont les citoyens jouissent tous de droits égaux dans une, deux, voire trois générations ?
Il devrait y avoir de meilleurs moyens d’y parvenir.
* Omar Karmi est rédacteur en chef adjoint de The Electronic Intifada et anciennement correspondant du journal The National à Jérusalem et Washington, DC.
6 janvier 2018- The Electronic Intifada – Traduction: Chronique de Palestine – MJB